Négociations commerciales
La Loi ÉGAlim pourrait être mieux appliquée

Cédric MICHELIN
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Une réunion entre membres du gouvernement et représentants de la profession agricole et agroalimentaire a permis, mi-octobre, de faire le point sur la loi du 30 octobre 2018 « pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous », dite loi ÉGAlim. De l’avis de tous, elle pourrait être mieux appliquée. 

Le constat semble partagé, à quelques nuances près, par l’ensemble des acteurs réunis autour de la table. Il est bien résumé par la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs (JA) : « Comme le montre le rapport d'évaluation sur l'application du volet SRP (seuil revente à perte)/Promotions commandé par Bercy : la loi EGAlim a permis de mettre un terme à la guerre des prix avec une inflation très limitée pour les consommateurs (moins de 1 %) », a-t-elle indiqué. « A l’aube des négociations commerciales 2021 qui débutent ce début novembre, l’Ania, La Coopération Agricole et l’Ilec alertent sur le risque d’une nouvelle année en déflation qui amplifierait la destruction de valeur que subit l’ensemble de la filière depuis huit ans, dans un contexte de crise déjà préjudiciable à l’activité économique », ont indiqué les trois organisations. Ces organisations remettent en cause l’application de la loi Egalim mais pas son bien-fondé.

Prix « marche en avant » 

Le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie, et la ministre déléguée chargée de l'Industrie, Agnès Pannier-Runacher qui ont réuni le 13 octobre le comité de suivi des relations commerciales (composé des représentants des producteurs agricoles, des industries agro-alimentaires et des distributeurs), sont arrivés aussi à la même conclusion : « Malgré la dynamique, les résultats ne sont pas encore au niveau des attentes en termes de répartition de la valeur. Il est aujourd’hui plus que jamais nécessaire de poursuivre la mise en place des décisions prises lors des Etats généraux de l’Alimentation -EGA- pour une plus juste rémunération des agriculteurs ». C’est ce qu’ont dénoncé à mots à peine couverts la FNSEA et les JA qui rappellent que l’une des finalités de cette loi d’octobre 2018 est de « construire un prix ‘‘en marche avant’’, basé sur des relations contractuelles équilibrées entre les maillons ».

Sanctions 

L’insatisfaction est identique du côté de l’ANIA, de la Coopération agricole et de l’Ilec. « La loi EGAlim va dans le bon sens, il faut toutefois s’attacher à la faire respecter et veiller à sanctionner les dérives éventuelles », ont indiqué l’Ania, la Coopération Agricole et l’Ilec. Elles rappellent que « les deux premières années de l’application de la loi ÉGAlim n’ont pas vu disparaître la déflation dans les négociations commerciales annuelles entre les fournisseurs et les quatre principales centrales d’achats des distributeurs : -0,4 % en 2019 et -0,1 % en 2020. A cette destruction de valeur, s’ajoute désormais un retour de la guerre des prix dans les linéaires :  -0,5 % de juin 2019 à juin 2020 et jusqu’à -1,3 % pour les grandes marques alimentaires ». Pourtant « des sanctions, notamment administratives, ont été prises en 2019 et 2020 », ont rappelé le ministre de l'Agriculture et sa collègue chargée de l’Industrie. Bercy a notamment infligé fin août à Eurelec, centrale d'achats des distributeurs français E. Leclerc et allemand Rewe basée en Belgique, 6,34 millions d'euros d'amendes pour des pratiques commerciales jugées illégales. 

Souveraineté alimentaire 

Les parlementaires ont prolongé, sur proposition du député Jean-Baptiste Moreau, l'expérimentation sur l'encadrement des promotions et le seuil de revente à perte des produits alimentaires (SRP) jusqu'au 15 avril 2023. En effet, des amendements ont été portés dans le cadre de la loi Accélération et simplification de l’action publique (ASAP) pour prolonger l'expérimentation SRP/Promo.  « Il est primordial que la Commission mixte paritaire ne revienne pas sur la durée affichée dans le texte qui court jusqu'avril 2023. Nous devons prendre un engagement dans la durée sur ce dispositif pour pouvoir l'évaluer pleinement » ont indiqué la FNSEA et JA. Pour eux, « la souveraineté alimentaire, ambition affichée par le Président de la République, ne pourra être atteinte sans un revenu décent pour les agriculteurs », ont-ils conclu.