Les brèves du 7 mars 2023

Mis en ligne par Cédric Michelin
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Voici les brèves du 7 mars 2023.

Les brèves du 7 mars 2023

Prix alimentaires : Bercy annonce un « trimestre anti-inflation » dans la grande distribution

Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a annoncé le 6 mars avoir trouvé un accord avec les distributeurs sur la mise en place d’un « trimestre anti-inflation » : ce dispositif garantira « les prix les plus bas possible sur un certain nombre de produits du quotidien » librement choisis par chaque enseigne. L’effort en faveur du pouvoir d’achat des ménages portera sur les marges des distributeurs, insiste Bruno Le Maire, qui ajoute que des contrôles de la DGCCRF (Fraudes) seront réalisés pour s’en assurer. Cela représentera « plusieurs centaines de millions d’euros » de baisse, assure-t-il. Les produits concernés devraient être « majoritairement les marques de distributeur », a précisé le directeur général de Carrefour, Alexandre Bompard. Les produits sélectionnés par les distributeurs seront signalés en rayon par un « logo aux couleurs tricolores ». Cette annonce est l’aboutissement de plusieurs semaines de discussions entre le ministère et la grande distribution sur la mise en place d’un panier anti-inflation, dont l’abandon a été évoqué à plusieurs reprises. Le patron de E.Leclerc, Michel-Édouard Leclerc, a annoncé sur BFMTV que l’enseigne ne participerait pas à l’initiative du gouvernement. Par ailleurs, Bruno Le Maire ajoute que le dispositif de chèque alimentaire « pour les plus modestes » sera expérimenté « dans les prochains mois ». Il s’appuiera « sur une base territoriale, sans doute les départements, de façon à être au plus près des consommateurs et des producteurs », précise le ministre.

 

Négociations commerciales : les « grands industriels » devront rouvrir leurs contrats (Bercy)

Alors que le dispositif de « trimestre anti-inflation » doit prendre fin en juin, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a déclaré, le 6 mars en conférence de presse, que le gouvernement demandera « aux industriels de renégocier leurs prix avec la grande distribution » à ce moment-là. « Nous rouvrirons les négociations commerciales avec les grands industriels. Nous n’allons pas attendre la fin 2023 pour que la baisse des prix de gros se répercute sur les prix des produits de détail », s’engage-t-il. Son cabinet précise à Agra Presse que la réouverture des contrats concernera bien « les grands industriels » et non toutes les entreprises de l’agroalimentaire. « Lorsque les prix augmentaient, les industriels nous ont demandé de pouvoir renégocier », rappelle le ministre en référence à la réouverture des négociations commerciales en 2022 après le déclenchement de la guerre en Ukraine. Et de souligner qu'« aujourd’hui, ces coûts sont en train de baisser ». La réouverture des contrats est « importante pour les distributeurs et surtout pour les consommateurs », insiste-t-il. Ces nouvelles négociations prendraient le relais du dispositif « trimestre anti-inflation », annoncé le 6 mars, à travers lequel les distributeurs s’engagent à garantir « les prix les plus bas possible » sur un certain nombre de produits en prenant sur leurs marges.

 

Relations commerciales : la situation financière de tous les maillons s’améliore en 2022

En 2022, l’excédent brut d’exploitation (EBE) a évolué positivement pour tous les maillons de la chaîne alimentaire (agriculteurs, industriels, distributeurs) par rapport à 2019, montre un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) transmis à la presse le 6 mars. Le service du ministère de l’Économie précise toutefois que « ces résultats agrégés masquent des disparités infra-sectorielles et ne permettent pas de conclure quant à l’existence de marges en forte hausse sur certains produits ». L’agriculture est le maillon qui voit son EBE le plus progresser sur l’année : +27 % par rapport à 2019. Selon un premier rapport de novembre 2022, il était en hausse de 12 % au premier semestre. Les industries alimentaires, qui au premier semestre avaient perdu 16 points d’EBE par rapport à 2019, voient leur EBE rebondir de 50 % au second semestre, « effaçant ainsi les pertes par rapport à 2019 ». « Contrairement au premier semestre 2022, le secteur agroalimentaire ne contribue plus à absorber les hausses de prix au second semestre, note le rapport. Pour autant, le secteur n’a pas augmenté sa marge en 2022 et la hausse des prix s’explique à 85 % par celle des intrants. » Enfin, l’EBE de la grande distribution progresse de 9 % par rapport à 2019. « Son taux de marge serait 0,7 point au-dessus de son niveau d’avant-crise », ajoute l’IGF.

