Bourgogne du Sud
La coopération comme moteur

Françoise Thomas
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Après 20 ans de présidence de coopératives, Didier Laurency a laissé son poste à Lionel Borey (comme nous l’évoquions dans l’édition du 22 janvier). Retour sur toutes ses années de coopérateur avec celui qui est par ailleurs éleveur de volailles de Bresse et céréalier.

 

La coopération comme moteur
Après 20 ans de présidence de coopératives, Didier Laurency a raccroché le tablier... tout en prenant par ailleurs de nouvelles responsabilités.

Ce n’est pas un hasard si le départ de la présidence de Bourgogne du Sud de Didier Laurency intervient quelques mois seulement après le changement de directeur général de la coopérative : « c’est tellement important pour la dynamique que le binôme président-directeur se forge en même temps. Ce binôme doit être actif et réactif tout de suite. Cela n’aurait donc pas eu de sens que je reste ». Ainsi, celui qui aurait pu officier encore deux ans supplémentaires laisse le flambeau au céréalier de Crissey Lionel Borey, alors que Christophe Marcoux a succédé en juillet dernier à Michel Duvernois.

C’est l’occasion de revenir sur ce duo qui aura officié ensemble dès les débuts de Bourgogne du Sud. « Celle-ci est née en 2006 de la fusion de deux coopératives CAVS et Beaune-Verdun-Seurre. Avec Michel Duvernois, nous ne nous connaissions pas mais cela a tout de suite bien fonctionné car nous avions la même perception des choses », se rappelle-t-il.

À cette époque, Didier Laurency était déjà le président de CAVS depuis six ans, poste auquel il avait été nommé un an seulement après avoir intégré la coopérative comme administrateur. Un enchainement de rencontres et d’opportunités pour celui qui s’était installé avec son frère en 1992 en polyculture élevage (voir encadré).

En réflexion permanente

Didier Laurency a toujours estimé que pour la fonction de président « il faut garder à l’esprit d’aller chercher tous les éléments du débat, d’avoir beaucoup de recul, un maximum d’informations et surtout les bonnes informations », détaille-t-il. Et, après cette étape primordiale de « l’écoute », « savoir prendre les décisions et que celles –ci soient reprises par tous ».

Cette casquette de président le conduisait à « une réflexion permanente », aidé en cela par Martine, son épouse, « qui m’a soutenu durant toutes ces années » ...

« En tant que président, nous sommes tout le temps sollicités, et c’est à nous de prendre le pouls, de lever les doutes, d’aider les gens à dire les choses ».

Et même s’il se dit désormais allégé de cette charge-là, il avoue que c’est un rôle qui l’a passionné.

Auprès de « ce directeur emblématique » qu’a été Michel Duvernois, Didier Laurency se dit fier aujourd’hui de plusieurs grandes étapes franchies par la coopérative. « Nous avons réussi à créer une assise stratégique pour l’élevage. Il reste encore beaucoup à faire, mais nous avons pu mettre en place un ensemble de services pour les éleveurs ».

En parallèle, un important accompagnement a été fait à destination des céréaliers avec la mise en place d’outils comme Extrusel : « le plan protéine est un serpent de mer depuis de nombreuses années, mais là c’est du concret » et cela a permis « d’identifier le soja comme un lien fort entre l’élevage et les céréales ». Les deux hommes ont aussi pu lancé Selvah, même si Didier Laurency reconnaît que « la structure n’est pas encore stable », elle répond « en plein aux attentes en matière de développement durable et de productions locales ». Il n’oublie pas la filière viticole pour le travail accompli avec les représentants qui fait qu’aujourd’hui 70 % des viticulteurs de la région sont adhérents à la coopérative, « nous espérons avoir répondu à leurs attentes ».

Toujours tisser du lien

L’un des autres éléments qu’il tient à souligner c’est la « stratégie de mise en silo sur la voie d’eau, cela participant à une gestion saine et sereine » de toute la filière céréale. Le marché local reste la priorité mais cette solution logistique a permis à la coopérative de garantir un débouché aux surplus : « ces silos portuaires sont une réussite stratégique », insiste-t-il.

En parallèle, s’il devait y avoir des regrets, ce serait de « ne pas avoir été encore assez acteur dans les démarches d’agricultures locales, alors qu’il y a une vraie attente de la part de la collectivité ». Mais c’est là que Didier Laurency espère bien ne pas avoir dit son dernier mot... Désormais maire de Saint-Usuge et membre de la communauté de communes Bresse louhannaise Intercom, il espère bien pouvoir développer des notions qui lui tiennent à cœur comme une meilleure interaction et une parfaite intégration du monde agricole avec la vie communautaire. Et ne surtout pas oublier les coopérateurs dans ces réflexions-là…

Mise en application
DidierLaurency et son neveu Anthony Marmeys qui a intégré le Gaec en 2014. La relève est assurée.

Mise en application

Didier Laurency s’est installé en 1992 avec son frère Christophe de huit ans son cadet. Tous deux ont repris en polyculture élevage les bâtiments de leurs grands-parents. Si Christophe avait suivi un cursus agricole, Didier avait lui plutôt un bagage en économie. S’il se rappelle à l’époque avoir eu « plusieurs propositions de postes sympas », il ne regrette pas d’avoir fait le choix finalement de l’agriculture. Ainsi celui qui se définit comme « un terrien rural » avait suivi une formation adulte l’année précédant son installation.

Le Gaec LDC a démarré plutôt progressivement : « nous avions une petite surface de 50 ha. Pour viabiliser la structure, nous avions fait le choix d’avoir peu de matériel et d’intégrer deux Cuma ». Assez rapidement cependant, ils ont développé un atelier volailles de Bresse en créant leur propre système d’abattage. Une production sur laquelle ils ont augmenté au fil du temps pour arriver au plus fort de leur production jusqu’à 25.000 volailles de Bresse toutes vendues à un volailler. « Nous avons réduit progressivement le nombre en développant la vente directe », ils en écoulent désormais environ 20.000 par an tout en vente directe. C’est notamment l’arrivée en 2014 de leur neveu Anthony Marmeys qui a permis de bien structurer cette partie vente directe.

Damien Serrier, hors cadre familial, est arrivé à son tour en 2019, ce qui fut le point de départ de la conversion en bio du Gaec. « Nous en sommes à la deuxième année, la moitié de la production est en bio ». Sur une base d’un tiers de l’assolement consacré au maïs, un tiers au blé et à l’orge, un tiers aux oléagineux, cette conversion se traduit forcément par un allongement de la rotation, une diversification des productions, « nous sommes passés de six – sept productions à une douzaine, dont le trèfle semence », détaille Didier Laurency.

Le Gaec LDC ce sont aujourd’hui 280 ha dont une trentaine consacrée aux volailles. À noter également l’arrivée d’un atelier poules pondeuses…

Ainsi, il a toujours appliqué sur sa propre structure ce que Bourgogne du Sud recommande à ses coopérateurs : l’autonomie alimentaire, la diversification des productions, l’orientation vers des labels qualité, la transmissibilité des exploitations.