EXCLU WEB / Les industries alimentaires s’inquiètent pour l’avenir

Lors de sa conférence de presse de rentrée, le 28 septembre à Paris, le président de l’Association nationale des industries alimentaires (ANIA), Jean-Philippe André, s’est alarmé du « tsunami de coûts » dans son secteur. Il estime que l’année 2023 sera compliquée. 

« Si les entreprises ont été résilientes en 2021, résistantes en 2022, comment seront-elles en 2023 ? », s’est interrogé Jean-Philippe André qui pointe les « 12 mois de crises sans précédent » que son secteur vient de traverser : reprise post-Covid, guerre en Ukraine, négociations commerciales, aléas climatiques impactant les approvisionnements et naturellement le retour de l’inflation. « Le choc de l’inflation n’est plus à démontrer », explique-t-il, rappelant la hausse du prix de matières agricoles (+17 % pour l’huile de tournesol jusqu’à +106 % pour les œufs) auxquelles s’ajoutent celle des matières premiers industrielles (+15 % pour le verre jusqu’à +46 % pour l’aluminium) et du transport. Au final, l’inflation alimentaire en France atteint 8,4 % mais reste moins importante que la moyenne européenne, 14,4 %. « Qui fait tampon ? » s’interroge-t-il faussement. « Surtout combien de temps cette situation va-t-elle durer ? ». Car cette flambée des coûts, notamment ceux de l’énergie, rogne considérablement les marges financières des entreprises. « Je connais une société qui fabrique de la charcuterie où le coût de l'énergie est passé de 2,5 millions d’euros (M€) en 2021, à 6 M€ cette année et qui prévoit une facture de 14 M€ l'an prochain ». Ce qui correspond pour cette entreprise en particulier à trois fois son résultat opérationnel. « Un arrêt ou un ralentissement de la consommation d’énergie de l’industrie conduirait inévitablement à un gaspillage alimentaire important et à un affaiblissement de la souveraineté alimentaire française et européenne », selon l’Ania.

« Produire : un combat »

L’une des solutions pourrait être de répercuter ces prix en bout de chaîne mais cela devient compliqué, notamment en raison des négociations commerciales qui si elles sont parvenues à ancrer le prix des matières premières agricoles (MPA) ne tiennent pas compte des matières premières industrielles (MPI). « Le compte n’y est pas », se contient le président de l’ANIA. Il estime que pour s’en sortir financièrement, la hausse des MPI doit atteindre +7 %. « Mais l’atterrissage se fait à 3,5 %. On perd donc 3,5 % », s’agace-t-il, fustigeant aussi les pénalités logistiques. Il réclame ouvertement que le gouvernement mette un « holà à cette situation. Il n’y a qu’en France qu’on voit ça ». Jean-Philippe André n’est guère confiant pour 2023. « Nous n’avons pas terminé les négociations de 2022 liées à la crise en Ukraine qu’il faut commencer celles de 2023. Ca relève du sacerdoce », s’exclame-t-il ajoutant : « J'ai l'impression d'être le hamster dans sa roue, on pédale, on pédale ». La priorité n’est pas pour les industries alimentaires d’augmenter leurs marges mais « simplement de les défendre. Nous avons des objectifs limités en ce moment » explique-t-il. Autrement dit, les efforts que les industriels ont pu faire ces dix dernières années pour réduire de 10 % leur empreinte carbone, va passer au second plan, faute d’avoir les fonds nécessaires pour investir. L’ANIA pense aussi à ce que ses adhérents puissent faire tourner leurs usines car il y a entre 30 000 et 40 000 emplois non pourvus dans le secteur…Ce qui fait dire à son président : « Produire devient presque un combat ».