 

Lait : aux États-Unis, la FDA favorable au nom « lait » pour les alternatives végétales

La FDA (Food and drug administration) a recommandé, fin février, d’autoriser les fabricants de boissons végétales à continuer d’appeler leurs produits « laits végétaux » aux États-Unis, rapporte un article de nos confrères des Marchés (accès payant). L’administration américaine considère en effet que le consommateur fait la distinction entre un lait d’origine animale et une alternative à base d’avoine, de soja ou encore de coco. En contrepartie pour la filière laitière, la FDA préconise « que les emballages des boissons à base de plantes précisent les principales différences nutritionnelles entre leurs produits et le lait de vache », précise un article du New York Times. En Europe, la Cour européenne de justice (CJUE) a rendu, en 2017, un arrêt interdisant l’usage par les industriels des appellations « lait », « yaourt », « crème » et « fromage » pour les produits végétaux, réservant l’usage aux produits à base de lait animal.

 

Poules pondeuses : les vaccins vivants autorisés contre les salmonelles (JO)

Afin de prévenir les infections par les salmonelles, un arrêté paru au Journal officiel le 4 mars autorise les « vaccins vivants » pour les poules pondeuses d’œufs de consommation, les poulettes (futures pondeuses), ainsi que les futurs reproducteurs (stade multiplication uniquement). Les espèces concernées sont Gallus gallus (poules) et Meleagris gallopavo (dindes). Afin de pouvoir accéder à ces vaccins, les élevages devront respecter les « prescriptions de fonctionnement et d’aménagement de la charte sanitaire » (dite charte salmonelles). Les élevages qui produisent des œufs de consommation mais n’adhèrent pas à la charte pourront toutefois recevoir des animaux vaccinés si une « inspection officielle » de la DDPP (préfecture) « montre qu’ils respectent les obligations de fonctionnement et de d’aménagement prévues par l’arrêté du 29 septembre 2021 ». Par opposition aux vaccins inactivés (les seuls autorisés jusque-là), les vaccins vivants atténués contiennent des germes (ici des bactéries Salmonella) qui ont été modifiés pour perdre leur pouvoir infectieux. L’emploi de ces vaccins en pondeuses était interdit par un arrêté du 1er août 2018 (abrogé par le nouveau texte) ; les préfets pouvaient uniquement accorder des dérogations pour vacciner des animaux destinés à des « sites de ponte contaminés au cours des deux années antérieures » et respectant la charte sanitaire.

 

Néonicotinoïdes : l’arrêt de la CJUE s’applique aussi à la pulvérisation, selon Bruxelles

La Commission européenne a confirmé, le 6 mars devant les eurodéputés de la commission de l’Environnement, que l’arrêt de la Cour de Justice de l’UE rendu le 19 janvier, concernant l’interdiction pour les États membres d’accorder des dérogations à l’utilisation d’insecticides néonicotinoïdes, s’applique non seulement aux semences de betterave enrobées mais aussi à la pulvérisation, ainsi qu’à d’autres cultures comme le maïs ou le colza. « Nous avons demandé aux États membres qui avaient accordé des dérogations (avant la date de l’arrêt) de les retirer », a indiqué la directrice adjointe à la Santé Claire Bury. La Commission européenne a aussi chargé l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) de mettre à jour sa procédure de suivi des dérogations pour la rendre plus stricte. Des lignes directrices en la matière devraient être publiées « avant l’été » après consultation des États membres. Plusieurs eurodéputés ont critiqué l’attitude de certains États membres – la Slovaquie et la Belgique en particulier – qui feraient pression sur la Commission européenne pour que celle-ci choisisse l’interprétation la moins restrictive possible de l’arrêt.

