Le gouvernement a présenté fin février, la version définitive du « Plan national d’actions Loup » qui couvre la période 2024-2029. Les nouvelles règles ne satisfont pas les organisations professionnelles agricoles.
Au mois de septembre dernier, les principales organisations professionnelles agricoles (*) avaient demandé que la copie du futur Plan national d’actions Loup (PNA) soit « retravaillée de fond en comble ». Malgré de nombreuses réunions de travail réalisées depuis cinq mois, ces dernières restent sur leur faim. « On est très déçus », a réagi Bernard Mogenet, le responsable loup de la FNSEA. « Malgré toutes les mobilisations et les propositions qu’on a faites, on ne nous a pas écoutés. Le développement de la population lupine l’emporte sur la production agricole ». En cause : la réforme du protocole de tirs pour défendre les troupeaux.
Si le nouvel arrêté publié au Journal officiel du 23 février donne la possibilité aux agriculteurs de se doter de matériel de vision nocturne (jumelles thermiques par exemple), seuls les louvetiers pourront être équipés de matériel de visée (et non de vision) nocturne. Il s’agit concrètement d’une lunette thermique caractérisée par la possibilité, pour le tireur, de la fixer au canon de son fusil et de ne pas avoir à la tenir directement dans ses mains. Pour eux, l’éclairage de la cible n’est plus obligatoire. Il serait d’ailleurs inopérant d’un point de vue pratique puisqu’ils n’en ont plus besoin avec les lunettes thermiques.
Malgré quelques assouplissements dans le protocole, la régulation préventive des loups pour éviter les attaques des troupeaux n’est pas explicitement prévue. Et ce pour « répondre de manière graduée au risque de prédation », explique-t-on au ministère de la Transition écologique (MTE). Pour tirer un loup, une attaque devra au préalable avoir visé un troupeau et l’agriculteur devra en outre éclairer sa cible avant de tirer. « Pour respecter les règles de sécurité », ajoute-t-on au MTE.
207 prélèvements
Le nouveau PNA prévoit un traitement des autorisations de tirs plus rapides pour les éleveurs en cas de première attaque. « Dans un délai maximum de 48 heures », estime-t-on au sein du ministère de l’Agriculture. « Ces autorisations sont toujours données sous condition de respect du plafond de prélèvement, pour une durée de cinq ans », précise un proche du ministre Christophe Béchu. Malgré les demandes incessantes des OPA pour élever le niveau de prélèvements annuels, celui-ci reste à 19 % de la population lupine. Ainsi, en 2023, pas moins de 207 loups ont été prélevés pour un plafond de 209. « Au début de l’année 2024, déjà 8 individus ont été tués », a précisé un conseiller du ministre de l’Agriculture Marc Fesneau. « Mais le nombre d’animaux prédatés par le loup et autres espèces (lynx et ours) ne cesse cependant d’augmenter chaque année », dit-on à la FNSEA. Pour le seul loup, les attaques de bétails sont passées de 11 080 en 2017 à 12 500 en 2023.
« Pertes indirectes non révisées »
Dans le cadre de ce PNA, un deuxième arrêté fixe les nouveaux barèmes d’indemnisation en cas de dommages causés par l’ensemble des grands prédateurs. En cas de pertes « directes », c’est-à-dire si un animal du troupeau est tué, les indemnisations sont revalorisées avec une augmentation de 33 % pour les ovins et de 25 % pour les caprins. « On a tenu compte de l’évolution des cours et des prix de marchés », justifie-t-on dans les deux ministères. Mais au sein des OPA, on regrette que les engagements qui avaient été pris sur les pertes indirectes n’aient pas été tenus. Le nouveau PNA prévoit également une enveloppe spécifique « protection », dotée d’un budget de 2,5 millions d’euros pour la période 2024-2029. Cette somme sera notamment consacrée à développer de nouveaux moyens de protection, comme l’utilisation de drones ou de l’effarouchement avec ses phéromones. Le MTE a aussi confirmé que le reclassement du loup d’espèce « strictement protégée » à « protégée » nécessiterait encore un peu de temps. Un Conseil de l’Union européenne réunissant les ministres de l’environnement des 27 aura lieu fin mars prochain. Il devrait se prononcer (à la majorité qualifiée) sur l’opportunité d’un reclassement et décider, le cas échéant, de réunir le Comité permanent de la Convention de Berne. La France comptait 1 104 loups en 2023 sur le territoire national, contre 430 en 2018. Le seuil de viabilité démographique du loup, fixé à 500 individus, est largement atteint.
(*) FNSEA, JA, Chambres d’agriculture, FNO (ovins), FNB (bovins), FNPL (lait), FNC (cheval), FNEC (chèvres)