Récolte des fourrages
Gare aux fermentations du foin

Les foins récoltés humides sont particulièrement sensibles à l’échauffement durant la phase de conservation… Risque d’incendie à la clé, c’est connu, mais aussi de diminution de leur valeur alimentaire.

Gare aux fermentations du foin
Les balles de foin récolté insuffisamment sec peuvent s’échauffer, sous l’influence de bactéries naturellement présentes dans l’environnement.

Une teneur en matière sèche insuffisante lors du pressage reste la principale cause d'échauffement des foins, mais d’autres facteurs entrent en jeu. Même sans aller jusqu’à l’incendie, cet échauffement est préjudiciable car il diminue la valeur du fourrage. Voici quelques éléments de repères pour comprendre les processus en jeu, déceler les situations à risque et adopter les bons réflexes en cas de doute.
Au champ, l’appréciation visuelle et le toucher du fourrage permettent d’estimer de manière plus ou moins précise sa teneur en MS mais requiert de l’expérience. Un fourrage prairial à 82-84 % MS se caractérise en premier lieu par des feuilles cassantes et des tiges sèches. Au toucher, aucune sensation d’humidité ne doit être ressentie, sur le dessus, à l’intérieur et au-dessous de l’andain en contact avec le sol. Sur les tiges, les nœuds ne doivent plus comporter de zones de couleur « vert chlorophylle », signe de la présence résiduelle d’eau. A ces endroits, les composés solubles (sucres notamment) s’y concentrent et retiennent l’eau par des forces hygroscopiques.


A l’œil et à la sonde


Outre cette estimation sensorielle, des sondes permettent de mesurer l’humidité des fourrages. Mais elles s’utilisent sur un fourrage compacté et impliquent qu’il soit déjà pressé pour disposer de l’information. Enfin, l’hétérogénéité du séchage dans la parcelle, en lien avec le type de sol et les zones de bordures ombragées, complexifie l’appréciation de la teneur en MS du fourrage en tout point de la parcelle. Et bien évidemment, les conditions météorologiques réelles ne sont pas toujours celles prévues lors de la fauche. L’ensemble de ces éléments peut alors conduire à réaliser le pressage d’un foin insuffisamment sec. Les cellules de la plante qui ne sont alors pas complètement déshydratées ont un métabolisme ralenti mais toujours actif. Par ailleurs, l’eau résiduelle favorise également l’activité métabolique des levures et des moisissures naturellement présentes sur le fourrage.
L’échauffement peut apparaître très rapidement après le pressage, en quelques heures. Dans cette situation, le phénomène est dû à l’activité des cellules de la plante encore vivantes.
Après quelques jours (3 à 10 jours), les cellules de la plante ne sont plus actives. Mais les micro-organismes (levures et moisissures), ont pu se développer et se multiplier : leur activité métabolique intense peut être à l’origine d’échauffement, qui peut durer de quelques jours à quelques dizaines de jours.


Anthony Uijttewaal - Arvalis - Institut du végétal

Des sucres dégradés, une valeur énergétique moindre

Un échauffement traduit une perte d’énergie sous forme de chaleur, c’est-à-dire que le fourrage perd de sa valeur énergétique. D’un autre côté, l’élévation de température au-delà de 40°C provoque la réaction de Maillard : les protéines se lient aux fibres et deviennent de moins en moins digestibles. Le préjudice sur les valeurs énergétique et protéique du foin dépend de la température maximale atteinte et, dans une moindre mesure, de la durée de l’échauffement.
Après échauffement, les résultats d’analyse de fourrage s’interprètent avec précaution. La baisse de digestibilité des protéines ne sera pas perçue par les analyses classiques. La protéine est bien présente dans le fourrage mais sa digestibilité est inférieure à celle indiquée sur le bulletin. Malgré une excellente appétence lorsque ces foins sont exempts de moisissures, il importe de tenir compte de la plus faible valeur énergétique et protéique des foins « caramélisés » dans le rationnement.