Vinosphère
Changer sa manière de commercialiser son vin

Régis Gaillard
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L’édition 2021 de Vinosphère a été l’occasion de se pencher sur la problématique de la vente du vin sur Internet tout en s'interrogeant sur l’évolution du tourisme.

Changer sa manière de commercialiser son vin

Attendre le client, bien installé dans son caveau, est désormais une technique de vente sinon à oublier du moins à considérer comme témoin d’un autre temps, d’autant plus avec l’actuelle crise qui, encore un peu plus qu’avant, tend à éloigner les gens les uns des autres. Et comme de nombreux rendez-vous vineux sont annulés depuis plus d’un an, autant aller chercher le client où il est : à savoir chez lui. Cela passe par Internet.

Trois choix pour vendre en ligne

Selon que l’on soit féru d’informatique ou allergique à un écran, plusieurs options s’offrent au moment de commercialiser son vin comme l’a confirmé Marion Barral du cabinet AOC Conseils, spécialisé dans la filière viticole. La première option consiste à tout faire soi-même. On peut alors faire appel à une agence, à un free-lance voire, pour les plus téméraires, créer son site soi-même. La deuxième option permet de gérer personnellement seulement une partie de la commercialisation. Il s’agit, dans ce cas, d’utiliser des applications mobiles ayant une certaine notoriété. Elles sont une vitrine pour les produits (marketplace = place de marché). Le professionnel peut fixer ses prix de revente. Quant aux relations financières avec lesdites marketplace, cela peut prendre la forme d’un abonnement ou d’un pourcentage des ventes. Troisième option pour celui qui maîtrise mal l’outil informatique ou qui n’a pas envie de s’embêter : tout déléguer. « On travaille avec un opérateur comme cela se fait avec un grossiste ». Dans ce cas, le professionnel ne vend pas directement au client final. Il faut aussi savoir que la marge est moindre, mais qu’en général il y a beaucoup plus de volume de vin écoulé. Au final, le choix de l’option retenue dépendra des objectifs commerciaux, des prix de vente, de la disponibilité pour animer les ventes et de son appétence pour le digital.

Se réinventer

L’un des points noirs du Covid-19 prends la forme de l’absence quasi-totale de tourisme et met à mal l’œnotourisme. Alexia Mercorelli, responsable de l’agence de Chambéry de Protourisme et spécialisée dans l’œnotourisme, a ainsi effectué un point sur l’impact de la crise mondiale sur le tourisme. Alors que ce secteur a bénéficié d’une croissance exponentielle depuis les années 1990 et comptait il y a encore peu 1,5 milliards de touristes internationaux – soit un total multiplié par 45 en 65 ans –, force est de constater son effondrement depuis un an. Ainsi, il y a eu 72 % d’arrivées internationales en moins dans le monde. Un retour à la normale est espéré, au mieux, pour 2023.

Pour ce qui est des Français, il y a eu une évolution considérable de leurs comportements face à la crise. Avec, à la clé, un choix de proximité, des réservations de dernière minute, de plus longs séjours et des locations de grande capacité, plus de clientèle à la journée et en week-end et une recherche de grands espaces. En outre, il y a un renforcement des attentes de la clientèle. Cela prend la forme de tourisme expérientiel, interactif et créatif, de stimulation des cinq sens, de slow tourisme (calme) et de recherche de destinations authentiques tout en restant connecté. Dès lors, la filière œnotouristique va devoir s’adapter. Cela peut se traduire par des visites de cave en réalité virtuelle, un hébergement immersif, des dégustations de vin dans un foudre, de parcours de visite interactif, d’escape game et murder party, de spéléœnologie, de yoga, de viti-sophrologie, de balades bien-être, de biathlon laser, de promenades en trottinette électrique dans les vignes ou encore de création d’un espace muséographique scénarisé !

Des finances mises à mal

Vice-président de la Commission marchés et développement au sein du BIVB, Manoël Bouchet a profité de la matinée pour rappeler combien la pandémie avait eu un impact sur les finances des entreprises de la filière. « L’an passé, nous étions anxieux et angoissés, car nous ne savions pas ce qui allait se passer ». Une anxiété et une angoisse qui n’ont pas disparu au vu des incertitudes actuelles. Manoël Bouchet a toutefois salué « le gouvernement qui s’est fortement mobilisé ». Avec, comme action majeure, la mise en place d’un « plan de relance qui va passer par de l’endettement pour investir ». Ce qui entraînera une lecture des bilans des entreprises forcément biaisée. « Ce grand plan de relance va avoir des effets positifs ». Même si le PGE (Prêt garanti par l’État) est une contrainte supplémentaire. Et Manoël Bouchet de saluer le rôle joué par la BPI (Banque publique d’investissement). Avec, au final, des outils financiers qu’il faudra gérer au cas par cas.

Être davantage créatif

Pour sa part, Arnaud Daphy, de l’agence de communication SoWine, souligne le paradoxe observé ces derniers mois. « Certes, la crise a éloigné physiquement, mais elle a créé de nouvelles formes de proximité. Il a fallu trouver de nouvelles formes de communication, offrir d’autres expériences, notamment via les visioconférences. Il a également été possible de créer des temps de rencontre de qualité ». Cela a aussi eu comme avantage de faire naître de nouveaux formats. Ainsi, le fait de montrer certains lieux de manière virtuelle a donné encore plus envie de les découvrir en réel. « Cela crée de la désirabilité. Plus on le voit en virtuel et plus on a envie de le voir en réel ». Cela aura en outre permis, dans certains cas, de rentrer dans les coulisses et la crise a imposé d’être plus créatif dans sa communication. « Cela a fait naître des nouvelles façons de penser, de mettre en place une vraie créativité en termes de business ».