Concours de Charolles
L'annulation tombe mal…

Marc Labille
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La nouvelle est tombée au lendemain du discours présidentiel instaurant le reconfinement. À une semaine seulement de son ouverture, le concours de Charolles était annulé. Un coup dur pour la génétique charolaise et les éleveurs de Saône-et-Loire.

L'annulation tombe mal…
Le concours de Charolles aurait dû se tenir ce vendredi. Une annulation qui fait l’effet d’un grand vide dans les évènements de fin d’année.

Le concours de reproducteurs de Charolles n’aura pas lieu cette année. Le plus grand rassemblement génétique de la race aurait dû se tenir ce vendredi 6 et ce samedi 7 novembre, mais le reconfinement a contraint la société d’agriculture et d’élevage du Charollais à annuler sa manifestation. La décision est tombée au lendemain de l’annonce du reconfinement par le président de la République. Toute manifestation étant de fait interdite sur le site de la halle de Charolles. Les organisateurs ont bien tenté de proposer une alternative avec un rassemblement des animaux à l’extérieur des bâtiments du parc des expositions. Mais la réglementation s’y est opposée. 

Les membres de la société d’agriculture avaient pourtant tout fait pour maintenir leur concours d’automne. Ils avaient prévu de se conformer aux restrictions (buvette et restauration adaptées, sens de circulation, masques, gestes barrières…). La fréquentation aurait été limitée à mille personnes simultanées…

Prudents, les sociétaires avaient commandé des plaques de concours non millésimées. Elles pourront être utilisées lors de la prochaine édition du concours de Charolles (environ 400 plaques de fonderie à près de 6 € pièce). Exceptées ces plaques de concours, la société d’agriculture n’avait pas engagé trop de frais, si ce n’est le temps passé en travail de secrétariat, confie le président Gilles Degueurce. 

Impact économique

Si la situation n’est pas catastrophique pour la structure organisatrice, en revanche, elle est beaucoup plus douloureuse pour les éleveurs, regrette le président. En effet, chaque année, le concours de Charolles accueille une centaine d’élevages pour plus de 600 bovins reproducteurs. Parmi eux, pas loin de 500 veaux de l’année dont une majorité sont à vendre. Chaque année, le concours de Charolles est le théâtre d’une petite centaine de ventes (70 en 2019) et des contacts s’y prennent donnant lieu à des transactions après-coup. Autant dire que s’il joue bien son rôle de vitrine raciale et de ring pour la sélection des meilleurs, le concours de Charolles est aussi une place importante en termes de commerce. Un débouché de fin de saison qui va faire défaut aux éleveurs-sélectionneurs de charolais. Sachant que la saison a été lourdement impactée par le Covid-19. Sur les trois concours reconnus de Saône-et-Loire, seul Autun a pu se dérouler normalement fin septembre, Gueugnon ayant été annulé à la dernière minute. Idem pour le concours non reconnu d’Issy-l’Évêque qui devait clore la saison des petits concours le 31 octobre dernier. Au final, outre Autun, les concours d’Étang-sur-Arroux et de Saint-Pierre-de-Varennes ont été sauvés. Si la vente de Charolles a pu se tenir, la plupart des évènements nationaux et voisins ont été annulés : Roanne, Luzy, Moulin, Semur-en-Auxois…

Facebook, Charolais 71…

L’annulation de ces concours induit également une perte liée à la préparation des animaux, notamment pour ceux qui présentent des bovins adultes. Car ce sont des frais supplémentaires engagés tout au long de l’année sans certitude de le valoriser en termes de ventes de produits…

L’annulation des concours ne devrait toutefois pas empêcher ceux qui veulent acheter de le faire, estime Gilles Degueurce. Les élevages auront besoin de renouveler leurs taureaux pour la prochaine saison de reproduction et le commerce se fera probablement en ferme. De son côté, la société d’agriculture continue d’explorer toutes les alternatives pour palier son traditionnel concours. Elle pourrait proposer aux élevages qui s’étaient engagés pour l’édition 2020 une exposition de leurs animaux en ligne (photo + pédigrés) via Facebook et sur le site Charolais 71.

Covid-19, concurrence, sécheresse, mais pas que…

L’annulation des concours ne semble pas avoir profité aux évènements qui comptaient se maintenir. Ainsi, au moment de clore ses engagements pour son édition 2020, le concours de Charolles constatait une baisse de 150 animaux de moins par rapport à 2019. Les organisateurs pensaient que les éleveurs privés d’évènements allaient se reporter sur Charolles. Cela n’a pas été le cas. Un constat qui amène la société d’agriculture à s’interroger sur les raisons profondes de cette défection. Parmi les pistes évoquées, la concurrence du concours de Cercy-la-Tour dans la Nièvre qui, donnant lieu à une vente aux enchères au succès retentissant, tombe à la même date que le concours de Charolles. Mais cet aléa de calendrier n’est sans doute pas la seule explication. La sécheresse a probablement pesé aussi sur le nombre d’animaux engagés en concours. Le Covid-19 n’y est sans doute pas étranger non plus. Plus préoccupant encore, le président de la société d’agriculture pointe aussi une démotivation qui s’empare des éleveurs vis-à-vis des concours, de la génétique et même de l’élevage en général… 

Préserver l’essentiel du Festival…
Chaque année, le Festival du Bœuf est le lieu de la commercialisation de près de 600 bovins de boucherie haut de gamme.

Préserver l’essentiel du Festival…

À un mois du Festival du Bœuf, la société d’agriculture et d’élevage du Charollais est en plein questionnement sur la tenue de sa manifestation phare. Sans se bercer d’illusion quant à la suite de la crise du Covid-19, les organisateurs font tout pour préserver l’essentiel, à savoir la commercialisation des bovins de boucherie pour les fêtes de fin d’année. « Tous les abatteurs que j’ai contactés ont envie de fournir des animaux primés à leurs clients bouchers », confie Gilles Degueurce. La demande est donc bien là et l’annulation totale du concours risquerait de casser durablement ce débouché, estiment les opérateurs qui redoutent de perdre la fidélité de leurs clients. Cette demande incite la société d’agriculture à vouloir sauver l’essence même du Festival, ne serait-ce que pour sauver un peu de plus-value pour les éleveurs et engraisseurs. Les inscriptions en ligne ouvrent ce samedi et s’achèveront dimanche prochain. Exceptionnellement cette année, le concours de bovins de boucherie du Festival se tiendrait le vendredi 4 décembre avec entrée des animaux la veille. L’évènement se ferait à huis-clos et serait donc réservé aux éleveurs exposants et aux seuls acheteurs. Prudents, les organisateurs s’attendent malgré tout à devoir renoncer à organiser la manifestation sur le site de Charolles. Une prolongation du confinement au-delà du 1er décembre étant fortement probable. À ce stade, la société d’agriculture explore différentes pistes. Sous couvert d’obtenir les autorisations nécessaires et en fonction du nombre d’animaux engagés, un transfert du Festival sur le foirail de Saint-Christophe-en-Brionnais est envisagé. Dans la mesure où l’évènement s’inscrit dans la fourniture d’un produit alimentaire festif pour Noël, cela pourrait s’argumenter auprès des autorités, estime Gilles Degueurce. Organisée sur un site réservé aux professionnels et moyennant le strict respect des gestes barrières, cette version épurée du Festival du Bœuf permettrait de sauver la valorisation de plusieurs centaines de bêtes de boucherie d’exception. Un enjeu économique évident.