EXCLU WEB : Neutralité carbone : l’agriculture aux avant-postes

Au cours des trente prochaines années, la production d’électricité française devra augmenter d’au moins 35 %. Une grande partie de cette électricité 100 % renouvelable sera produite en zone rurale et sera même d’origine agricole. Il faudra également respecter l’objectif « zéro artificialisation nette » de terres agricoles et compenser la consommation d’hydrocarbures fossiles compensée par du stockage de carbone organique dans le sol.

EXCLU WEB : Neutralité carbone : l’agriculture aux avant-postes

La neutralité carbone de l’économie française impose la reconstruction de l’appareil productif autour de solutions bas carbone. Pour le faire fonctionner, notre pays devra produire d’ici 2050, 35 % d’électricité en plus qu’aujourd’hui, selon le rapport « Futurs énergétiques 2050 » rendu public par Réseau de transport électrique (RTE). Mais si la France s’engage dans un vaste programme de ré-industrialisation, en relocalisant une partie de ses activités de production et en créant de nouvelles filières, notre pays devra se doter de nouvelles centrales nucléaires et, d’un parc d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques pour produire jusqu’à 60 % d’électricité de plus qu’actuellement.

L’agriculture française sera aux avant-postes pour rendre l’économie française neutre en carbone. Les nouveaux parcs d’éoliennes seront édifiés dans les champs, les toits de bâtiments seront couverts de panneaux photovoltaïques et des méthaniseurs produiront de l’électricité par cogénération 100 % renouvelable. Enfin, la majorité des agriculteurs sera engagée dans des programmes de stockages de carbone organique dans le sol. La contribution de l’agriculture pour rendre l’économie française neutre en carbone sera aussi foncière. Produire plus d’électricité nécessitera la construction de nouvelles centrales électriques et l’édification de pilonnes pour accrocher les éoliennes. L’installation de panneaux photovoltaïques au sol condamnera des milliers d’hectares jusqu’alors dédiés à la production agricole.

Co-usages des sols 

Néanmoins, « le développement des énergies renouvelables est a priori compatible avec l’objectif de zéro artificialisation nette de la loi Climat et résilience promulguée à l’été 2021 », défend RTE. Tout d’abord parce qu’une partie du nouveau parc éolien et de panneaux photovoltaïques pourrait être édifié sur des terrains déjà artificialisés et sur des fiches industrielles délaissées. Ensuite parce que les possibilités de « co-usages des sols » seront nombreuses. L’implantation de pylônes éoliens n’empêche pas de cultiver des terres. Enfin, les bâtiments équipés de panneaux conservent leur fonctionnalité. L’incidence sur l’occupation des terres serait extrêmement réduite et dans certains cas nulle. En conséquence, seul le co-usage de l’espace situé sous les panneaux solaires posés au sol sera limité. A moins d’élaborer des modèles spécifiques d’agrivoltaïsme qui associeraient pâturage et certaines cultures possibles à la production d’électricité photovoltaïque.

Finalement « les nouvelles surfaces artificialisées dédiées à la production électrique représenteraient de l’ordre de 20 000 à 30 000 hectares d’ici 2050 », assure RTE. Pour rappel, le réseau routier a rendu plus d’un million d’hectares de terres inexploitables. A ce jour, l’ensemble des centrales nucléaires françaises est construit sur 4 400 ha et le réseau de transport d’électricité repose sur 4 000 hectares des surfaces artificialisées.

Dépendance

Toutefois, les surfaces artificialisées seraient multipliées par cinq si la France renonce à la production d’électricité d’origine nucléaire d’ici 2050-2060. En effet, davantage de parcs éoliens et de panneaux photovoltaïques au sol seraient alors construits. En effet, la construction d’une nouvelle centrale nucléaire (0,03 – 0,06 ha/MW) artificialise 20 à 30 fois moins de terre que celle d’un parc photovoltaïque au sol. Quel que soit le scénario retenu, la part incompressible de gaz à effet de serre émis en 2050 (un peu moins de 100 millions de tonnes de CO2) serait en grande partie d’origine agricole, selon le rapport de RTE « Futurs énergétiques 2050 ». Mais cette émission serait largement compensée par les nombreux programmes de stockage de carbone organique dans le sol, lancés à grande échelle, sur le modèle de France Carbon Agri. En effet, l’agriculture française sera toujours « hydrocarbure-fossile-dépendante ». Une partie du parc français de véhicules lourds alors en circulation resterait majoritairement consommateur de gasoil ou de GNR, selon RTE. Les tracteurs et les moissonneuses en feront partie. Toutefois, « l’hydrogène bas-carbone a vocation à se développer dans le secteur de la mobilité lourde », défend RTE.