À l’occasion de la Journée internationale des forêts, le 21 mars dernier, Euroforest, salon forestier européen de référence qui se tiendra en juin prochain à Saint-Bonnet-de-Joux, donne la parole aux acteurs de la filière forêt-bois. Notamment pour répondre à l’ambition gouvernementale : « Planter un milliard d’arbres : comment fait-on ? »

« Planter un milliard d’arbres : comment fait-on ? »

En réponse aux effets du changement climatique et aux violents incendies qui ont ravagé les forêts hexagonales l’an passé, Emmanuel Macron a annoncé le 28 octobre 2022 vouloir planter un milliard d’arbres d’ici à 2032. Cent jours avant la tenue de son grand rendez-vous quadriennal des forestiers, Euroforest fait témoigner les professionnels du terrain. Tour d’horizon de l’intérêt et de la faisabilité de ce projet structurant pour la filière dans les années à venir.

Un soutien au renouvellement des forêts plébiscité

L’amplification du mouvement pour reboiser les forêts à la fois sur le long terme et au niveau national est une très bonne nouvelle pour les forestiers. Si l’annonce de ce plan décennal par le Président a suscité l’adhésion de l’ensemble des acteurs de la filière, les professionnels du terrain s’interrogent sur les modalités d’application : « On se réjouit de cette opportunité, mais il est essentiel qu’elle soit assortie de conditions administratives et techniques réalistes, en particulier quant aux préconisations d’essences à planter en contexte de changement climatique », souligne Damien François, Ingénieur forestier à la coopérative forestière Forêts & Bois de l’Est. Dans son bilan annuel publié début mars, le Département de la santé des forêts indique que près de 38 % des plantations de 2022 sont en échec au niveau national. Le volet technique de cette mesure s’annonce donc être un des principaux enjeux. Un groupe de travail pour définir les besoins, les outils et les risques ont été mis en place en ce sens, et doit rendre ses conclusions courant mai.

Des inquiétudes sur la disponibilité des ressources

« Un milliard de plants sur dix ans correspond à un rythme de plantation annuel de cent millions d’arbres. On ne part pas de zéro. On a planté soixante millions de plants en 2021. C’est donc trente à quarante millions de plants en plus par an », explique Gilles Bauchery, pépiniériste dans le Loir-et-Cher, qui salue l’impulsion du gouvernement. Depuis les années 90, le nombre de plants produits a au moins été diminué par trois, et le réseau de production est quelque peu en berne. Aujourd’hui s’ajoute le stress hydrique. Mais pour Gilles Bauchery, c’est l’accès aux graines de qualité qui va devenir le principal enjeu, avec des essences diversifiées et résistantes au changement climatique. En effet, beaucoup prônent la diversification comme condition sine qua non d’une éventuelle résilience des nouveaux boisements à l’heure du changement climatique, particulièrement s’ils sont installés en remplacement des forêts qui souffrent déjà de dépérissement.
« Ce plan est plus que bienvenu, pour le renouvellement de nos forêts, mais aussi parce que le bois est un matériau dont nous allons avoir besoin pour la transition écologique. Ce n’est pas pour autant que la filière est restée les bras croisés, cela fait plusieurs décennies que les forestiers ont mis en place la gestion durable et que nous nous attelons au renouvellement des forêts françaises. Aujourd’hui, l’enjeu repose sur les moyens matériels et humains dont nous allons avoir besoin pour exploiter, planter et entretenir, et aussi pour s’assurer que les essences installées perdureront. C’est la limite à la réussite de ce plan, il faut rester humble », commente Anne-Marie Bareau, propriétaire forestier dans le Puy-de-Dôme et présidente du CNPF. Le sujet emploi s’ajoute en effet à la liste des interrogations. La filière forêt-bois manque déjà de main-d’œuvre selon les professionnels, qui regrettent unanimement la pénurie de formation aux métiers forestiers. « Vous savez, nous, on va en forêt et on replante. Pour planter un arbre, il faut des bras. Si on avait plus de pioches que de tableaux Excel, ça serait mieux. Les vrais protecteurs de la forêt, c’est nous ! », ajoute Cyrille Ducret, PDG de la scierie éponyme.

