Tourisme départemental
Pas la catastrophe redoutée mais…

Françoise Thomas
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Alors que l’assemblée générale de l’agence Destination Saône-et-Loire était à l’origine prévue pour dresser le bilan de la saison 2019 et devait se tenir en mai, son report en septembre a bien évidemment plus été l’occasion de faire le point sur la saison qui vient de s’achever, grandement marquée par les périodes confinement et post-confinement. Et c’est tout un secteur qui oscille entre soulagement et inquiétude…

Pas la catastrophe redoutée mais…
De gauche à droite : Annie Gille, la directrice du Relai Gîtes de France de Saône-et-Loire, Philippe Marmin, le président de l’Hôtellerie de plein air en Saône-et-Loire, Yannick Rébet, le gestionnaire des Vélos de Cluny, Arnaud Durix, le président de l’ADT, Romain Sun, le directeur de l’hôtel Panorama 360 °, Élisabeth Roblot, la vice-présidente départementale en charge du tourisme et Jérôme Pouponnot, président du club hôtelier mâconnais.

À écouter les professionnels présents* lors du point presse organisé le 24 septembre à Mâcon à l’issue de l’AG de l’agence touristique Destination Saône-et-Loire, le bilan de la saison touristique est aussi mitigé que très hétérogène et les questionnements, pour ne pas dire les inquiétudes pour l’avenir proche, restent immenses.
Malgré tout, les acteurs touristiques finissent la saison plutôt satisfaits dans la mesure où ils ne savaient pas du tout à quoi s’attendre après trois mois de confinement. Certains annoncent, sur juillet-août, une belle hausse de fréquentation par rapport à l’été 2019, d’autres un taux de remplissage record… « L’effet 100 km s’est tout de suite fait ressentir, rapporte ainsi Yannick Rébet, le gestionnaire du point de location Les vélos de Cluny, et puisque la météo a été au rendez-vous, nous avons eu un niveau d’activités normal dès le mois de juillet ». Et même septembre est qualifié « de bon mois » par Arnaud Durix. Ainsi au niveau régional, « la Saône-et-Loire et le Jura ont été les deux départements qui ont le plus bénéficié de l’engouement des touristes français, avec notamment une durée de séjour qui a augmenté par rapport à 2019 », poursuit le président de l’ADT. Mais ces bons chiffrent ne parviennent malheureusement pas à masquer une autre réalité économique.

Bol d’air recherché

Depuis le 16 mars, les vagues d’annulations, de report et de réservation « ont fluctué au gré des annonces gouvernementales », ont rapporté ces professionnels « avec une très forte tendance à la réservation de toute dernière minute », précise Jérôme Pouponneau, le président du club hôtelier mâconnais. L’anticipation des séjours et toute la démarche marketing du secteur ont par ailleurs été compliqués par l’annulation de très nombreux rendez-vous et salons touristiques habituellement vecteurs de clientèle.
Ainsi une très grande disparité s’est faite ressentir entre les établissements, « pour lesquelles on n’a pour l’instant pas toujours d’explication », précise Philippe Marmin, le président de l’Hôtellerie de plein air en Saône-et-Loire. Même si celui-ci a noté que les hébergements de plein air, situé près des voies cyclables semblent s’en être mieux sortis. Preuve que les Français sont venus cet été « à la découverte des modes doux et ont recherché la tranquillité et une mise au vert ». « On a senti les visiteurs à la recherche d’un grand bol d’air, complète Yannick Rébet. Ils ont été "consommateurs" d’espaces et de paysages ».

