Les brèves du 8 février 2023

Mis en ligne par Cédric Michelin
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Voici les brèves du 8  février 2023.

Les brèves du 8 février 2023

OGM : la mutagenèse in vitro classique doit être exclue de la directive, confirme la CJUE

Dans un arrêt rendu le 7 février, la Cour de Justice de l’UE estime que les variétés issues de techniques mutagènes in vitro doivent être exemptées de l’application de la réglementation OGM de la même manière que les plantes issues de mutagénèse in vivo. Une décision prise suite à un recours de la Confédération paysanne notamment qui contestait l’autorisation par la France de variétés de colza rendues tolérantes aux herbicides par mutagenèse in vitro. Après un premier avis de la CJUE en 2018, suivi d’un jugement du Conseil d’État en 2020, que le gouvernement tarda à appliquer, la plus haute juridiction administrative française s’en était finalement remis, fin 2021, à un nouvel avis de précision de la CJUE. Pour la Cour, les organismes obtenus « par l’application in vitro d’une technique de mutagenèse qui a été traditionnellement utilisée pour diverses applications in vivo et dont la sécurité est avérée depuis longtemps au regard de ces applications sont exclus du champ d’application » de la directive OGM. Ce qui signifie qu’elles ne nécessitent pas de passer par un processus d’autorisation de mise sur le marché et d’étiquetage. « La CJUE ouvre un boulevard pour un déferlement massif d’OGM non étiquetés ni évalués dans nos champs et nos assiettes », a déploré dans un communiqué Via Campesina.

 

NBT : une pétition s’opposant à toute déréglementation remise à la Commission européenne

Une coalition d’une cinquantaine d’associations (les Amis de la Terre, Slow food, CEO, Ifoam) a remis le 7 février à la Commission européenne une pétition ayant récolté 420 000 signatures de citoyens européens (dont 90 000 collectées en France) demandant que les plantes issues des nouvelles techniques de sélection génomiques (NBT) restent « réglementées et étiquetées » en tant qu’OGM. Les initiateurs de cette pétition ont également organisé une manifestation devant le Parlement européen à Bruxelles à laquelle plusieurs eurodéputés – le Français Eric Andrieu (social-démocrate), l’Allemand Martin Hausling (Vert) ou la Néerlandaise Anja Hazekamp (Gauche) – sont venus apporter leur soutien. La Commission européenne devrait présenter le 7 juin un paquet législatif sur les « systèmes agroalimentaires durables et l’utilisation des ressources » comprenant une proposition de règlement sur les NBT en vue de faciliter la culture et la mise sur le marché de l’UE des variétés de plantes issues de ces techniques telles que la mutagenèse ciblée ou la cisgenèse.

 

PPL Descrozaille : la rapporteure au Sénat veut suspendre le relèvement du SRP

Dans un communiqué commun du 7 février, la FNSEA et les Jeunes agriculteurs (JA) estiment que suspendre l’application du relèvement du seuil de revente à perte (SRP + 10) jusqu’en 2025 serait prendre un risque « inconcevable, voire irresponsable ». Les deux organisations réagissent à la proposition introduite par un amendement déposé par Anne-Catherine Loisier (centriste, Côte-d’Or), la rapporteure au Sénat de la proposition de loi sur les relations commerciales de Frédéric Descrozaille. « Nous dénonçons cette initiative qui risque d’avoir des effets dramatiques pour l’ensemble de la filière : certains distributeurs n’attendent que ce signal pour relancer une guerre des prix touchant l’ensemble des produits alimentaires », alertent les syndicats alors que l’examen du texte doit commencer en commission des Affaires économiques du Sénat, le 8 février. Ils relèvent « un consensus entre la plupart des acteurs de la filière » sur le maintien de cette mesure et appellent les sénateurs à la « responsabilité ». Cette proposition est « la source potentielle d’une grande déstabilisation des négociations commerciales qui entrent actuellement dans leur dernière ligne droite », souligne le communiqué alors que l’expérimentation du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions arrive à échéance le 15 avril.