 

Zéro artificialisation nette : LPO s’oppose aux « dérogations » d’une PPL au Sénat

Dénonçant la proposition de loi (PPL) de Jean-Baptiste Blanc (LR, Vaucluse) et Valérie Létard (Union centriste, Nord) pour faciliter la mise en œuvre des objectifs de « zéro artificialisation nette », la LPO (protection des oiseaux) reproche au Sénat de vouloir « continuer de bétonner la France ». Le texte, qui sera examiné en commission spéciale le 8 mars, « tente d’assouplir les objectifs législatifs de lutte contre l’artificialisation des sols et ainsi, perpétuer un aménagement non durable du territoire », selon un communiqué. LPO s’oppose à des « dérogations qui pourraient permettre d’exclure plus de 60 000 ha d’ici à 2030, soit près de 50 % de sols artificialisés supplémentaires par rapport aux objectifs ». En cause notamment, un article prévoyant que les surfaces végétalisées à usage résidentiel, secondaire ou tertiaire (jardins particuliers, parcs, pelouses…) soient considérées comme non artificialisés, afin de répondre à l’objectif de densification du tissu urbain. L’association conteste un autre article destiné à tenir compte des spécificités des communes littorales et des zones de montagne.

 

Pesticides : des scientifiques défilent pour demander une réduction de 90 % d’ici 2050

À l’appel du collectif Scientifiques en rébellion, des scientifiques et associations ont défilé le samedi 4 mars au Jardin des plantes à Paris en exigeant « des politiques publiques urgentes pour la transition radicale de nos modèles agricoles », dont une cible de réduction de 90 % des pesticides à l’horizon 2050. Soixante ans après la parution du livre de Rachel Carson « Printemps silencieux », « les preuves scientifiques sur les ravages des pesticides s’accumulent », soulignent les chercheurs dans un communiqué citant les récentes expertises de l’Inrae, de l’Inserm, ou encore les études du Muséum d’histoire naturelle sur la baisse des populations d’oiseaux. Or, le futur plan Ecophyto 2030, annoncé au Salon de l’agriculture, ne comporte « aucun objectif de réduction des produits phytosanitaires », déplore le collectif. Soutien accru à l’agroécologie et au bio, doublement des linéaires de haies, réduction de moitié de la consommation de viande, arrêt de l’artificialisation : « Il est urgent que les responsables politiques prennent la mesure des constats scientifiques et engagent un changement radical de modèle agricole », défendent-ils. La mobilisation a été lancée par le même collectif de scientifiques « en désobéissance » qui avait publié une tribune dans Le Monde en 2020 en dénonçant l’inertie du gouvernement sur l’ensemble des crises environnementales.

 

Pesticides : l’Anses souhaiterait lancer un programme « ambitieux » sur l’exposome

Dans un avis publié le 3 mars à l’occasion d’une autosaisine, le Conseil scientifique de l’Anses s’est attaché à mieux définir l’exposome pour formuler des recommandations à l’agence. Le concept d’exposome, soulignent les auteurs, vise à mieux comprendre notre état de santé en étudiant « la totalité des expositions néfastes comme bénéfiques à des agents chimiques, biologiques et physiques, en interaction avec le statut physiologique, le milieu de vie et le contexte psycho-social ». Inclure cette notion dans les études et évaluations concernant les pesticides pourrait notamment conduire à prendre en compte « pour la population générale, les expositions professionnelles, et à l’inverse pour les travailleurs, les sources et voies d’exposition de la vie quotidienne ». Pour toute saisine, considérer l’exposome pourrait plus généralement encourager les experts à s’interroger « sur les sources et voies d’exposition principales, en évaluant la nécessité de les agréger ». Le Conseil scientifique prévoit plusieurs pistes pour mieux prendre en compte l’exposome dans les travaux de l’agence sanitaire, dont une meilleure transversalité des travaux entre directions, ainsi qu’une mise en commun des données et le développement d’outils adaptés.

