Projet de territoire
Un PCAET "vert" vers l’agriculture

Françoise Thomas
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Le Grand Charolais poursuit l’élaboration de son plan climat-air-énergie territorial, le PCAET, en consultant les différents acteurs du terrain. Après un atelier avec les entrepreneurs du secteur, l’échange était une nouvelle fois programmé avec les responsables agricoles locaux vendredi 30 octobre. Des thématiques comme l’eau, la production d’énergies renouvelables et l’atténuation de l’impact énergétique étaient au centre des discussions.

Un PCAET "vert" vers l’agriculture
Le PCAET va engager les 44 communes du Grand Charolais et leurs 40.000 habitants, sur des actions visant atténuer le changement climatique, développer les énergies renouvelables et maîtriser la consommation d'énergie.

La mise en place du nouveau confinement n’a pas eu raison de la tenue de l’atelier prévu entre les élus de la communauté de communes du Grand Charolais et les représentants locaux du monde agricole autour du futur plan climat. C’est par visioconférence que les différentes parties se sont entretenues.

Le but de ce nouvel atelier était de faire le point sur les propositions avancées jusqu’à présent par les précédents échanges et « à tenter d’aller plus loin sur les actions à mettre en place, les plus pertinentes à conserver, celles à enrichir », a commenté Alexandra Watier cheffe de projet chez BL Évolution.

Une cinquantaine d’actions devrait être proposée dans ce premier PCAET. « Beaucoup auront une coloration agricole, a souligné Patrick Bouillon, vice-président du Grand Charolais en charge du PCAET. Il n’est pas question de pointer du doigt l’agriculture comme secteur de nuisance mais bien au contraire d’utiliser l’outil PCAET pour mettre en exergue un certain nombre de choses et apporter des solutions rapides à mettre en place. Ainsi ce PCAET sera "vert" et tourné vers l’agriculture ».

Le photovoltaïque, sous condition

Parmi les premières grandes thématiques qui ont été abordées vendredi dernier, celle de la production d’énergies renouvelables. Là-dessus, le secteur agricole reste très vigilant. Et la position de la FDSEA de refuser des panneaux au sol a bien été rappelée. Si pour Alexandra Watier, « il y a un potentiel important sur les toits des bâtiments agricoles », François Nugue, éleveur présent, a bien insisté sur l’un des principaux freins que « reste le coût de raccordement ». Plusieurs sont allés dans son sens et ont plébiscité une intervention de la Com'com pour soutenir financièrement les raccordements.

En parallèle, les professionnels agricoles se sont montré prudents sur le principe de l’agrivoltaïsme. « Pourquoi pas » s’il s’agit de générer un complément de revenu, notamment avec des solutions verticales ou des solutions à tester pour du maraîchage. Mais « à oublier » s’il consiste à placer des panneaux photovoltaïques à mi-hauteur en protection de troupeaux, notamment ovin, avec un faible chargement. Concept correspondant plus dans ces cas-là « à de l’entretien d’un terrain par les moutons et non à de l’agrivoltaïsme », est intervenu Franck Richard responsable du développement des territoires à la chambre d’agriculture. Position partagée par Tania Rizet, la directrice générale adjointe du Grand Charolais : « il est en effet important de rappeler que l’agriculture doit rester l’activité principale ». A noter que ces débats ont également eu lieu lundi 2 novembre lors d'un Conseil de l'agriculture qui s'est tenu en visioconférence visant à établir une position commune aux principales OPA de Saône-et-Loire.

Ainsi si la mise en place de panneaux sur des bâtiments reste une option à étudier pour nombre d’agriculteurs, les questions du coût du raccordement, de la rentabilité de l’installation et des incidences (ou non) sur les animaux restent en suspens.

Les représentants du Grand Charolais ont réaffirmé leur envie de réfléchir à ce type de projets et d’aider les agriculteurs à trouver les financements.

La pertinence de la méthanisation

Autre filière de production d’énergie renouvelable abordée lors de cet atelier, la méthanisation. Si sur le papier les projets sont séduisants, leurs mises en place sur le terrain s’avèrent plus délicates notamment dans le Charolais. Ainsi, Denis Mathieu a souligné la difficulté d’approvisionner les méthaniseurs régulièrement toute l’année, et notamment l’été au vu des sécheresses vécues ces trois dernières années. « C’est un gros dossier qui doit demander réflexion », a-t-il insisté sous-entendu en terme d’investissement, de lourdeur de procédures administratives et de diversité et de régularité des déchets à méthaniser.

Ainsi, même si la Com'com pourrait fournir déchets verts, déchets de la restauration collective et déchets de la grande distribution, pour Tania Rizet, « s’il y a des projets qui se montent, ce seront forcément des petits projets sur notre secteur ». Patrick Bouillon a cependant insisté pour ne pas fermer totalement la porte à ces solutions.                        