 

Commerce extérieur : le solde agricole de la France atteint un niveau record en 2022

Le solde agricole de la France s’améliore de 3,9 Md€ et atteint 4,8 Md€ en 2022, un record « historique » deux fois et demi supérieur à sa moyenne entre 2000 et 2021, selon les chiffres des douanes dévoilés le 7 février. L’augmentation des exportations de produits agricoles (35,6 %) est supérieure à celle des importations (12,3 %). « L’essentiel de cette amélioration est porté par le dynamisme des exportations de céréales : blé, maïs et orge, explique une note du service du ministère de l’Économie. Les ventes de blé, qui ont presque doublé par rapport à 2021, expliquent à elles seules près des trois quarts de la hausse du solde agricole ». Cette hausse est d’abord liée à l’augmentation du prix du blé exporté (46 %), mais aussi à un accroissement des volumes exportés (25 %), notamment vers le Maroc et l’Égypte. La France a exporté près de 11 Md€ de céréales, contre 6,6 Md€ en 2021, et plus de 1 Md€ de produits céréaliers, contre 634 M€ en 2021, selon les données de l’interprofession Intercéréales. « Avec plus de 30 millions de tonnes de céréales exportées en 2022, la France devient le 7e exportateur mondial de céréales brutes et le 4eexportateur de blé tendre », se félicite l’organisation dans un communiqué.

 

Outre-mer : des « trajectoires » territoriales d’autonomie alimentaire attendues au Sia

Le Salon de l’agriculture sera l’occasion pour les pouvoirs publics de présenter des « trajectoires » territoriales vers l’autonomie alimentaire pour les territoires d’outre-mer, indique Arnaud Martrenchar, délégué interministériel à la transformation agricole des outre-mer. En octobre 2019, le président de la République s’était déplacé à La Réunion, où il avait notamment fixé pour objectif aux territoires d’outre-mer de viser « l’autonomie alimentaire » à horizon 2030. Depuis, des « comités de transformation agricole » ont été constitués par les préfets concernés, qui ont abouti à la réunion d’un comité national en décembre 2020, puis à des « synthèses territoriales » délivrées par les préfets en 2021, retrace le délégué interministériel. « Nous voulons accélérer », explique Arnaud Martrenchar. Les préfets d’outre-mer doivent désormais définir des « trajectoires de couverture des besoins » filière par filière pour leur territoire. Une présentation des feuilles de route devrait être faite au Salon de l’agriculture, en lien avec les collectivités. « Il y a une volonté de construire une stratégie territoriale », assure M. Martrenchar. Et de rappeler que si certaines régions ont bien avancé sur les fruits et légumes, elles ont plus de retard en filières animales.

 

Lait : après leur manifestation, la CR et l’Apli obtiennent des engagements de Carrefour

Les représentants des producteurs de lait issus de la Coordination rurale (CR) et de l’Apli ont rencontré, le 7 février, la direction de Carrefour à l’occasion de l’action menée devant le siège du groupe à Massy. Une centaine de producteurs, selon les organisateurs et l’AFP, se sont joints à la manifestation, dont des membres de l’EMB (European Milk Board) et de Faire France, marque de producteurs créée avec le concours de l’Apli. Du lait a été déversé devant les locaux du groupe avant la rencontre avec la direction. La CR et l’Apli demandaient une revalorisation du prix du lait à « 55 cts€ par litre » et une meilleure mise en avant des marques de producteurs dans les rayons de l’enseigne. Ces dernières sont reléguées « au fond des rayons au profit des marques de distributeurs », dénonce le président de l’Apli Adrien Lefèvre. « Nous sommes allés vers Carrefour car leurs pratiques ont déçu beaucoup de nos collègues, mais tous les distributeurs pourraient se sentir concernés », précise la présidente de la CR Véronique Le Floc’h. Le groupe Carrefour indique qu’il « respecte la loi ». Par ailleurs, il s’est engagé à « doubler les volumes sur le lait Faire France en 2023 » et à garantir « les moyens d’améliorer la notoriété de la marque ». Une nouvelle rencontre doit avoir lieu le 2 mars, après les négociations commerciales.

