Biocontrôles
Le biocontrôle gagne des parts de marché

Cédric MICHELIN
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La branche française de l’International Biocontrol Manufacturers Association (IBMA) a présenté, fin juin, les chiffres du biocontrôle pour l’année 2021. 

Le biocontrôle gagne des parts de marché
La faune auxiliaire vient compléter les biocontrôles

Céline Barthet, présidente d’IBMA-France a le sourire aux lèvres. Réélue en mars dernier pour un mandat de trois ans, elle se réjouit surtout des bons scores du biocontrôle en France. En effet, ce secteur a atteint, en 2021, 13 % du marché de la protection des plantes contre 12 % en 2020. Le chiffre d’affaires global du biocontrôle en France a augmenté, dans le même temps, de 16 %, atteignant 274 millions d’euros (M€). Les substances naturelles représentent 72 % des ventes, loin devant les médiateurs chimiques (12 %). Les macro-organismes (9 %) et les micro-organismes (7 %) ferment la marchent. Ce sont d’ailleurs les substances naturelles qui semblent tirer le marché vers le haut, avec une progression des ventes de +26 % par rapport à 2020 et de +40 % par rapport à 2019. Les ventes de produits à base de macro-organismes ont peu progressé en 2021 (+2 %) en comparaison de l’année précédente (+10 %). En revanche, après avoir stagné en 2020, les ventes de micro-organismes et de médiateurs chimiques accusent un recul significatif : -3,9 % pour les premiers et -5,9 % pour les seconds.

Le biocontrôle gagne aussi du terrain dans trois domaines. Tout d’abord les ventes d’insecticides augmentent de +1 % « Près de deux insecticides sur cinq (en valeur) sont des ventes de biocontrôle », se réjouit Céline Barthet. Côtés molluscicides, la hausse est plus marquée, passant de 26 % à 29 % de parts de marché. Elle l’est plus encore pour les fongicides qui gagnent 6,5 points de parts de marché : 19,5 % en 2021 contre 13 % en 2020.

Agriculteurs conventionnels

Ces bons chiffres sont confirmés par une étude d’AgroParisTech pour le compte d’IBMA-France, enquête réalisée au cours du dernier trimestre 2021. Pas moins de 350 agriculteurs ont répondu. Plus de 50 % des agriculteurs utilisant des solutions de biocontrôle estiment qu’ils en utiliseront encore plus dans les années à venir. Au passage, Céline Barthet en profite pour tordre le cou à quelques mauvaises perceptions : Le biocontrôle n’est pas réservé qu’aux agriculteurs biologiques. D’ailleurs, d’après l’étude d’AgroParisTech, les agriculteurs conventionnels sont plus nombreux (59 %) à utiliser le biocontrôle que leurs collègues bio (50 %). Cette manière de protéger les plantes est cependant plus développée dans les cultures spécialisées que dans les grandes cultures, si l’on en croit les résultats de ce sondage. Elle est très présente en maraîchage (84 %) en arboriculture (65 %) et en viticulture (57 %) loin devant les grandes cultures (34 %) et la polyculture élevage (22 %). « Mais en France, nous sommes moteurs sur le biocontrôle en grandes cultures » précise Denis Longevialle, directeur d’IBMA-France. L’enquête indique aussi que parmi ceux qui n’utilisent pas encore ces substances aujourd’hui, près de trois sur quatre pensent en acquérir certainement dans le futur (24 %) ou au moins en étudier l’option (49 %). Les agriculteurs sondés ont également exprimé leurs besoins en formation. La bonne tenue du secteur du biocontrôle fait dire à Céline Barthet : « ces bons chiffres sont encourageants pour nous permettre d’atteindre notre objectif de couvrir 30 % du marché des produits phytopharmaceutiques en 2030 ».

Directive SUD : « une bonne surprise »

Chez IBMA-France, on se réjouit de la proposition de la Commission européenne de réviser la directive sur l’utilisation durable des pesticides dite directive SUD (Sustainable Use of Pesticide Directive). « C’est une bonne surprise » a commenté Céline Barthet à propos de la définition proposée sur le biocontrôle. « Nous retrouvons les grandes lignes de la définition française inscrite dans le code rural (article 253-6 N.D.L.R.) et bien sûr les quatre grandes familles que sont les substances naturelles, les médiateurs chimiques, les macro-organismes et les micro-organismes ».

Directive SUD : l’inquiétude des arboriculteurs et autres

Le 23 juin, le Collectif Sauvons les Fruits et Légumes de France (SF & LF) s’inquiète de la disparition possible de « milliers d’hectares directement menacés » par le projet de la Commission européenne. En effet, celle-ci envisage de réécrire le règlement sur « l’usage durable des pesticides » (directive SUD). « Réduire drastiquement l’usage des pesticides en France : tel était l’un des objectifs issus du Grenelle de l’Environnement, en 2008 et traduit dans le plan Ecophyto en 2010. La conséquence aujourd’hui, c’est que nous importons 60 % des fruits et 40 % des légumes que nous mangeons, alors que nous produisions en 2000, 70 % de ce que nous consommions », constate le collectif. Il s’inquiète aussi que le projet de la Commission puisse interdire « des traitements phytosanitaires au sein des zones Natura 2000, à part quelques exceptions extrêmement encadrées ». « Faudra-t-il totalement raser près de 5.400 ha de vergers demain ?  », s’interroge SF & LF. Taxant de « mortifère » le projet de règlement européen, le collectif appelle le ministre de l’Agriculture et les députés européens à se mobiliser largement pour l’amender.