EXCLU WEB / La transition alimentaire à l’heure des défis sociétaux

Le think tank Planet Food Santé organisait fin avril un webinaire qui tentait de répondre à la question : « Quelles sont les innovations "réalistes" pour une transition alimentaire efficace ? »

EXCLU WEB / La transition alimentaire à l’heure des défis sociétaux

Parler alimentation, c’est aujourd’hui s’interroger autant sur les défis environnementaux que sur les défis sociétaux de l’agroalimentaire, l’objectif étant de faire converger les deux pour « une alimentation plus saine, qui préserve à la fois la santé et l’environnement », explique Catherine Jagu, dirigeante d’un cabinet de conseil en Responsabilité sociale et environnementale et développement durable. Elle dresse le constat que les deux activités, agricoles et agroalimentaires, ont des impacts négatifs sur l’homme et son environnement : empreinte carbone des élevages (« un kilo de viande produit 100 kg de carbone ») ; érosion de la biodiversité (« 24.000 espèces sur 28.000 menacées d’extinction ») ; problème d’accès au foncier ; pollution de l’air, des eaux et du sol, etc. Elle reconnaît cependant que l’agriculture constitue une réelle solution grâce à sa capacité de capter le carbone et grâce à l’essor des agricultures « alternatives » comme l’agriculture de conservation, régénératrice ou encore restauratrice.

Campagnes « insupportables » 

Reste qu’il est difficile de modifier les comportements alimentaires, concède Sandrine Doppler co-fondatrice de Planet Food Santé, et ce malgré les velléités de Valère Corréard, journaliste spécialisé dans la transition écologique, de vouloir convertir la majorité des Français au végétarisme ou au véganisme. Il se désole en effet qu’une majorité de Français soit attachée à la viande, même si sa consommation diminue, bon an mal an, d’environ 1 % par an. Il s’en prend d’ailleurs aux campagnes télévisées de l’Interprofession bétail et viande (Interbev) qui veut séduire les flexitariens. Des campagnes qu’il juge « insupportables » car selon lui, elles véhiculent un « faux message » sur le flexitarisme, jouant sur l’ambiguïté entre le moins et le mieux. « Le flexitarisme c’est manger moins de viande. Pas mieux. C’est quoi une bonne qualité de viande ? », a-t-il interrogé. De même réfute-t-il tout de go les apports nutritionnels de la viande, affichant ainsi clairement ses préférences végétaliennes. 

Gaspillage, éducation 

Plus mesurée, Nathalie Hutter-Lardeau, co-fondatrice de Planet Food Santé, rappelle qu’il faut une « alimentation équilibrée, avec de la viande ». « Pour être plus durable, Il faudrait commencer par lutter contre le gaspillage », soulignent Catherine Jagu et Olivier Paurd, président de Nbread-Process. Ce dernier estime à 600.000 tonnes, rien qu’en France, le nombre de fruits et légumes perdus chaque année chez les producteurs. « 30 % de la production alimentaire mondiale n’est pas valorisée », ajoute-t-il, estimant que la tendance est « à la végétalisation de l’alimentation ». Il y a toute une éducation à faire sur l’alimentation, au cuisiner soi-même, plaident-ils tous les deux. « En cuisinant nous-mêmes, nous n’avons pas le même rapport à l’alimentation », estime Catherine Jagu. Si Valère Corréard donne quitus à l’agriculture d’être aujourd’hui plus résiliente qu’elle ne l’était il y a quelques années, Olivier Paurd insiste aussi sur les efforts que les industries alimentaires doivent réaliser sur la chaine logistique pour réduire leur empreinte carbone. « Surtout, que les consommateurs deviennent acteurs de ce qu’ils mangent », conclut-il.