Vendanges
Des perspectives très incertaines

Régis Gaillard
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Aussi certainement que 2020 est à marquer d’une pierre blanche dans la mémoire collective avec la survenue du Covid-19, 2021 aura une saveur toute particulière pour la profession viticole. La succession d’incidents climatiques entre gel, grêle, orages, fortes pluies et même tornade devrait entraîner une toute petite récolte. Ceci en espérant que sècheresse et canicule ne viendront pas s’ajouter à un tableau bien noir.

Des perspectives très incertaines
Les vendanges pourraient débuter mi-septembre pour les vins tranquilles, avec de tous petits rendements (photo d'archives).

La nature est ainsi faite qu’il y a des années fastes et d’autres beaucoup plus ternes. Le millésime 2021 fait assurément partie de cette seconde catégorie avec une multiplication des aléas climatiques entre gel, températures qui font le yoyo, grêle au début de l’été, orages, fortes pluies ou encore, plus ponctuellement, tornade. Et si une zone est par chance épargnée par l’un de ces aléas, elle est touchée par un autre. Nul vignoble du département ne peut se dire totalement épargné même s’ils ont été impactés à des degrés divers.

Attendre et voir

La région mâconnaise est sans doute celle qui va payer le plus lourd tribut à ces six premiers mois de l’année. Bien difficile pour les AOC touchées de tout simplement se projeter dans le futur. Avec, comme le soulignait la présidente de Pouilly-Fuissé Aurélie Cheveau, la crainte de survenue de la sècheresse et de la canicule alors qu’il reste plus de deux mois avant les vendanges des quelques raisins qui demeurent. Difficile, alors, d’évoquer d’hypothétiques rendements ou de parler de la qualité future des vins. Il paraît urgent d’attendre de voir ce qui va se passer dans les semaines à venir.

Toutefois, chacun à son échelle met en place des stratégies pour limiter les dégâts. Ainsi, du côté de la Cave de Lugny, Marc Sangoy se dit heureux d’avoir échappé au dernier épisode de grêle même si la pluie a été importante. « Aujourd’hui, nous pensons que nous aurons environ une demi-récolte. Nous allons essayer d’équilibrer les appellations ». Avec une réduction en vue pour la production de crémant. « Tout cela est évidemment mis en place en espérant que nous n’aurons pas d’autres incidents ». Avec, toutefois, quelques inquiétudes quant à la présence de mildiou et d’oïdium puisque l’on a déjà pu apercevoir quelques taches. Même si la floraison s’est bien passée, « cette année, presque tous les éléments sont contraires ». Ailleurs dans le département, de la coulure a été observée.

Président de la Cave des Grands Crus Blancs, Richard Goyat n’est guère plus optimiste. Car malgré une végétation abondante, « il n’y a pas beaucoup de raisins. Cette année va être très compliquée. Nous ne sommes même pas sûr d’arriver à un rendement de 50 %. Sur certaines parcelles, nous allons peiner à atteindre 20 hectolitres par hectare. Pour l’instant, au niveau des maladies, il n’y a pas trop de souci ».

Du côté du Couchois, Laurent Demontmerot souligne que tout s’est bien passé, après le gel, au niveau de la végétation, de la fleur. « Nous pensons que nous allons rattraper un peu de notre retard, avec des vendanges sans doute vers le 15-20 septembre. Cela pousse très, très vite mais reste fragile. Il y a un peu de pression de maladies, notamment le mildiou. Heureusement, nous n’avons pas été touchés par la grêle. Après le gel, il n’y a pas eu de perte de pieds. Au final, nous devrions faire 50 % du rendement en rouge et 20 % en blanc ».

La prudence s’impose

Pour sa part, François Legros, président de la Cave de Buxy, confirme que, depuis les épisodes de gel, pas grand-chose n’a changé en terme de perspectives. « Ce que nous envisagions en terme de rendements semble se confirmer. À savoir entre un quart et un tiers en blanc, entre un tiers et la moitié en rouge ». Quant à la vigne, « elle a bien profité grâce à un temps beau et chaud. Les épisodes ont été bénéfiques ». Avec, à la clé, une évolution des grappes très rapide. « Cette année, nous avons des vignes très vigoureuses mais peu chargées. À noter la difficulté pour les relevages. Il y aura sûrement plus de rognage. Il y a aussi des risques de mildiou et d’oïdium. Par chance, nous n’avons pas été touchés par la grêle ».

La situation à Rully n’est pas non plus optimale comme le confirme David Lefort. « Après le gel et aussi du fait des conditions météo, les vignes ont accusé le coup pendant trois semaines à un mois et ont peiné à redémarrer. Ensuite, cela a bien poussé. C’était joli et pas compliqué à travailler. Par contre, les orages du week-end du 20 juin ont généré du vent et un peu de grêle du côté de Bouzeron et de Mercurey. Cela a cassé pas mal de branches d’arbres. A priori, nous devrions être pas loin du rendement en rouges et à moins de 50 % en blancs ».

Pour ce qui est de Mercurey, les soucis s’accumulent à la suite de la mini tornade qui a fait pas mal de dégâts. Notamment au niveau des arbres dont certains se sont retrouvés dans les vignes ! Des vignes qui ont été impactées mais sans plus de précisions pour l’instant. « Les vignes étaient bien reparties après le gel, précise Loïc de Suremain. Mais comme je le disais déjà il y a quelques semaines, il faudra attendre les vendanges pour avoir une idée précise des rendements ». Il peut, en effet, se passer tellement de choses d’ici au mois de septembre prochain…