Même concertation à trouver autour de la gestion des haies dans le but de valoriser le bois bocager. Si la question se pose d’encourager les haies hautes (voir encadré sur l’Unesco), « les réflexions ont aussi jusqu’à présent porté sur le fait de financer l’entretien des haies par un modèle économique autour de la séquestration de carbone », a présenté Alexandra Watier. Il en est de même sur les solutions à trouver pour la formation à l’implantation et à l’entretien des haies, pour l’aide à l’achat de broyeurs, sur le développement de filières locales, sur les essences à privilégier.

Les syndicats de rivières, l’agence de l’eau, etc. pourraient être intégrés dans ces réflexions, notamment dans la question du financement de l’entretien des ripisylves.

Une eau à conserver

La problématique du stockage de l’eau a aussi été évoquée, mais là encore sans apporter de solutions définitives tant la question est complexe et sujet à débat. Parmi les propositions issues des précédents ateliers : la récupération des eaux de toiture, le captage individuel, la création/réhabilitation de mares, l’aide à l’achat de citerne et bien évidemment la mise en place de retenues collinaires mais qui dépendent, a-t-il été rappelé, « avant tout d’une volonté politique … »

Grands partisans du stockage de l’eau lorsqu’elle tombe - car « il y a de l’eau ! »-, les agriculteurs présents ont insisté sur la réhabilitation des retenues naturelles : « dans nombre d’exploitations il y a un pré de l’étang » a ainsi fait remarquer Denis Mathieu, souhaitant ainsi privilégier des solutions « gérables sur le long terme ». Une gestion de l’eau, pour Didier Touillon autre éleveur du secteur, à mener de concert avec une évolution des pratiques agricoles impliquant la nécessité « de produire l’alimentation animale sur place », permettant de « constituer des stocks au printemps ». Ainsi, l’irrigation des cultures ou des prairies permettrait de sécuriser tout un modèle économique, le séchage en grange pourrait être encouragé… « La gestion des ressources en eau est devenue prioritaire, quelles que soient les solutions mises en œuvre », a conclu Frédéric Paperin de l’Institut charolais. Des décisions à prendre qualifiées « d’urgentes » et qui concernent tout un chacun bien au-delà de l’agriculture.

Questionnements autour du projet Unesco

Une précédente rencontre le 8 octobre avec les représentants de la FDSEA avait soulevé nombre d’interrogations sur la candidature Unesco et les répercussions possibles voire les contraintes, que cela pourrait impliquer.
Ainsi, des représentants du pays Charolais-Brionnais (le PETR) en charge du projet Unesco étaient présents et se sont voulu rassurants.
Si le monde agricole redoute que la démarche Unesco « fige le territoire », François de Bélizal, en charge de la candidature Unesco au PETR l’a soutenu : « cette démarche va protéger les paysages dans leurs évolutions ». Les « effets vertueux du modèle agricole » présent sont tout à fait reconnus et intégrés dans cette démarche patrimoniale. Et il n’est pas question non plus d’empêcher le développement des projets en énergies renouvelables, mais leur dimension et leur emplacement devra malgré tout être compatible avec la préservation du paysage.

Mêmes interrogations sur les haies signant le paysage bocager tant mis en avant dans la démarche Unesco. L’évolution climatique tend à préconiser des haies hautes pour diverses raisons. « Les haies hautes seront très certainement possibles… mais pas à généraliser de partout », ont insisté les représentants de la candidature. Des évolutions à envisager de part et d’autre dans la discussion et la concertation, et donc pas dans l’interdiction.

Le calendrier à suivre

Le PCAET est une obligation réglementaire qui s’est généralisée le 1er janvier 2019 à toutes les intercommunalités de plus de 20.000 habitants. Il entre dans l’engagement pris au niveau national d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Celle-ci sera atteinte, d’une part, en réduisant les émissions de gaz à effet de serre dans tous les secteurs et, d’autre part, en compensant celles toujours produites.

La Com'com du Grand Charolais doit à son niveau définir une stratégie d’actions concrètes à mettre en œuvre sur six ans.

La réunion de travail du 30 octobre a permis d’enrichir les réflexions autour des questions concernant plus précisément l’agriculture. La prochaine étape consistera à sélectionner les actions les plus prometteuses, les plus partagées et les plus attendues et de les décliner en fiche action. Un travail qui devrait être présenté au premier trimestre 2021 pour un plan finalisé d’ici fin 2021.

 

Le Grand Charolais poursuit l’élaboration de son PCAET en consultant les citoyens, les entrepreneurs, les agriculteurs, comme ici lors d’un atelier organisé en distanciel.