Prix plancher
La question des exemptions

La loi Egalim 2 prévoyait des exemptions pour de nombreuses filières. Si elles étaient à nouveau appliquées pour les « prix plancher », elles pourraient réduire considérablement l’étendue de la mesure.

La question des exemptions

Le gouvernement n’a, pour l’heure, pas précisé si les filières pourront demander à être exclues de la mise en place des « prix plancher », comme c’est le cas pour les lois Egalim, ce qui diminuerait le champ de la mesure. En effet, certains secteurs ont demandé de ne pas être concernés par les dispositions de la loi Egalim 2 de 2021, estimant qu’elles n’étaient pas adaptées à leurs marchés. C’est le cas notamment en fruits et légumes, pour certains vins et les céréales. Rappel des différentes dérogations.

Les filières exemptées de la contractualisation obligatoire

La loi Egalim 2 rend obligatoire la conclusion d’un contrat écrit pluriannuel entre un producteur et son premier acheteur. Cependant, plusieurs filières ont obtenu l’exclusion de leurs produits. Dans cette liste figurent les céréales, le riz, certains sucres, les semences, les fourrages, l’huile d’olive et l’olive de table, le lin et le chanvre, les fruits et légumes (y compris les bananes), certains vins et les produits de l’apiculture. Sont également exemptés de la contractualisation obligatoire les produits agricoles pour lesquels le producteur réalise un chiffre d’affaires inférieur à un certain seuil (porcs charcutiers, laits, jeunes ovins, certains bovins, pommes à cidre et poires à poiré).

Les filières exemptées de la transparence sur la matière première agricole

La loi Egalim 2 prévoit la « non-négociabilité » du coût de la matière première agricole (MPA) dans les négociations commerciales entre l’industrie et la grande distribution. Pour ce faire, elle contraint les industriels à faire preuve de « transparence » sur leurs prix d’achat. Depuis la loi Descrozaille, aussi dite Egalim 3, adoptée en 2023, la sanctuarisation de la MPA s’applique aussi aux marques de distributeur. Parmi les exemptions, on retrouve, sans surprise, sensiblement la même liste que pour les filières
exclues de la contractualisation obligatoire : les fruits et légumes frais (y compris les pommes de terre), les vins, spiritueux et cidres, les céréales, les oléoprotéagineux et le miel. Certains fromages AOP ont également fait ce choix, comme le beaufort, le comté, le morbier, le saint-nectaire ou encore le reblochon.

Les filières exemptées des clauses de renégociations obligatoires

Au-delà d’une durée de trois mois, les contrats amont et aval portant sur des produits agricoles et alimentaires « dont les prix de production sont significativement affectés par des fluctuations des prix des matières premières » doivent comporter une clause de renégociation. Les cidres sont venus rejoindre récemment la liste des produits qui sont exemptés de cette obligation. Sont également exclus depuis juillet 2023 les vins, les céréales et graines d’oléoprotéagineux, ainsi que les produits transformés qui en sont issus. La liste comporte aussi la paille et le foin.

Prix abusivement bas : première condamnation revendiquée par un viticulteur

« Une décision inédite » : la justice a condamné le 22 février des négociants à verser 350.000 € à un viticulteur bordelais qui les accusait d’avoir violé la loi Egalim en lui achetant son vin en vrac à un tarif « abusivement bas ». « C’est la première fois qu’un tribunal condamne des acheteurs de produits agricoles pour avoir fait pratiquer des prix d’achat abusivement bas », affirme à l’AFP l’avocat du requérant, Me Louis Lacamp. Rémi Lacombe, un exploitant dans le Médoc, avait vendu près de 8.500 hl aux sociétés Cordier et Maison Ginestet en 2021 et 2022, aux prix de 1.150 € ou 1.200,00 € le tonneau. Soit environ 1 € la bouteille, tarif que le producteur juge très inférieur à ses coûts de revient, oscillant selon lui entre 1.500 € et 2.000,00 € le tonneau. Le tribunal de commerce de Bordeaux a estimé dans sa décision que les deux négociants n’avaient pas laissé M. Lacombe faire de propositions de prix sur les contrats, « ce qui devait constituer le socle de la négociation pré-contractuelle ». Après divers calculs et estimant que le prix juste d’achat par tonneau était de 1.550 €, le tribunal a condamné Cordier à lui verser 202.000 € et Maison Ginestet 152.000 €. C’est une « décision transposable à tous les produits agricoles », estime l’avocat des distributeurs, même s’il concède qu’entreprendre une telle démarche « n’est pas facile, car les agriculteurs ont peur des éventuelles représailles de la part des négociants, peur que plus personne ne leur achète leur production ».

La loi Egalim, adoptée fin 2018, doit assurer aux agriculteurs un revenu qui leur permette de vivre de leur travail. Le 21 février, Gabriel Attal a annoncé sa volonté de présenter d’ici l’été un nouveau texte pour « renforcer le dispositif Egalim ». Puis le 24 février, le président Macron a annoncé des « prix plancher » pour les agriculteurs. La Cnaoc a également annoncé travailler sur ces dossiers.