Travailler en collectif
Un bilan des groupes Déphy

Berty Robert
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C'est lors du colloque Ecophyto organisé par la Chambre d'agriculture de Bourgogne-Franche-Comté qu'a été présenté un bilan des actions des groupes Déphy qui permettent à des collectifs d'agriculteurs de réfléchir sur leurs pratiques, en particulier pour réduire le recours aux produits phyto.

Un bilan des groupes Déphy
La composition du réseau des fermes Déphy en Bourgogne-Franche-Comté

Dans le cadre du colloque Ecophyto, organisé fin novembre à Beaune par la chambre régionale d’Agriculture de BFC, a été présenté un bilan du réseau des groupes Déphy qui fédère des collectifs d’agriculteurs et des fermes dans lesquelles sont menées des expérimentations, dans le but de réduire le recours aux produits phytosanitaires. Une récente publication a fait le point sur dix ans de résultats nationaux obtenus par le réseau Déphy, fort de 2.000 fermes en France, dans toutes les filières de productions végétales. Le réseau se montre de plus en plus économe, en matière de produits phytos, comparé à l’ensemble de la Ferme France. La synthèse Déphy montre une baisse de l’Indice de fréquence de traitements phytosanitaires (IFT), hors biocontrôle, pour l’ensemble des filières suivies. Elles ont même dépassé les objectifs du plan Ecophyto 2 +. Par exemple, en grandes cultures polyculture élevage (GCPE) (voir encadré), par rapport à 2020, la baisse atteint 33 %, en maraîchage, c’est 37 %, et 29 % en viticulture. Les fermes du réseau présentent un niveau de charges opérationnelles en baisse et une stabilité des charges de mécanisation ce qui constitue plutôt une surprise dans la mesure où la baisse du recours aux produits phytos se traduit par des travaux mécaniques plus importants, notamment en désherbage. Les surfaces concernées par ces travaux sont passées de 30 à 43 % du total. Le propos doit toutefois être nuancé si l’on focalise sur la Bourgogne Franche-Comté : la baisse du produit brut atteint 11 % dans les fermes du réseau Déphy régional et les charges de mécanisation sont ici en hausse de 3 %.

Importance de l’évolution des rotations

Dans les fermes du réseau national, on constate des marges en légère baisse, ce qui n’est pas forcément corrélé à la baisse d’utilisation des phytos. Les baisses de produits bruts sont, en moyenne de 120 euros / ha en système GCPE. Elles sont à mettre en relation avec la présence d’années défavorables au rendement pendant la période observée pour les besoins de l’étude. Trois facteurs interagissent, qui peuvent apporter des explications à cette évolution : la diversification des cultures (62 % des systèmes avec changement de rotation), l’évolution des rendements et celle des prix de vente. En système GCPE, on note d’importantes réductions des IFT pour les systèmes ayant changé de rotation, mais aussi plus de cultures de protéagineux et moins de céréales à paille. En polyculture élevage, on trouve plus de prairies. Au bilan, il apparaît qu’à l’avenir, il faudra plus tenir compte du climat de l’année dans l’interprétation des performances obtenues, mais le bilan technico-économique et environnemental des fermes Déphy (en GCPE) est satisfaisant. Les leviers mobilisés en agriculture biologique comme en conventionnelle ont prouvé leur efficacité et sont source d’enseignements dans l’optique de la stratégie Ecophyto 2030.

L'exemple du secteur grandes cultures polyculture élevage

Dans le domaine de la réduction des IFT, les fermes en grandes cultures polyculture élevage (GCPE) du réseau Déphy ont obtenu de très bons résultats. La synthèse opérée par le réseau Déphy en 2023 révèle des résultats mesurés sur la période 2018-2020. Elle montre une baisse de 26 % des IFT (de 2,6 à 1,9) avec, toutefois, des différences entre grandes cultures et polyculture élevage. En grandes cultures, on est passé d’un indice IFT à l’état initial, de 3,4, à 2,6 sur la période 2018-2020. En polyculture élevage, on est passé de 1,6 à 1,2. La baisse a donc été plus marquée en grandes cultures, mais les systèmes en polyculture élevage sont, à la base, moins consommateurs que les grandes cultures. La baisse est aussi plus marquée sur les produits hors herbicides (-38 %) que sur les herbicides (-15 %). Il faut souligner que, sur ce chapitre, la baisse observée sur les fermes Déphy de Bourgogne-Franche-Comté est plus importante que sur la moyenne française. Fait marquant en système GCPE : les émissions de Gaz à effet de serre (GES) sont en baisse. Le premier poste d’émission provient des engrais et leur utilisation diminue de manière significative alors qu’en parallèle, la consommation de Gasoil non-routier (GNR) ne varie quasiment pas sur la période observée (2018-2020).

Le Certiphyto prolongé d’un an à titre transitoire 

Jusqu’au 31 décembre 2027, les agriculteurs et autres utilisateurs professionnels pourront obtenir un Certiphyto provisoire valable un an, à condition de s’engager auprès d’un conseiller agréé pour réaliser leur conseil stratégique dans l’année, selon un décret publié au journal officiel du 28 décembre 2023. À l’occasion du renouvellement de leur Certiphyto les agriculteurs ont l’obligation de réaliser un conseil stratégique en matière de protection des cultures. Mais comme le déploiement de l’offre de conseil est encore insuffisant, le gouvernement a décidé d’accorder un délai supplémentaire pour ceux qui n’auraient pas réussi à obtenir un rendez-vous de conseil stratégique. Ils bénéficieront d’un certificat provisoire d’un an au lieu de cinq ans. Avant la fin de validité de leur Certiphyto provisoire, ils devront fournir leur attestation de conseil stratégique pour pouvoir obtenir sa prolongation. À défaut, l’achat et l’utilisation de produits phytopharmaceutiques ne leur seront plus possibles. Les agriculteurs et les autres utilisateurs professionnels renouvelant leur Certiphyto en 2024 et en 2025 sont prioritaires pour solliciter le conseil stratégique et bénéficier du délai supplémentaire le cas échéant, précise le ministère de l’Agriculture.