Journée internationale des droits des femmes
3 femmes qui ont fait Chalon-sur-Saône et mises à l'honneur

Frédéric RENAUD
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À l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes célébrée ce 8 mars, la ville de Chalon avait rendu hommage en 2021 à des personnes d’exception en dévoilant leurs visages dans le mobilier urbain de la ville. Voici trois portraits de ces femmes qui, encore aujourd’hui, font la fierté de la ville. Trois femmes, trois visages : déesse, soignante et résistante.

3 femmes qui ont fait Chalon-sur-Saône et mises à l'honneur
Nous l'avons peut-être croisée à Chalon-sur-Saône... La résistante Jeannette Guyot avait choisi de mener sa vie sans solliciter les honneurs qu'elle méritait. Illustration fournie par la Ville de Chalon-sur-Saône.

La résistante Jeannette Guyot avait choisi de mener sa vie sans solliciter les honneurs qu’elle méritait. Au lendemain de sa mort, en 2016, les journaux britanniques et américains réservaient une place de choix dans leurs colonnes pour saluer la mémoire de l’une des résistantes les plus décorées de la Seconde Guerre mondiale. Sa disparition a hélas eu moins d’écho en France.

Née en février 1919 à Chalon, Jeannette Guyot, fille d’un négociant de bois et d’une couturière, hérite de ses parents d’un sens aigu du patriotisme. Elle n’a que 21 ans quand elle intègre un réseau clandestin de la Résistance. En possession d’un Ausweiss (un laissez-passer en allemand), elle aide des civils à franchir la ligne de démarcation pour rejoindre la zone libre. Elle devient agent de liaison à l’été 1941, chargée de transmettre toutes les informations pouvant être utiles à la France libre. Sa mission s’interrompt brusquement début 1942, lorsqu’elle est arrêtée. Malgré les interrogatoires, elle ne livre rien aux Allemands qui la relâchent après trois mois de détention.

En fuite et recherchée par la Gestapo, alors que les Allemands occupent la "zone libre", elle est exfiltrée pour Londres, en mai 1943, avant d’entrer dans les forces françaises libres (FFL) sous le pseudonyme de Jeannette Gauthier. Elle est alors formée aux techniques de renseignement militaire en vue du plan Sussex, une opération qui compile des informations afin de préparer le débarquement en Normandie.

Parachutée pour préparer le débarquement

Au début de l’année 1944, Jeannette est promue lieutenant. Le 8 février, elle est parachutée dans le Val-de-Loire, avec la mission de repérer des zones de parachutage et des planques sûres pour les agents du plan Sussex. Malgré les risques et les difficultés, son équipe trouve des dizaines de logements. À Paris, dans Montmartre, le lieutenant Guyot réussit à cacher un opérateur radio au « Café de l’Électricité », situé à deux pas… d’un bureau de la Gestapo ! La mission de Jeannette Guyot prend officiellement fin le 25 août 1944, au terme de la libération de Paris. Peu après, elle apprend la déportation de ses parents en Allemagne au cours de l’année précédente. Si sa mère est finalement libérée, son père n’en reviendra pas.

En juin 1945, Jeannette quitte définitivement le monde du renseignement. Elle épouse un agent du plan Sussex et revient en Bourgogne s’installer à Sevrey. Restée très discrète dans la sphère publique quant à son rôle déterminant au sein de la France libre, Jeannette Guyot s’est éteinte le 10 avril 2016, à l’âge de 97 ans.

Une stratège religieuse

Autre mise à l’honneur à Chalon, la mémoire de Sœur Leschenault. Cette religieuse, issue d’une noble famille chalonnaise, fut la mère supérieure des sœurs de Sainte-Marthe, à l’hôpital des pauvres malades de Chalon de 1787 à 1822.

Pendant la Révolution, elle sut user de persuasion auprès de ses compagnes afin que celles-ci cessent de porter l’habit religieux, pour pouvoir continuer à soigner les malades. Car ces vêtements étaient interdits sous la Terreur (1793-94), un état d’exception institué pour endiguer militairement, politiquement, et économiquement la crise multiple à laquelle le pays est alors confronté.

En 1805, profitant de la visite du pape Pie VII qui séjournait à Chalon et visitait I’hôpital, elle demanda à pouvoir à nouveau porter l’habit. Elle négocia également de nouveaux statuts pour les « Dames desservant l’hospice des malades de Chalon-sur-Saône », qui furent approuvés par décret en 1811 : celles-ci ne sont plus encadrées par le pouvoir municipal, mais continuent à soigner les malades bénévolement à Chalon jusque dans les années 1980.

Une figure féminine mythique

Enfin, et même si ce n’est pas une femme mais plutôt une figure féminine mythique, Souconna ou Sagona est la déesse associée au culte de l’eau et des rivières. Cette figurine féminine symbolise la place essentielle de la ressource en eau dans le quotidien des peuples anciens qui a entraîné une déification de la rivière.

À Chalon, ce n’est qu’au début du 20e siècle qu’a été trouvée une référence physique à cette déesse. En 1912, lors de travaux dans la rue au Change, une stèle est découverte près de l’enceinte gallo-romaine. Remployé dans les fondations de la muraille défensive, ce bloc de calcaire s’avère être le socle d’une statue dédiée à la Saône divinisée.

Cette stèle, exposée au musée Denon, porte une inscription que l’on peut traduire par « Sous la protection d’Auguste, les habitants de l’oppidum de Chalon ont eu soin d’élever ce monument à la déesse Souconna ». Il s’agit du premier témoignage gravé dans la pierre des noms antiques de Chalon (Cabillonnum) et de la Saône (Souconna).