Cave de Lugny
Ce monde où la routine n’existe pas

Françoise Thomas
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L’assemblée générale de la cave de Lugny s’est tenue vendredi 1er avril à Péronne. Malgré un contexte de volume de vente et de niveau de prix tout à fait corrects, les situations sanitaires, climatiques et géopolitiques donnent un bilan et des perspectives tout en contraste.

Ce monde où la routine n’existe pas

Forcément ce vendredi 1er avril, l’amère expérience de l’an passé était dans toutes les têtes : « 2021 avait bien commencé, a ainsi rappelé Marc Sangoy lors de son rapport moral. Mais voilà, dans ce monde, la routine n’existe pas et une semaine après notre assemblée générale, nous connaissions un épisode de gel sans précédent ».
La veille d’un week-end s’annonçant particulièrement gélif et donc très à risque pour les vignes, le président de la cave de Lugny espérait ne pas avoir à « réécrire ses mêmes lignes l’an prochain » …
En avril 2021, aucun système de protection n’a fonctionné, si ce n’est le système assurantiel. « Un nouveau système sera testé pour la récolte 2023, à voir s’il sera efficace et abordable par tous financièrement… ».

Des planètes alignées

Le président de Lugny a surtout milité pour un ensemble d’évolutions : « l’augmentation des rendements buttoir, profitons de ce que donne la nature », mais aussi « la baisse de la densité » en passant « de 7.000 pieds à 5.000 pieds hectare ». « Cette fois, les planètes ont l’air de s’aligner », a-t-il poursuivi, avec comme avantages une gestion facilitée des maladies, de l’entretien du sol, moins de sensibilité au gel et à la sécheresse, moins de besoins de main-d’œuvre « mais toujours la qualité des vins ». Et de même, poursuivre les recherches sur les cépages et les porte-greffes, évoluer dans les types de taille. « La durabilité de notre vignoble est à rechercher dans toutes ces solutions et pas dans les indemnités calamités », a martelé Marc Sangoy.

Records battus

Loin de la routine, les chiffres mis en avant ont été ceux de la récolte 2020, quasi pleine, avec 84.300 hl… qui seront donc très différents de ceux de 2021. En attendant, force est de constater que 2021, avec un chiffre d’affaires à 36 millions d’euros « dans la moyenne », n’a pas été synonyme de « crise pour l’activité commerciale », comme l’a souligné le directeur de la cave Édouard Cassanet. « À en croire les économistes, nous aurions dû être à genoux », entre le Brexit, « la taxe Airbus » et « le coup de grâce des deux années Covid ». Contre toute attente, l’un des moteurs des performances de la cave a été l’exportation avec une augmentation de +13 %, « nous avons battu des records avec un chiffre d’affaires de 15 millions d’euros réalisés à l’export ».

Par ailleurs, autre preuve des belles performances des volumes vendus : les 6,6 millions de bouteilles écoulées. « Nous avions fait mieux en 2012 avec 8 millions de bouteilles, mais elles étaient moins bien valorisées », faisant souligner à Marc Sangoy « l’objectif atteint en matière de valorisation des produits ».

Beaucoup d’incertitudes

Reste que 2021 est marquée par « la petite récolte », un manque à gagner en partie répercuté sur les prix de vente (+ 20 à + 25 %) « globalement accepté, même si c’est plus difficile sur le marché français ». C’était sans compter sur un coût de l’énergie qui « s’emballe à son tour depuis décembre et surtout ces dernières semaines », compte tenu du contexte géopolitique actuel…

Aux répercussions financières, se profile également « un souci dans la disponibilité des matières sèches », verre, carton, capsules, etc.

Une dynamique malgré tout

Vignerons engagés depuis 2014, la cave de Lugny poursuit donc sa « démarche d’innovation continue depuis 1997 » a-t-il été rappelé.

La première récolte bio sur le Domaine de la Croix Salain a eu lieu en 2020. Le groupe biodiversité compte désormais une douzaine d’exploitations. Ce GIEE labellisé en juillet 2020 a vu son premier projet aboutir à l’automne dernier avec la sortie de la cuvée Pie Masquée, proposant notamment une écoconception de la bouteille et de l’emballage. Un nouveau sentier "balade en Brinchamp" sera proposé pour cet été. Un inventaire de la faune et de la flore présente chez les coopérateurs sera proposé d’avril jusqu’à la fin de l’été. D’autres démarches autour des couverts végétaux et des plantations d’arbres et de haies se poursuivent au sein de la cave.

 

En bref

Une extension de territorialité a été votée en AG et est en attente de validation auprès du Haut conseil à la coopération agricole (HCCA) et concerne les communes d’Igé, Viré et Royer.

Les stocks à la clôture de l’exercice font état de 100.000 hl (dont 53 % de 2021), contre 117.000 un an auparavant (dont 67 % de 2020).

Le système calamités, ouvert aux non-assurés, a permis le versement de 8 millions d’euros à 300 exploitations du département.

Édouard Cassanet part à la retraite en fin d’année 2022 après 25 ans à la direction de la cave.

Le groupe jeunes fourmille également d’idées et propose un "afterwork" tous les premiers jeudis du mois à la cave. Leur grand projet est le concert du 2 juillet avec à l’affiche deux artistes de la scène nationale.