Changement climatique
Le sorgho, la petite graine qui monte

Sophie Chatenet
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Le sorgho, africain à l’origine, a conquis tous les continents au fil des siècles pour devenir la cinquième céréale la plus consommée au monde. En France comme en Europe, sa résistance au réchauffement climatique en fait un allié de choix en fourrage comme en grain.

Le sorgho, la petite graine qui monte
Le sorgho est une plante herbacée annuelle de la famille des poaceae (graminées). Le sorgho est la cinquième céréale mondiale, après le maïs, le riz, le blé et l'orge. © Semae-Paul Dutronc

Grâce à ses vertus, le sorgho a le vent en poupe et de plus en plus d’agriculteurs le cultivent. Face au réchauffement climatique, cette céréale appelée également gros mil, blé égyptien ou millet, a plusieurs longueurs d’avance. « D’abord, grâce à son système racinaire très dense et très profond (jusqu’à 2 mètres), il est en mesure d’extraire et d’utiliser avec plus d’efficience l’eau et tolère bien la sécheresse. Ensuite, ses longues racines lui permettent également de puiser les nutriments du sol dont il a besoin, réduisant ainsi l’utilisation d’engrais. De plus, sa faible exposition aux maladies et aux prédateurs limite également le recours aux phytosanitaires. Enfin, grâce à la concurrence exercée par son fort pouvoir couvrant, il a l’avantage de protéger le sol et d’étouffer les adventices, un effet bénéfique pour la culture suivante », explique Régis Boisseau, délégué régional Semae (interprofession des semences et plants) du Sud-Ouest.

De l’Afrique à l’Europe

60 millions de tonnes de sorgho ont été produites en 2022 dans le monde, on le retrouve principalement sur le continent africain, ainsi qu’aux USA, en Argentine, en Australie. Les climats européens se sont également très bien adaptés à la culture du sorgho notamment en Italie, en Ukraine, en Hongrie ou encore en Roumanie. Néanmoins, c’est la France qui se place en tête des pays européens producteurs avec ses 90 000 hectares cultivés. Dans l’hexagone, le Sud-Ouest reste le bassin historique de la production de sorgho. Mais, grâce à la sélection variétale opérée par les entreprises semencières, de nouveaux bassins sont apparus dans le Centre et la zone cultivable s’étend vers le Nord. Le sorgho sert majoritairement à nourrir les animaux d’élevage.

Rusticité

Il existe le sorgho grain blanc destiné à l’oisellerie et le roux utilisé en alimentation animale comme une céréale classique. « Ce dernier présente une composition chimique assez similaire à celle du maïs, avec toutefois un taux de protéines légèrement supérieur », souligne la Fédération nationale des producteurs de semences de maïs et de sorgho (FNPSMS). Il peut ainsi entrer dans la composition des concentrés énergétiques, en complément des fourrages et des sources azotées. « Contrairement au blé, il doit être broyé finement pour être bien digéré ». Plus rustique au niveau climatique, le sorgho fourrager est adapté à toutes les régions françaises. « Dans cette catégorie, on distingue le mono-coupe et le multi-coupe. Le premier s’assimile à un maïs ensilage, il se récolte avec une ensileuse classique et mesure généralement 3 à 4 m de haut. Le sorgho fourrager multi-coupe correspond plutôt à une herbe améliorée, entre 1 et 2 m de haut. Il peut être coupé 3 à 4 fois par an, en revenant toutes les 4 à 6 semaines suivant les conditions météo. Il peut être exploité sous différentes formes : pâturage, distribution en vert, conservation par voie humide et par voie sèche ».

La France, premier producteur européen de semences de sorgho

Parallèlement à l’augmentation des surfaces cultivées, la production de semences de sorgho s’est développée très vite en France à partir des années quatre-vingt, afin d’assurer l’approvisionnement du marché avec des variétés adaptées aux conditions climatiques. La filière s’est progressivement structurée pour garantir technicité et qualité. Résultat : depuis plusieurs années, la France avec 138 producteurs, est le premier producteur européen de semences de sorgho, devant la Hongrie et l’Espagne. En France, les surfaces de multiplication de semences de sorgho ont fortement progressé, passant de 283 hectares en 2016 à 945 hectares en 2021 pour s’établir à 555 hectares en 2022. La production de semences est ainsi passée de 7,3 quintaux en 2016 à 12,8 quintaux en 2020. Aujourd’hui, l’un des enjeux principaux de la filière semence est de répondre aux besoins du marché français et de développer les marchés extérieurs. On observe en 2022 une progression des quantités de semences exportées passant de 1.765 tonnes (t) en 2020-2021 à 1.777 t en 2021-2022, mais l’importation reste majoritaire avec 8.815 t de semences importées en 2021-2022 (contre 9.482 en 2020-2021).

Maïs versus sorgho

Selon Serge Zaka, agro-climatologue chez ITK : « Le sorgho est moins sensible à la sécheresse : c’est un fait scientifique. Pour un même sol en forte sécheresse, le sorgho produit trois fois plus que le maïs. Mais le maïs produit largement plus de matière sèche que le sorgho quand il n’y a pas de stress hydrique ».