Période creuse à venir

La difficulté pour des structures comme les campings était « de cumuler tout type de protocoles : hébergements, piscines, aires de jeux ». Les réservations de dernière minute ont rajouté des difficultés « de visibilité, et notamment pour constituer les équipes et organiser le travail ». Ainsi pour le représentant des campings du département, « la saison a été courte, éprouvante et stressante ».
Même constat du côté des hôteliers, dont le représentant Jérôme Pouponneau parle de la période « juillet août comme une assez bonne surprise, mais on ne peut malgré tout pas parler d’une bonne activité, car nous sommes loin des chiffres habituels ».
Pour ce professionnel hôtelier, c’est désormais l’avenir qui est à redouter : « d’octobre à janvier, ce sont habituellement nos mois creux et la saison estivale est là pour nous apporter la réserve nécessaire pour passer cette période. Cette année, nous n’attaquons donc pas l’hiver sereinement »…

Si Jérôme Pouponneau a remercié le Département et la Région pour leurs soutiens (voir encadré), « nécessaires et indispensables », il annonce malgré tout « que le pire est devant nous. Qui sera encore là au printemps prochain ? ».
Annie Gille, la directrice du Relai Gîtes de France de Saône-et-Loire, l’a précisé de son côté : « nous avons déjà ouvert les réservations pour 2021 et le calendrier est déjà quasiment plein… mais avec les reports de 2020. Cela ne nous fera donc pas de nouveaux apports de trésorerie ».
De nombreux acteurs du tourisme vont donc avoir à passer deux années, 2020 et 2021, sur le chiffre d’affaires tronqué de 2020. On comprend leur grande inquiétude.

 

* Annie Gille, la directrice du Relai Gîtes de France de Saône-et-Loire, Philippe Marmin, le président de l’Hôtellerie de plein air en Saône-et-Loire et propriétaire du camping 4* Le Village des Meuniers à Dompierre-les-Ormes, Jérôme Pouponnot, président du club hôtelier mâconnais, Romain Sun, le directeur de l’hôtel Panorama 360 ° à Mâcon, Yannick Rébet, le gestionnaire du point de location Les vélos de Cluny.

« Agir vite et le mieux possible »
La saison a été "sauvée", mais non sans effort du Département et des professionnels du secteur.

« Agir vite et le mieux possible »

Salué par les professionnels du tourisme présents pour avoir été l’un des premiers à réagir dès le printemps, le Département de Saône-et-Loire a en effet accompagné le secteur via deux leviers : des aides directes et une campagne de promotion.
Concernant les aides, Élisabeth Roblot, la vice-présidente en charge du tourisme, l’a rappelé : « le Conseil départemental est un peu sorti de ses prérogatives en proposant un plan de relance. Mais à situation d’urgence, solution d’urgence ».
Ainsi, les décisions « votées à l’unanimité » ont permis le déblocage de deux types d’aides. Tout d’abord, 5 millions d’euros « d’aides tour Eiffel », c’est-à-dire à destination des sites phare du département. Puis une seconde subvention de 8 millions d’euros pour « apporter une bouffée d’oxygène » à l’hôtellerie restauration, camping, gîtes, etc. Par ces accompagnements, le Département a souhaité « agir vite et le mieux possible ».
Se voulant rassurante, après l’appli Route71 et les bornes interactives lancées cette année, la vice-présidente a d’ores et déjà promis de nouvelles actions pour soutenir le secteur pour la prochaine saison.
Arnaud Durix a rappelé de son côté l’accompagnement promotionnel lancé dès le printemps. L’agence Destination Saône-et-Loire a ainsi rapidement pris le pari du tourisme estival de proximité : « nous avons donc beaucoup communiqué sur toute la région lyonnaise et dans les départements voisins de la Saône-et-Loire, rappelle le président de l’agence de développement touristique, nous avons aussi incité les habitants d’ici à la redécouverte de leur département ». La communication s’est aussi exportée dans le Grand Est, en Suisse et à Paris, avec la Saône-et-Loire « pour la première fois dans le métro ». Le budget communication total s’est chiffré à 1,1 million d’euros.
Si Arnaud Durix constate que la saison juillet août « a été sauvée », il reconnait que l’on « navigue avec beaucoup d’incertitudes pour la fin de l’année et l’année prochaine. La crise n’est pas terminée ». En attendant, en 2020, le Département n’a pas ménagé ses efforts, et cela a porté ses fruits.