Euroforest
La forêt à l’heure du changement climatique

Christophe Soulard
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La huitième édition du Salon international Euroforest se tiendra les 22, 23 et 24 juin prochains à Saint-Bonnet-de-Joux (Saône-et-Loire). Cette manifestation sera notamment placée sous le signe du changement climatique et de l’innovation. 

La forêt à l’heure du changement climatique

Comme les agriculteurs, les gestionnaires de forêts, qu’ils soient privés ou publics, doivent faire face à un amoncellement de clichés, de lieux communs et de stéréotypes. Chez les premiers, ce sont les pesticides ou l’eau (parmi tant d’autres). Chez les seconds, ce sont les coupes-claires, cette technique pratiquée pour laisser passer la lumière, qui consiste à abattre un grand nombre d’arbres. Le commun des mortels ne « comprend pas qu’elles sont utiles au milieu et participent à gérer les forêts de manière durable », explique Jean-François Dhôte, directeur de recherche l’Inrae d’Orléans, spécialiste des forêts. Car la forêt « a besoin de la main de l’homme » pour assurer sa pérennité, certifie Jean-Philippe Bazot, président d’Euroforest.

À l’identique des transitions engagées par l’agriculture, la sylviculture n’échappe pas au triptyque atténuation, adaptation et prévention. Sur l’atténuation, la filière forêt-bois représente un puits de carbone estimé à environ 130 millions de tonnes d’eqCO2 par an, soit près d’un quart des émissions de gaz à effet de serre (GES) annuelles en France. Mais cette part pourrait diminuer si les gestionnaires n’interviennent pas pour lutter contre les crises sanitaires (scolytes), les feux de forêts et pour reboiser, s’inquiète le chercheur de l’Inrae. D’où l’intérêt de planter plus d’arbres car « la productivité est un des critères de performance de la filière pour réduire le CO2 et les GES », insiste-t-il.

Concurrence étrangère

Il est donc nécessaire d’aider la forêt française à s’adapter. Si cette dernière a connu, au cours des derniers millénaires, des périodes de réchauffement et de glaciation, c’était à vitesse lente. Aujourd’hui, le cycle est « dix fois plus rapide » et pour préserver la ressource, il est nécessaire d’aider certaines essences « à migrer des zones méridionales vers d’autres lieux plus septentrionaux », explique Jean-François Dhôte.

Ce qui nécessite également d’accentuer la recherche sur la ressource génétique pour créer des nouvelles essences plus résistantes au stress hydrique, aux sécheresses, aux attaques parasitaires, etc. La résilience des massifs forestiers passera par la gestion des risques sanitaires et l’adaptation, en aval, de l’outil industriel. « Il faut lui donner les moyens d’absorber les flux de matières premières quand des crises surviennent », ont plaidé les organisateurs du salon. Aujourd’hui, les scieries françaises sont fragilisées, leur nombre est en déclin. Elles souffrent de la concurrence étrangère et ont du mal à s’approvisionner malgré cette ressource forestière toute proche. L’adaptation au changement climatique n’a de sens qu’avec une « adaptation des entreprises, de manière cohérente et un accompagnement de leurs efforts d’investissement », plaide la sénatrice Anne-Catherine Loisier (UDI-Côte d’Or). Pour Lionel Say, directeur de la coopérative CBFL, « les forestiers doivent produire du bois pour la Nation, comme l’agriculture nourrit le pays et le monde ». La forêt doit aussi « lutter contre le changement climatique et préserver la biodiversité », ajoute-t-il. Euroforest qui est à la forêt ce que le Salon de l’Agriculture est à l’agriculture abordera aussi le thème des métiers.

Les ONG écologistes présentes

De l’aveu même de Lionel Say, le conseil d’administration (CA) d’Euroforest s’est creusé la tête pour savoir s’il fallait ou non répondre favorablement à l’inscription d’ONG écologistes à Euroforest, en particulier France nature environnement (FNE) et Canopée, « une association lanceuse d’alerte qui dénonce les menaces pesant sur les forêts ». Le CA s’est réuni trois fois et a validé les inscriptions. Un débat aura lieu avec ces ONG le 24 juin matin. « Nous prenons ce risque et nous l’assumons », a affirmé Jean-Philippe Bazot qui concède que les ONG n’ont pas toujours des procédés loyaux. Pour les dirigeants d’Euroforest, il faut que les forestiers se réapproprient le thème de la forêt et « pas uniquement dans notre sphère », a expliqué Lionel Say. En revanche, il n’existe pas de monopole de la bonne gestion de la forêt a conclu Antoine d’Amécourt, président de Francesylva, la fédération des syndicats de forestiers privés de France. Sauront-ils l’admettre ou du moins l’entendre ? Et sans manifester, légalement ou non ?

Un Fonds pour l’arbre

Un Fonds pour l’arbre

Créé en 2020, sur l’exemple de la Fondation Yves Rocher, le Fonds pour l’arbre, qui regroupe aujourd’hui plus d’une dizaine de mécènes, lance un appel à projets pour les années 2023/2024. Doté d’un budget de près de 720.000 euros, le Fonds va soutenir des actions visant à l’implantation durable de la haie dans l’espace rural, en s’appuyant sur l’expertise de l’Afac-agroforesterie. Les aides distribuées sont réservées aux opérateurs bénéficiant d’une expérience dans l’implantation de haies champêtres, ancrés dans leur territoire et déjà financés en partie. Ce peut être des organismes environnementaux, des Chambres d’agriculture, des fédérations de chasse, des parcs naturels ou des lycées agricoles. On en dénombre une centaine sur le territoire. (https://fondspourlarbre.fr/)