Foire gastronomique de Dijon
« Les foires sont les lieux de la fierté réaffirmée des agriculteurs »

Berty Robert
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Marc Fesneau, le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, est venu inaugurer la Foire gastronomique de Dijon. L’occasion, pour lui, de s’exprimer sur des sujets agricoles nationaux et d’autres, propres à la région.

« Les foires sont les lieux de la fierté réaffirmée des agriculteurs »

Marc Fesneau aime les foires. Le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire ne s’en est pas caché, lors de sa venue, le 1ᵉʳ novembre, à l’inauguration de la Foire gastronomique de Dijon : « Je suis toujours intéressé par ces évènements. On y rencontre l’ensemble des filières alimentaires. Les foires sont les lieux de la fierté réaffirmée des agriculteurs. C’est important dans notre pays qui a parfois tendance à dénigrer son agriculture. Il faut prendre en compte ce qu’est sa qualité, sa forte charge patrimoniale et culturelle. On doit en être fiers ! » De fait, on sent le ministre à l’aise dans l’exercice de la déambulation parmi les stands, en compagnie des élus locaux (François Rebsamen, maire de Dijon, François Sauvadet, président du Conseil départemental de Côte-d’Or, Christian Morel, vice-président de la Région en charge de l’agriculture). Après avoir découvert le projet de transition alimentaire ProDij porté par la métropole dijonnaise, il a arpenté les allées de ce grand rendez-vous populaire annuel.

« Sur le bio, la commande publique doit être un levier »

C’est là, notamment, qu’il a échangé avec Laurence Henriot, éleveuse bio de Côte-d’Or et présidente de Bio Bourgogne-Franche-Comté, sur les difficultés rencontrées actuellement par ce secteur : « dans ce contexte de crise, soulignait-il, je veux saluer l’engagement des collectivités autour des produits locaux et bio. La commande publique doit être un levier et il y a des collectivités qui parviennent à atteindre les objectifs fixés par la loi Egalim. L’État doit aussi faire sa part : on va déployer, d’ici à la fin de l’année, les objectifs d’Egalim dans les cantines de l’État. S’ils sont atteints, cela représentera 120 M d’euros. Les produits bio ont une valeur importante, on en a besoin dans le cadre de notre trajectoire carbone. Le plus gros risque pour le bio, ce sont les déconversions. Il faut aussi que la grande distribution se remette en question et prenne ses responsabilités : quand le marché allait bien, du bio, il y en avait plein les rayons, ils ont surmargé à l’époque, c’était un peu la poule aux œufs d’or. Maintenant que les choses vont plus mal, je les trouve beaucoup moins présents, or, on sait qu’en grande distribution, l’exposition des produits, c’est la vente ! Il faut aussi changer l’approche de communication sur le bio : on doit porter une stratégie différente, qui ne soit pas une stratégie d’opposition avec les autres agricultures. On a l’impression qu’en France, on se croit obligé de taper sur l’autre pour se valoriser. Je pense que c’est très mauvais. On doit avoir une communication offensive, il faut tuer cette idée préconçue que le bio serait toujours plus cher ». Marc Fesneau rappelait aussi le soutien apporté à la filière : « Nous avons mis en place un système de soutien d’un total de 70 M d’euros pour sauver les agriculteurs bio les plus en difficultés. Nous verrons les reliquats que nous aurons sur la Pac, concernant les conversions en bio qui seront moins nombreuses que prévu. Nous devons regarder en priorité comment consolider ceux qui se sont déjà convertis. Je crains le risque de déconversion. On est confronté à une crise de croissance : elle peut vous tuer, mais on peut aussi en tirer une expérience pour sauver ceux qui sont en difficulté et ne plus se laisser berner par l’idée que 12 % de croissance par an – ce qui était observé avant la crise – ça ne peut pas durer tout le temps : les arbres ne montent jamais jusqu’au ciel… ».

« Résoudre la question avec la Région, pas contre elle »

Inévitablement, dans la capitale de la Bourgogne-Franche-Comté, le ministre ne pouvait éviter le sujet de la gestion du fonds Feader par la région, qui suscite actuellement des tensions vives : « il y a manifestement quelque chose qui dysfonctionne, déplorait-il, et qu’il va falloir qu’on résolve, avec la Région et pas contre elle. Nous avons un problème d’instruction des dossiers, de paiement, de dialogue, d’information des agriculteurs. La Bourgogne-Franche-Comté est la seule région dans cette situation. Il ne sert à rien de nier la réalité, et il faut tenter de résoudre ce problème. L’État a repris une partie des dossiers en instruction, nous sommes prêts à mettre des moyens supplémentaires pour traiter d’autres dossiers. Il n’est pas acceptable que des jeunes ne puissent pas s’installer parce qu’ils attendent l’accusé de réception d’un dossier. Je n’accepterai pas non plus que l’on renvoie de l’argent à Bruxelles, par le biais de la règle dite du « Dégagement d’office », (des crédits européens perdus faute d’avoir été consommés dans les délais impartis, N.D.L.R.). J’ai besoin de la présidente de Région BFC pour qu’on trouve un chemin permettant de sortir de cette situation ».

Le congrès mondial du vin à Dijon
Marc Fesneau, en compagnie de François Rebsamen, le maire de Dijon, a l'issue de sa découverte de la foire gastronomique.

Le congrès mondial du vin à Dijon

François Rebsamen, le maire de Dijon, a remercié Marc Fesneau de son appui pour que Dijon, qui accueille le siège de l'Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), soit aussi le lieu choisi pour l'organisation, en octobre 2024, du 45è Congrès mondial du vin, qui marquera le centenaire de l'OIV. Un événement qui rassemblera plus de 2 000 experts du vin provenant de cinquante pays. « Ce sera un formidable moment de mise en valeur des vins de Bourgogne » a souligné le ministre.

Le glyphosate, une question « totémique »
Pendant sa découverte des stands de la Foire gastronomique, Marc Fesneau a pu échanger avec Laurence Henriot, éleveuse bio de Côte-d'Or et présidente de Bio Bourgogne-Franche-Comté, sur les difficultés que traverse actuellement la filière.

Le glyphosate, une question « totémique »

Interrogé sur l’incompréhension exprimée par une partie du monde agricole sur l’abstention de la France, lors d’un vote intervenu début octobre à la Commission européenne, sur la ré-homologation du glyphosate, Marc Fesneau a eu la réponse suivante : « je ne comprends pas pourquoi cela est perçu comme une contradiction. Le glyphosate est un sujet « totémique » : on doit être pour ou contre. Les écologistes veulent l’interdire totalement, sans expliquer où sont les alternatives et, presque en réaction, une partie du monde agricole a demandé la ré-homologation, sans restriction d’usage. Mais la France a montré qu’on pouvait réduire l’utilisation du glyphosate sans créer de distorsion économique majeure, y compris par des mécanismes d’accompagnement fiscaux. Le texte de la Commission européenne plaidait pour une ré-homologation pour dix ans, tous usages et sans aucune restriction. Il faut avoir conscience de l’image que cela donnerait auprès de l’opinion publique. Sur ce sujet, l’histoire est plutôt une marche en avant qu’une marche en arrière. Je ne dis pas pour autant aux agriculteurs que nous avons des alternatives sur tout : on sait qu’en agriculture de conservation des sols ou en cultures pentues, sans glyphosate, on ne sait pas faire, mais le monde agricole doit aussi entendre que, lorsqu’on a une trajectoire de réduction, on doit s’y inscrire ».