Filière équine
Les enseignements à tirer de la crise

Françoise Thomas
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Mi mars, du jour au lendemain, les chevaux ont été mis au repos forcé, et les cavaliers et propriétaires ont été priés de ne plus se rendre dans les écuries. La mise en place du confinement a eu des conséquences immédiates sur de nombreux secteurs, et lorsque cela impacte du vivant les conséquences sont autant à court terme qu’à plus long terme. La filière équine a mené une étude pour en savoir un peu plus, en enquêtant auprès de 49 exploitants du Réseau équin national.

Les enseignements à tirer de la crise

Le secteur équestre regroupe aussi bien les centres équestres que les pensions et les élevages de chevaux. Pour tous ces types d’établissements, la mise en place du confinement mi mars, et donc l’arrêt brutal de l’accueil du public, a eu des répercussions immédiates sur leur gestion.
Cet impact a bien évidemment été financier : la perte de chiffre d’affaires a pu atteindre jusqu’à 80 % en avril par rapport à la même période de 2019. En effet, plus de cours et aucun stage n’a pu être programmé pendant les vacances. Le peu de recul actuel témoigne de situations très variées, mais aussi de conséquences irréversibles pour les structures les plus fragiles avant crise.
Devant ces situations financières critiques, 80 % des exploitants ont sollicité les aides auxquelles ils pouvaient prétendre : aide du fond de solidarité, chômage partiel, report de prêts, aides régionales, etc. Si ces deux dernières mesures n’ont pas toujours été acceptées, les deux premières ont en revanche majoritairement été accordées.

Situations disparates

Pour diminuer les charges financières, les leviers ont principalement résidé dans la diminution de la charge salariale, dans la mise à l’herbe des chevaux, dans les économies de maréchalerie.

Pour ce qui était des charges de travail, tout dépendait du type d’équidés (d’élevage, de loisir, de compétition) et de la nécessité ou pas de maintenir leur condition physique.
Au niveau des activités, à côté de l’arrêt total des cours et des sorties équestres, les débourrages, les saillies et les ventes ont fortement diminué… Seules les pensions se sont très majoritairement maintenues. Donc au final des situations très diverses selon les activités habituelles des structures et leur mode de fonctionnement.

Et maintenant…

Pendant le confinement, les réseaux sociaux ont été l’un des moyens privilégiés pour maintenir le lien avec les clients et les propriétaires de chevaux. Si les « groupes » n’étaient pas en place auparavant, de nombreux ont été créés à l’occasion. La communication et le développement de ses outils restent d’ailleurs l’un des enseignements positifs tirés de cette période. L’optimisation de la gestion des chevaux fait également partie des grandes leçons pour de nombreux dirigeants de structures : l’atout de l’herbe pour le bien-être des animaux, pour la réduction des coûts alimentaires et la diminution du temps de travail. Autres conclusions : la nécessité de réfléchir à une diversification raisonnée des activités pour assurer au maximum la pérennité de la structure et la pertinence de pouvoir échanger entre professionnels, tant pour le partage d’expérience que pour des achats groupés.
Ainsi si l’inquiétude est grande dans le secteur équin, de nombreux enseignements sont d’ores et déjà ressortis de cet épisode.

Quelques effets positifs

Quelques effets positifs

Cette pause imposée aura aussi eu du bon pour certains dirigeants de structures équestres. C’est ce que révèle l’étude lorsqu’elle mentionne que pour un quart d’entre eux cela leur a dégagé du temps pour s’occuper de leurs chevaux, pour réaliser des travaux auparavant sans cesse reportés, et pour réfléchir au fonctionnement de leur établissement. Ainsi, certains ont exprimé un « mieux-être », « une prise de conscience positive ». La notion de surcharge de travail était d’ailleurs ressortie plusieurs fois à l’occasion d’études précédentes.

Une présentation reportée
Les dirigeants de l’élevage des Gueulatis, Yannick Hyvernat et Amélie Chauvot, leurs deux fils, leur poulinière AQPS et sa pouliche de 1 an, au physique et au tempérament prometteurs…

Une présentation reportée

Pour les éleveurs équins de Saône-et-Loire, le confinement a eu un impact à plusieurs niveaux.
Tout d’abord, « en tant que naisseurs-éleveurs, nous touchons une part des gains de nos produits sur toute leur carrière », explique Yannick Hyvernat, de l’élevage d’AQPS des Gueulatis à Hurigny. Et l’arrêt complet de toutes les courses pendant deux mois a donc représenté un manque à gagner immédiat…
« Nous avons actuellement quatre chevaux qui tournent en compétition », précise Yannick Hyvernat. Lorsque s’aligne sur la ligne de départ un cheval comme Baron Gueulatis, les résultats sont probants. Sur 2020, cet hongre AQPS de 9 ans a déjà participé à sept courses, en haie ou en steeple, lors desquelles il a été placé cinq fois et a même signé une victoire...
« Depuis le 11 mai, les courses ont repris, mais elles se déroulent à huis clos », rappelle le gérant de l’élevage.
« Les allocations des courses sont fixées en amont, explique-t-on du côté de France Galop, la part revenant à l’éleveur est donc indépendante du montant des paris ». Cependant, ces mêmes paris constituent les ressources des futures allocations…
Pour ces deux mois sans course, « le manque à gagner sera de l’ordre de 80 millions d’euros », apprend-t-on encore du côté de France Galop. Ainsi depuis le 11 mai, les courses ont repris « mais les allocations ont été revues à la baisse, l’effort est commun a tout le secteur ».

Au-delà de l’absence de courses, « le seul accroc pour nous en tant qu’éleveur, souligne Yannick Hyvernat, aura été le report d’une vente à laquelle nous voulions présenter l’un de nos produits ». Ce cheval de deux ans est destiné aux courses d’obstacles. Cette vente, initialement prévue en juin, est reportée au 26 août « mais notre cheval ne sera finalement pas prêt ». Sa présentation à une vente sera donc très certainement reportée d’un an…