Confédération des appellations et vignerons de Bourgogne
Vers des ZNT durcies ?

Cédric MICHELIN
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Mardi 2 novembre à Davayé et le lendemain à Mercurey (article dans notre prochaine édition), la Confédération des appellations et vignerons de Bourgogne (CAVB), avec les Organismes de défense et de gestion (ODG) respectivement des appellations du Mâconnais et de la Côte chalonnaise, faisaient un point sur plusieurs sujets techniques.

Vers des ZNT durcies ?

Évidemment, impossible de faire l’impasse sur les conséquences du gel d’avril. À la sortie des vendanges, l’Interprofession des vins de Bourgogne (BIVB) tablait sur une demi-récolte pour le millésime 2021. Les déclarations de récolte en cours devraient permettre d’affiner le total final, comme le soulignait Armelle Gautheron pour les Douanes régionales, qui expliquait la procédure en ligne. De la CAVB, Véronique Lacharme précisait simplement que bien qu’il n’y ait pas de changement majeur du côté des déclarations de récolte, qui se font « d’abord » sur le portail des Douanes, avant Demat’vin, il est conseillé de faire un « dépôt temporaire » dans un premier temps pour se laisser du temps de « repérer d’éventuelles anomalies ».
Pour revenir au gel, Jérôme Chevalier, président adjoint de la CAVB, saluait les aides apportées par le Conseil départemental. En Saône-et-Loire en effet, le Département a bien compris « la gravité de la situation » et mis en place des aides à la plantation/replantation, des avances de trésorerie… des dispositifs ouverts depuis ce 1er novembre.

De nouveaux « anciens » cépages ?

Bien que reconnaissants, les vignerons dans la salle engageaient rapidement les débats sur les questions d’assurances. Les assureurs semblent durcir les contrats et les nouveaux entrants se retirent déjà, les calamités « brouillent les frontières entre assurés et non assurés », la réforme des assurances en Europe est « annoncée mais pas encore traduite en fait »… sachant que seul un tiers des vignerons sont assurés en Bourgogne contre les aléas climatiques qui surviennent maintenant « deux années sur trois ». À l’image de ses confrères vignerons, Richard Martin de Davayé préférerait voir « mes vignes faire de belles récoltes plutôt que de demander à l’État de compenser les assurances ». La CAVB assurait justement travailler sur des pistes pour faire évoluer techniquement les cahiers des charges des appellations. La directrice technique de la CAVB, Charlotte Huber est d’ailleurs à « l’écoute de ce que vous avez envie de voir inscrit dans vos cahiers des charges ». En attendant ces remontées, de premières réflexions tournent autour des densités de plantation, de la gestion de l’eau, de la viti-foresterie, des cépages – « sans forcément changer nos cépages avec des cépages non issus de Bourgogne mais en choisissant d’anciens cépages bourguignons, pour les introduire comme cépages accessoires ». Ce qui est encore différent des cépages résistants aux principales maladies puisque l’Europe ne les a pas encore autorisés pour les AOC.

ZNT : protection élargie à venir

Ce qui faisait réagir Jean Manciat, de Charnay-lès-Mâcon, en parlant des Zones de non-traitement (ZNT) riverains : « j’ai vu ces cépages résistants en essais à la Sicarex et c’est la seule solution pour éloigner les traitements à défaut d’autres solutions ».
Car depuis la remise en cause des Chartes départementales ZNT par le Conseil d’État, la profession viticole est à nouveau dans le flou pour 2022. « Le Gouvernement annonce déjà des distances minimums d’épandage de 10 m pour les CMR et surtout des mesures de protection pour les personnes travaillant à proximité ou encore des moyens d’informer à proximité des zones de traitement », annonçait Marion Saüquere, directrice de la CAVB qui a écrit aux ministères pour avoir les détails. Dans la salle, les vignerons s’inquiétaient déjà des contraintes et conséquences (impasses techniques…) que cela pourrait impliquer. « On sollicite la FNSEA et les chambres d’Agriculture pour monter au créneau contre », rappelait la CAVB qui déplore en plus de ne plus voir évoqué « de notion de matériel de protection » qui est pourtant clé. C’est d’autant plus rageant de « repartir ainsi à zéro alors que depuis deux ans, et malgré une grosse pression mildiou/gel, les vignerons avaient bien communiqué et fait de gros efforts », regrettait Jérôme Chevalier qui plaide toujours pour que les AMM fassent foi. Avec le BIVB, la CAVB va lancer un observatoire des pratiques dans le vignoble pour que les vignerons envoient « de façon anonyme et confidentielle » leur calendrier de traitements afin « d’avoir des arguments à opposer face à une réglementation trop forte ».