 

Volaille : Plukon croque la viande séparée mécaniquement du néerlandais Ter Maten

Après avoir racheté la marque française Duc en 2017, le géant néerlandais de la volaille Plukon (2,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires) a annoncé dans un communiqué paru le 6 février qu’il avait acquis 51 % des actions de son compatriote Ter Maten, spécialiste de la viande séparée mécaniquement (VSM), utilisée notamment en charcuterie. Les deux sociétés collaboraient déjà de longue date, rappelle le communiqué. Basée aux Pays-Bas, Ter Maten se présente comme « un acteur de premier plan dans le traitement des coproduits de poulet pour l’industrie de transformation humaine et l’industrie des aliments pour animaux de compagnie ». En 2022, l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros. Bien positionné sur le marché des produits élaborés à base de volaille, Plukon est le deuxième industriel de la volaille en Europe, derrière le français LDC, qui a dépassé les 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022.

 

Crise du bio : la FNSEA préférerait une MAEC plutôt qu’un écorégime revalorisé

Alors qu’une partie des fonds réservés aux conversions à l’agriculture biologique risque de ne pas être utilisée cette année, « un dispositif de type MAEC pourrait être ouvert dans toutes les régions pour valoriser les apports en matière de biodiversité ou l’autonomie des fermes bio », propose Étienne Gangneron, élu de la FNSEA en charge du bio. À l’inverse de la revalorisation de l’éco-régime bio, comme proposé par la Fnab, cette MAEC « éviterait les débats sur les transferts entre piliers », souligne-t-il. Assimilée à une MAEC, l’aide à la conversion fait, en effet, partie du second pilier, à l’inverse de l’écorégime relevant du premier pilier. Des réflexions seraient aussi en cours autour « d’une aide forfaitaire et ciblée qui pourrait compenser les déclassements ». En parallèle, « tous les aides classiques doivent être activées », poursuit l’élu, citant les exonérations de taxe foncière, les aides MSA, ou le report des traites de prêts d’État. Comme beaucoup d’acteurs, le syndicat soutient enfin un financement renforcé des campagnes de promotion et de communication de l’Agence bio, « notamment sur les atouts du bio pour le climat ». Autant de sujets portés par la FNSEA auprès de ses homologues européens, avec l’espoir d’un financement bruxellois. En l’attente d’une réponse ministérielle à l’urgence, le syndicat majoritaire se tiendra en revanche « en retrait » du plan ambition bio post-2022. « Nous devons avant tout accompagner les producteurs existants », invite Étienne Gangneron.

 

Étiquetage de l’alcool en Irlande : la filière vin de l’UE regrette la passivité de Bruxelles

Suite au feu vert de la Commission européenne à son projet de règlement sur l’étiquetage des boissons alcoolisées contre les risques liés à leur consommation, l’Irlande a reconnu lors d’un événement sur le cancer organisé par la présidence suédoise le 1er février, que cette initiative était « en infraction avec le marché unique » et qu’elle était « surprise, c’est un euphémisme, d’être passée avec succès », rapporte le 7 février le CEEV (Comité européen des entreprises vins). Contacté, son secrétaire général Ignacio Sánchez Recarte estime que « Dublin se moque de l’UE. La Commission aurait dû exprimer dès le début son opposition en expliquant que ce projet était illégal et qu’elle préparait déjà une révision des règles relatives à l’information des consommateurs sur les boissons alcoolisées prévue pour 2023 ». Quelques jours plus tôt, neuf États membres (Espagne, Italie, France, Portugal, Bulgarie, Grèce, République tchèque, Hongrie et Slovaquie) avaient aussi exhorté, dans une lettre commune, Bruxelles à s’opposer fermement à ce projet unilatéral afin d’éviter les barrières commerciales et de maintenir l’intégrité du marché unique. Alors que Dublin vient de notifier son projet à l’OMC, Ignacio Sánchez Recarte estime que « seule la Cour de Justice de l’UE serait maintenant en mesure de retoquer cette initiative ».

