Prédation
Loup : quels effets sur la santé des éleveurs ?

Françoise Thomas
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Depuis 2010, les agents de la MSA se mobilisent dans les territoires afin d’accompagner les éleveurs en vue de prévenir des risques psychosociaux. Sous l’impulsion de plusieurs caisses régionales, la Caisse centrale de la MSA a décidé de financer une étude sur deux ans afin de mieux rendre compte de l’expérience vécue par les éleveurs soumis à la prédation, la manière dont ils la perçoivent et l’impact sur leur santé. Une étude confiée à l’Inrae, dont en voici les grandes lignes.

Loup : quels effets sur la santé des éleveurs ?
image d'archive

Si les attaques « constituent l’aspect le plus visible de la prédation et font l’objet d’une forte médiatisation » servant à interpeller opinion publique et services de l’État sur la réalité de la situation, elles ne doivent pas faire oublier que « l’indignation et l’abattement des éleveurs sont bien réels ».

L’antériorité de la présence du loup et la prise de conscience finalement très progressive des conséquences confirment ce constat de l’Inrae selon lequel « les éleveurs et bergers ne se sentent pas véritablement concernés tant qu’ils n’ont pas été victimes de la prédation ». Dans les entretiens menés dans le cadre de l’étude, plusieurs éleveurs ont en effet rapporté « qu’il faut le vivre pour être tout à fait conscient de ce qu’est une attaque de loup ». Ainsi les attaques vécues par les collègues n’empêchent « en rien de vivre la première prédation comme une expérience traumatisante ».
L’Inrae souligne ainsi que « l’angoisse est le sentiment qui prédomine le plus largement » parmi les éleveurs interrogés, qui ont par ailleurs « le sentiment d’être seuls face à cette menace constante ».

Sentiment de vulnérabilité

Certaines situations géographiques augmentent le sentiment de vulnérabilité chez les éleveurs. Comme par exemple le fait d’avoir ses troupeaux plutôt en lisières, dans des forêts, sur des crêtes. De même, les conditions météo comme les jours de brouillards et la nuit augmentent là aussi le stress ressenti.

Pour l’Inrae, « le fait que l’éleveur se trouve sur une zone de colonisation récente ou plus ancienne détermine pour partie la vulnérabilité du professionnel ».

Enfin, il ressort que les attaques de loups font davantage de victimes et de dégâts lorsque les jeunes loups apprennent à chasser et donc tuent beaucoup plus « gratuitement ».

Autant de situations qui ressortent de l’étude comme sources d’amplification des effets de la prédation sur la santé des éleveurs. Leur « sommeil s’en trouve affecté » et ils ont « le sentiment de ne pas maîtriser la situation ».

L’un des derniers points à noter est que le degré de vulnérabilité semble dépendre aussi « du degré d’intégration dans leur métier [et de] l’impossibilité de lâcher prise par exemple ». L’étude étaye cet élément en citant qu’« un éleveur qui accède au métier par la voie familiale, et qui donc se sent investi d’une mission de préservation de l’installation, verra sa responsabilité d’autant plus grande en présence d’un contexte de prédation ».

L’Inrae résume ainsi les conséquences de la prédation sur la santé des éleveurs : « la nature des souffrances des éleveurs soumis à prédation varie en fonction du contexte technique mais aussi des propriétés sociales ».

 

Lien vers l'étude

Cette étude est consultable ci-après etude_inrae_-_predation_et_sante_des_eleveurs.pdf