Flavescence et Esca font des dégâts


Parlant justement de réglementation et de traitements obligatoires, un point a été fait aussi sur la flavescence dorée « malheureusement encore en progression », alors que toutes les analyses ne sont pas finies. L’an prochain, une expérimentation à Fuissé va prendre place pour qu’après la prospection obligatoire soient réalisés des « arrachages précoces ». Plusieurs vignerons faisaient remarquer que l’Esca a « explosé » cette année et qu’il serait bien de « trouver un système pour collecter les informations » sur toutes les jaunisses afin d’éviter plusieurs passages. La CAVB va organiser « fin mars » des réunions spécifiques sur le dépérissement de la vigne, notamment dû au porte-greffe 161-49C, qui commence à être mieux compris grâce aux recherches du Plan national dépérissement.

Vins Mâcon : réflexion sur les 5.000 pieds/ha

À l’occasion de ces réunions, les ODG prenaient tour à tour la parole pour faire un rapide point sur un ou deux dossiers. Déléguée de l’Union des producteurs de vins Mâcon (UPVM), Caroline Guyotat attaquait sur le « différend » qui oppose l’UPVM à l’INAO au sujet de la « mention vin de Bourgogne ». L’UPVM, soutenu par le BIVB, redemande à l’INAO de pouvoir l’apposer « car tous les vins Mâcon sont produits en Bourgogne ». Le recours devant le tribunal administratif, s’il était ainsi reconnu, pourrait « faire bouger les lignes », y compris pour l’ODG Bouzeron ou Saint-Bris, avant que le dossier ne passe néanmoins dans les règlements européens. En attendant, un travail sur certaines « incohérences » de délimitations sur certains secteurs est en cours. Un travail similaire est en cours en appellations Bourgogne et Crémant. Un « espoir » d'aboutir est possible pour la récolte 2022 après le passage des experts INAO. En AOC Mâcon, les demandes de plantations nouvelles sont en hausse, l’équivalent de 80 ha pour un contingent de 30 ha possible.
L’UPVM annonçait également « réfléchir à abaisser les densités à 5.000 pieds/ha et à l’utilisation de copeaux de bois en mâcon rouge ». « Ce seraient des possibilités et pas des obligations », insistait bien Jérôme Chevalier, président de l’UPVM, après quelques débats avec la salle sur les avantages et inconvénients des 5.000 pieds/ha face au changement climatique. « On réfléchit aussi à déplafonner nos rendements butoirs et mettre plus en VCI ». L’idée serait d’augmenter la réserve. Sur dix ans, le rendement moyen est de 52 hl/ha, loin du rendement de base donc, et « en 2020, cela a fait mal au cœur de jeter du vin de qualité », alors que le millésime 2021 va cruellement manquer. Une « assurance » qui ne coûterait rien aux finances publiques et qui pourrait également « arrêter les dents de scie des cours du vrac » avec les négociants, plaidait-il, pensant également indirectement aux fermages.

 

Cru Saint-Véran : fête pour les 50 ans + 1

Pour le cru Saint-Véran, Vincent Nectoux indiquait que « l’avancement du dossier 1er cru se fait doucement mais sûrement » puisque l’INAO a validé la « méthode de travail » en mettant en place un outil informatique pour « compiler la notoriété de chaque lieu-dit ». Une base qui permettra par la suite à l’INAO d’étudier les Climats potentiellement recevables dans le cadre du futur classement, envisagé « dans 3-5 ans », espère-t-il. Privé d’anniversaire en 2021, les cinquante ans de l’appellation devraient être célébrés finalement en février ou mars 2022 du côté du village de Saint-Véran. En attendant, des vidéos sont déjà disponibles sur YouTube avec le parrain de cet anniversaire, l’humoriste Sellig

Fête des Grands vins de Bourgogne : « besoin de 2-3 bouteilles »

Après l’annulation en 2020, la Fête des Grands vins de Bourgogne revient presque normalement les 19 et 20 novembre prochains. Une 148e édition qui ne se tiendra que le vendredi et samedi, et non plus le dimanche. « On réduit au maximum les coûts », indiquait Marion Saüquere qui en profitait pour « faire appel à votre générosité pour des dons de bouteilles. On sait que c’est compliqué pour vous cette année mais il s’agit d’un événement, datant du XIXe siècle, unique en France par son côté collectif. C’est important pour la Bourgogne de maintenir cette fête car on voit déjà de nombreuses inscriptions pour. Si tous les vignerons donnent un peu, on arrivera à la maintenir, sinon je ne donne pas cher de son avenir. Pour l’heure, on est encore loin du compte… ».
Par ailleurs, la CAVB va moderniser son site web, « alléger » ses vinonews mais aussi sortir un magazine trimestriel « en cours d’impression ». Premier numéro à paraître donc en novembre, avec des sujets techniques, sur la promotion des ODG ou encore sur des sujets « plus légers ».