 

Cyber-sécurité : l’agroalimentaire victime d’une « vague » d’attaques en 2020-2022

Dans deux notes récemment parues, dont une primée par la Gendarmerie nationale, le maréchal des logis-chef Stéphane Mortier détaille comment l’agriculture est devenue « un secteur stratégique exposé à la cybercriminalité » et comment l’agroalimentaire européen et américain a récemment fait l’objet d’une vague d’attaques. Dans la lignée d’un rapport américain paru en 2019 (voir notre article dans Agra Presse hebdo), il rappelle les différents motifs, modes d’attaque et portes d’entrée des cybercriminels dans une agriculture de plus en plus connectée. Et il documente les cyberattaques qui « ont émaillé les coopératives et industries agricoles en 2020-2021 », jusqu’en 2022 avec l’attaque du machiniste AGCO au printemps. Treize coopératives ou industries agricoles et agroalimentaires ont été attaquées, qui avaient toutes leur siège aux États-Unis ou en Europe, à l’exception du brésilien JBS dont les activités sont toutefois très internationalisées. L’origine supposée de l’attaque était le plus souvent la Russie. Le gendarme note que huit entreprises ont une activité centrée sur les protéines, se demandant s’il faut y voir « une simple coïncidence ou plutôt une succession d’actes de guerre économique visant une restructuration mondiale de la production de protéines végétales ».

 

Tourisme : les communes devront promouvoir l’alimentation verte et locale

De nouveaux critères liés à l’alimentation et à l’agriculture durable pourraient devenir obligatoires pour les maires souhaitant obtenir le statut de commune ou station « touristique », d’après un arrêté soumis à consultation début mars. Objectif du gouvernement : « verdir le classement » et « faire de la France la première destination du tourisme durable d’ici à 2030 ». Le texte en consultation prévoit que les maires souhaitant obtenir ce sésame devront favoriser sur leurs marchés « la commercialisation de produits locaux ou dont le mode de production et de distribution est respectueux de l’environnement ». De même, la commune devra se prévaloir « d’au moins un restaurant utilisant des produits locaux et engagé dans une démarche plus respectueuse de l’environnement ». Le gouvernement attendra également au moins deux indicateurs d’une « démarche active » de développement durable, dont un engagement en faveur de « la suppression de l’utilisation de pesticides ». Le classement en commune ou station touristique offre divers avantages aux maires, dont le « surclassement démographique » (prise en compte des visiteurs en plus des résidents permanents), la perception des droits de mutation ou encore la vente d’alcool lors d’événements.

 

Local : les collectivités réclament une « exception alimentaire et agricole » (tribune)

Dans une tribune publiée le 3 mars sur le site internet du quotidien Le Monde (accès payant), les représentants des principales organisations d’élus territoriaux demandent la mise en place d’une « exception alimentaire et agricole » pour permettre aux collectivités de privilégier les produits locaux dans les marchés publics. « Plus que jamais, nous devons imaginer de nouveaux modèles qui permettent d’agir véritablement, avec pragmatisme et efficacité, en faveur de la planification écologique, interpellent les signataires. La commande publique est pour cela un important levier d’action. » Or, les marchés publics ne peuvent pas comporter de critères de proximité et les collectivités ont aujourd’hui recours à des « clauses incertaines » qui complexifient les appels d’offres, regrettent-ils. En conséquence, les élus appellent la France et l’Union européenne « à introduire des dispositions spécifiques aux achats alimentaires, au travers d’une exception alimentaire et agricole ». Et ce sur le modèle de l’exception culturelle qui protège les œuvres des règles commerciales de libre-échange. La présidente de Régions de France, Carole Delga, et le président de l’association des maires de France, David Lisnard, figurent parmi les signataires de cette tribune.