Protéines végétales
Aligner les planètes pour l’alimentation animale

Le Groupe opérationnel Proteins (GO Proteins) de Bourgogne Franche-Comté veut faire connaître les travaux menés dans le but de favoriser les innovations et pistes de valorisation des protéines végétales. Il a organisé un webinaire sur ce qui peut permettre d’améliorer l’adéquation entre offre et demande en protéines végétales, pour l’alimentation animale.

 

Aligner les planètes pour l’alimentation animale
Autre projet en cours, Profilait vise à faciliter l’émergence d’une filière protéique de proximité en grande région (Bourgogne Franche-Comté et régions avoisinantes du grand Est, en y associant également la Savoie et Haute-Savoie) pour dessiner les partenariats possible entre acteurs des filières végétales et des filières laitières.

Près de 60 participants des filières amont et aval étaient réunis pour le webinaire intitulé : « Quelles opportunités pour une meilleure adéquation offre et demande en protéines végétales pour l’alimentation animale ? ». Animé par Didier Ramet, président du Comité d’orientation régional Élevage de la Chambre régionale d’agriculture (CRA) de Bourgogne Franche-Comté (BFC) et président de la Chambre d’agriculture de la Nièvre, ses objectifs étaient d’établir un état des lieux de l’offre et de la demande en protéines végétales en BFC. Ceci dans le but de discuter des opportunités et pistes pour une meilleure adéquation entre cette offre et cette demande et de partager les connaissances disponibles à partir des résultats et expériences des partenaires et acteurs.

Réunir plusieurs critères

Pour poser le décor, l’enquête, réalisée par Hélène Gauchez (CRA BFC) en collaboration avec Nicolas Aury (Draaf BFC) sur les besoins des fabricants régionaux d’aliment pour bétail, était utile. Actuellement, l’offre fait encore largement appel aux importations. Mais l’évolution des cahiers des charges (non-OGM, signes de qualité officiels Siqo, etc.) entraîne une mutation de ces besoins. Il existe une possibilité de demande accrue pour l’offre nationale et régionale en matière première. À condition que plusieurs critères soient réunis, comme le précisait Émile Nicot, dirigeant de l’entreprise Philicot, basée en Saône-et-Loire, et président de l’association Nutri-Acces, qui fédère 37 entreprises du secteur : « notre industrie a besoin de matières premières disponibles régulièrement, en grands volumes, et sur un marché existant. Pas de souci pour les tourteaux de soja, colza et tournesol, mais c’est beaucoup plus compliqué pour la féverole ou le lupin. Il n’y a pas suffisamment de stabilité dans la fourniture de ces produits ». Aujourd’hui, confirme l’enquête, il est difficile pour les fabricants, de s’approvisionner en soja non-OGM français ou régional. Idem pour la féverole, les graines de lin ou de soja, dans un contexte où la quantité de matière première réclamée par les fabricants régionaux d’aliments a augmenté de 130.000 T depuis 2011. En 2020, ces fabricants ont utilisé près de 670.000 T de matière première. Pour donner une idée du potentiel de notre région, Hélène Gauchez propose un exemple : si toutes les graines de soja produites aujourd’hui en BFC étaient transformées, on pourrait obtenir un peu plus de 61.000 tonnes de tourteau, à mettre en regard des 100.000 t (dont 35.000 T importées) utilisées en 2020 par les fabricants de BFC. La production régionale s’approche des besoins du marché intérieur, mais si on devait substituer les 35.000 T importées, il faudrait augmenter les surfaces cultivées en soja de 50 % en région BFC.

Un déficit chronique

En écho, l’analyse de Laurent Barralis (Draaf BFC) vient confirmer une certaine montée en puissance du soja régional : depuis 2006, pois protéagineux et soja ont vu leurs surfaces cultivées multipliées par sept et atteindre 35.000 ha. Le développement du soja est lié à l’apparition de débouchés dans l’alimentation animale. Pour autant, comme l’explique Émile Nicot, les fabricants d’aliments en BFC utilisent seulement 2 % de graines d’oléoprotéagineuses dans leurs compositions. La marge de progression est donc considérable, à condition que les critères cités plus haut soient réunis. « La présence, ajoute-t-il, d’un outil de transformation régional (Extrusel à Chalon-sur-Saône) est une chose très importante pour la structuration de toute une filière ». Un important projet de développement est à l’étude. À cela s’ajoute un point important souligné par Maëlle Simmen (Terres Univia) : « l’Europe et la France utilisent beaucoup plus les protéagineux dans le cadre de l’alimentation animale qu’ailleurs dans le monde ». Or, l’UE est déficitaire entre production et consommation de Matières riches en protéines (MRP). Ce déficit atteignait 66 % en 2018-2019. En France, il est un peu plus réduit, mais atteint tout de même 46 %. Le soja représente 45 % des MRP consommées en France, mais seulement 5 % de celles produites. En face, selon Laurent Barralis, le colza, qui a représenté jusqu’en 2018 200.000 ha cultivés en BFC, en pèse moins de 100.000 aujourd’hui « en raison de problèmes de manque d’eau au moment de l’implantation de la plante, et aussi à cause des ravageurs ». Le tournesol reprend de la vigueur avec 55.000 ha en BFC et il ne faut pas négliger les prairies, également riches en protéines : elles représentent plus de 50 % de la SAU en BFC. Le problème est que la région est confrontée à des rendements irréguliers, en baisse sur le tournesol, le pois et la luzerne.

Et la future Pac ?

Au-delà de tous ces aspects, le webinaire de Go Proteins mettait en avant un dernier point susceptible de favoriser le développement de la production régionale de protéines végétales : la future Pac. Sylvain Marmier, président du Comité d’orientation régional Économie de CRA BFC, et producteur de lait à Comté dans le Doubs, reste prudent en indiquant que bien des points la concernant font encore l’objet de discussions. Néanmoins, il attire l’attention sur plusieurs facteurs prometteurs : les aides couplées protéines, par exemple. « On ne peut être que favorable, explique-t-il, à l’augmentation de la dotation prévue dans la Pac pour les aides "protéines végétales", à condition, toutefois, que cela ne se fasse pas au détriment des aides couplées animales. Les aides liées aux éco-régimes pourraient aussi avoir un impact sur la production de protéines végétales par les nouvelles rotations et pratiques culturales qu’elles sous-entendent ». En prolongement, il faudra sans doute obtenir une nouvelle MAE pour soutenir les agriculteurs en zones intermédiaires sur la thématique de l’allongement des rotations. « L’idée, conclut Sylvain Marmier, c’est d’essayer de construire une relation entre les protéines produites et les éleveurs qui peuvent les utiliser ».

Berty Robert

GO Proteins fédère la CRA BFC, l’Inrae, AgroSup Dijon, Terres Inovia, l’Institut de l’élevage, le GIEE Espoir viande Puisaye, l’Eplefpa Dijon-Quetigny-Plombières-lès-Dijon.

Les replay des webinaires évoqués dans cet article sont disponibles sur la page internet GO Proteins.

Renseignements : Hélène Gauchez : helene.gauchez@bfc.chambagri.fr et allez sur bourgognefranchecomte.chambres-agriculture.fr