Le contexte sanitaire n’en finit plus d’obliger les professionnels à se réinventer. Parmi les évolutions du moment, de nouvelles façons de garder le lien avec ses clients. Après la mise en place des drive et autres « click&collect », l’organisation de dégustation en ligne peut être une option à envisager. Mais même sans faire un tournage "hollywoodien", l’exercice demande malgré tout un minimum de préparation…
Presque à mi-chemin entre l’apéro-zoom et la dégustation au caveau, la dégustation à distance est, pour les viticulteurs, une façon originale de mettre leurs vins en vedette. Si rien ne remplacera le présentiel, une dégustation « en visio » permet malgré tout de garder ce lien si précieux avec les clients grâce à un moment de partage et de convivialité. Cependant, pour que cet échange soit agréable pour tout le monde, hôte comme convives, l’exercice doit être bien préparé.
Cadrer le tout
Il ne faut pas perdre de vue que la technique doit se faire oublier au profit des seules vedettes du moment : les vins.
Ainsi, un cadrage parfaitement choisi, une mise en scène pensée dans les moindres détails (avec notamment les bouteilles présentées dans le champ de la caméra), et surtout un son de qualité, une lumière juste dosée (ni pas assez, ni surtout trop pour favoriser l’impression de cocooning), etc., garantiront une production tout à fait correcte.
Pour vérifier cela, rien de tels que des essais (même rapides, mais indispensables), une petite vidéo test pour se rendre compte par soi-même du rendu.
Anticiper
Pour pouvoir organiser cette dégustation avec vos clients particuliers, ceux-ci devront avoir les vins chez eux bien évidemment ! D’où la nécessité d’avoir pu leur faire parvenir en amont les cuvées qui seront goûtées. L’option d’envoi d’échantillons reste l’une des plus simples, elle nécessite simplement d’avoir pu mettre les vins choisis en bouteilles de 2 cl (via bien souvent un prestataire extérieur). Quelques jours suffisent, mais s’ajoutent à cela les délais d’envoi.
Il sera plus simple, vu ce format à distance, de définir en amont une thématique vraiment spécifique pour avoir un nombre de vins limité.
Votre présentation devra être parfaitement préparée avec tous les éléments techniques prêts le jour-J (comme les tarifs notamment).
Savourer
Le déroulé de la dégustation doit être très clair. Si des temps d’échange et une place réservées aux impressions et aux questions sont bien évidemment indispensables, l’enchainement de la présentation des différents vins doit être prédéfini. Pour les personnes les moins à l’aise, prévoir un tabouret haut leur permettra de rester en place tout en ayant une posture dynamique, le stress pouvant conduire à bouger sans arrêt d’un pied sur l’autre, pas très agréable pour les personnes de l’autre côté de l’écran…
Tous les éléments (verres, vins, fiches techniques, tarif et frais d’envoi, etc.) seront à disposition. Et pour faire oublier le distanciel, rien de tel que des anecdotes savoureuses, des petits secrets sur les coulisses de la vinification, à révéler tout au long de la e-dégustation…
Certains viticulteurs ou cavistes, qui ont déjà procédé à l’exercice, souhaitent que leurs clients goûtent les vins en amont, pour pouvoir véritablement consacré le temps imparti aux questions, aux impressions et à l’échange.
Du côté des caves de Saône-et-Loire : « On va mettre les gens dehors ! »
À l’issue de la période de fermeture imposée du printemps 2020, les caveaux ont depuis pu rester ouverts et maintenir les dégustations en présentiel, pour les clients locaux et les visiteurs de passage, moyennant la mise en place de mesures sanitaires drastiques. Donc pour l’heure, a priori aucune annonce de la part des caves de la région d’organisation de dégustation à distance.
Cependant, la situation oblige malgré tout à inventer de nouvelles formes de communication et de marketing.
Ainsi les vignerons de la cave de Buxy ont imaginé, lors du premier confinement, de présenter leurs vins par vidéos interposées. Une idée partie de l’initiative personnelle de l’un d’eux et à laquelle se sont prêtés ceux qui le souhaitaient... Au cours de ces pastilles courtes (environ une minute), « un coopérateur a choisi un vin, le détaille, le déguste et le commente pour nous », détaille Caroline Torland, la responsable communication de la cave. Entre description et conseil d’accompagnement, « les viticulteurs ont réalisé en tout plus d’une dizaine de vidéos ». Ils se sont mis en scène chez eux, dans les vignes, dans le chai… et le résultat est volontiers chaleureux et peut encore se regarder !
Autre exemple illustrant le fait que la situation pousse les caves « à sortir de la zone de confort, à innover, à proposer de nouvelles choses », comme le relate Marjorie Brayer de la cave de Lugny : les stratagèmes à déployer en vue des prochaines journées portes ouvertes. Du côté de Lugny, c’est tranché : « nous allons mettre les gens dehors ! », annonce la responsable marketing. Et en effet, pour les prochaines journées portes ouvertes prévues en mai, la visite ne sera pas, comme traditionnellement, celle du chai mais plutôt celle des vignes. « Cela va finalement nous permettre de mettre pour une fois notre terroir en avant ! », un terroir que les clients particuliers ont, il est vrai, peu l’habitude de découvrir et de parcourir.
Comme quoi, cette crise sanitaire atypique peut aussi générer d’agréables conséquences.