 

LOA : une évolution du statut du fermage est nécessaire, insiste la SNFM

La SNFM (section nationale des fermiers et métayers, FNSEA) soutient une évolution du statut du fermage dans le cadre du pacte et de la loi d’orientation et d’avenir agricoles (LOA), a-t-elle expliqué le 7 février. Sa position repose sur un projet de réforme, conclu en septembre 2021 avec la SNPR (propriétaires, FNSEA), qu’il faudrait « reprendre tel quel », a déclaré le secrétaire général Patrice Chaillou. Marc Fesneau, dans un entretien le 5 juillet dernier, avait pourtant assuré qu’« il n’est pas question de toucher au statut du fermage » dans le cadre de la LOA. L’accord FNSEA de 2021 vise à limiter les contentieux, inciter les propriétaires à mettre à bail, tout en facilitant l’installation des jeunes dits « hors cadre familial ». Une proposition de loi sur le régime juridique du bail rural a depuis été déposée le mois dernier par le député Jean Terlier (Renaissance). « On n’est pas tout à fait d’accord » avec ce texte, a indiqué Sébastien Delafosse, membre du conseil d’administration. La SNFM exprime des divergences sur plusieurs articles : le maximum de trois renouvellements possibles par bail de neuf ans, l’autorisation de sous‑location temporaire pour certaines cultures, le défaut d’entretien du fonds comme motif de résiliation d’un bail.

 

Huile de palme : une start-up américaine propose une alternative in-vitro issue de levure

Après quatre années de recherche et développement, l’entreprise de biotechnologies américaine C16 Biosciences a lancé la commercialisation d’une solution de remplacement de l’huile de palme, rapporte un article de la BBC paru en janvier, repéré par nos confrères des Marchés. Baptisée « Palmless », cette huile est fabriquée à partir d’une levure – la Metschnikowia pulcherrima – ayant la capacité de convertir une partie de sa biomasse en huile, et ayant des propriétés similaires à celles de l’huile de palme, selon C16 Biosciences. Pour ce faire, la levure en question est nourrie avec du sucre de canne issu de plantations d’ores et déjà utilisées à cette fin. « Notre processus prend moins de sept jours », précise une porte-parole de l’entreprise américain à la BBC. « Dans le cas d’un palmier […], l’arbre atteint son pic de production sept ans après sa plantation ». Pour l’heure, C16 Biosciences collabore avec des entreprises de cosmétiques et de produits d’entretien ménager. « Nous envisageons de nous lancer dans l’agroalimentaire en 2024 », ajoute la porte-parole. Selon l’ONG WWF, les surfaces agricoles consacrées aux palmeraies n’ont cessé de croître ces dernières années, passant de 3,34 Mha en 2000 à 5,3 Mha en 2020, avec des conséquences pour l’environnement et les populations autochtones.

 

Finance : recapitalisée, Sofiprotéol continuera d’investir dans les filières animales

À l’occasion de sa conférence de presse annuelle le 7 février, l’entreprise de financement et de développement Sofiprotéol (groupe Avril) a affirmé vouloir poursuivre ses investissements dans les filières animales. « 40 % de son portefeuille y sont consacrés », a précisé Xavier Dorchies, d.g. délégué de Sofiprotéol. Depuis 2021, le groupe Avril s’est séparé de ses activités œufs et viande de porc. De son côté, Sofiproteol n’a « a priori pas de priorités sectorielles », selon M. Dorchies. En 2023, Sofiprotéol affirme vouloir soutenir l’ensemble de la chaîne de production, de l’amont à l’aval, avec par exemple des investissements dans la santé animale et vétérinaire ou encore la nutrition animale pour ce qui concerne la filière de l’élevage. Malgré une année qui « s’ouvre avec une visibilité limitée sur les prix des matières premières et de l’énergie, et une volatilité des cours », Sofiprotéol anticipe par ailleurs « des possibilités de reprises des projets suspendus ou reportés en 2022 ». Xavier Dorchies estime ainsi que « l’année 2023 sera dynamique en matière de besoins de financements des entreprises ». Après une augmentation de son capital de 100 M€ en 2017, l’entreprise a annoncé en septembre dernier avoir augmenté son capital de 145 M€ afin de « soutenir ses capacités d’investissements ».