Incendies et crises sanitaires…

Première victime du changement climatique, les forêts sont également un élément essentiel de régulation du climat. Pour cela, une gestion forestière garante du bon renouvellement des forêts et de la préservation de la biodiversité est indispensable. Et doit passer par une coopération plus forte entre les acteurs de la filière, un sujet récurrent dans la filière. « Nous sommes tous très préoccupés par les menaces qui pèsent sur nos forêts. Mais finalement, les événements dramatiques de l’été dernier ont eu des retombées positives. Des acteurs qui ne s’étaient jamais parlés se sont mis à travailler ensemble pour la première fois. On s’est tous retroussé les manches. J’espère que ce projet de renouvellement forestier va continuer à porter cet élan », commente un entrepreneur de travaux forestiers.
Jean-Louis Bregaint, maire de la commune forestière de Moissannes ajoute : « J’espère que cette annonce permettra à des acteurs de la filière forêt-bois d’échanger et se rapprocher. Je le constate sur ma commune : parfois les acteurs d’un même territoire ne se parlent pas, ou très peu. Une meilleure collaboration permettrait de développer l’activité de ces entreprises, créatrices d’emplois dans les communes rurales ».

Accompagner le terrain

Rassembler, coopérer, unifier, fédérer : toutes les initiatives qui permettent de créer des espaces de dialogues et de coopération, à l’image des évènements autour de la Journée internationale des forêts sont les bienvenues. Le salon Euroforest intervient également pour accompagner cette annonce. Véritable vitrine vivante de la filière, le salon veut jouer le rôle d’assembler des acteurs de terrain, déjà en ordre de marche, pour contribuer au succès de cette annonce. Pour sa 8ème édition, le salon démontre déjà une mobilisation sans précédent des exposants pour avancer sur les sujets d’actualité forestière.
Pallier au manque de main-d’œuvre d’une filière qui emploie aujourd’hui en France près de 400.000 emplois personnes en fait partie. « Pour moi, le plus important à Euroforest, c’est d’arriver à sensibiliser les jeunes. De manière générale, il y a un énorme travail à faire sur la valorisation de nos métiers, sur la formation et la pénibilité du travail qui a beaucoup évolué, dans le bon sens », témoigne Cédric Turé, entrepreneur de travaux forestiers. Euroforest, c’est enfin l’occasion de rencontrer en pleine nature les forestiers passionnés, qui œuvrent depuis des années au renouvellement de nos forêts. Plus que jamais, les forestiers ont besoin du soutien de la société civile et non l’inverse. D’où l’importance de pouvoir venir à leur rencontre, et comprendre le métier de ceux qui cherchent à « accompagner la nature et hâter son œuvre ».
« Cette édition d’Euroforest sera plus que jamais un moment essentiel à la construction d’une vision commune de l’avenir de nos forêts, loin des clichés, des simplifications et des solutions toutes faites. En partageant l’expertise et surtout la passion de chacun des acteurs de la filière, le salon espère lancer un élan qui devrait cristalliser tous les efforts autour de cette filière dont le dynamisme bénéficie à toute la société ».

A propos d’Euroforest

Euroforest compte parmi les salons européens leaders dédiés à l’univers forêt-bois. Manifestation en pleine nature au coeur de la forêt de Saint-Bonnet-de-Joux (71) en Bourgogne-Franche-Comté, Euroforest est le grand rendez-vous incontournable des acteurs de la filière qui accueille plus de 40 000 visiteurs et 400 exposants. À l’occasion de sa 8ème édition qui se tiendra les 22, 23 et 24 juin 2023, cet événement international accueillera un très large public pour répondre aux interrogations sur la forêt et le bois et échanger avec tous acteurs forestiers de la filière.