Agronov
Innovations A la recherche du compromis entre préservation du sol et optimisation de son potentiel

Berty Robert
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La seconde édition de la journée Sol et Biosolution, organisé par le Pôle régional d'innovations en agroécologie Agronov a permis d'aborder les équilibres fragiles permettant de conjuguer préservation des sols et optimisation technico-économique. Un domaine où il n'existe pas de solution simple et toute faite...

Innovations A la recherche du compromis  entre préservation du sol  et optimisation de son potentiel
Les participants à la table ronde d'Agronov sur le thème « Préservation du sol et optimisation technico-économique : comment allier les deux ? », de gauche à droite : Sylvain Pabion (Château de Marsannay), Romain Tscheiller (Arvalis), Vincent Vaccari (Alliance BFC) et Battle Karimi (Novasol Experts).

Le domaine du sol et des biosolutions est en évolution permanente et rapide. La journée que lui consacre depuis deux ans le pôle régional d’innovation en agroécologie Agronov, à Bretenière, près de Dijon, représente le moyen de faire le point sur ces évolutions. Sa dernière édition avait lieu le 16 novembre et abordait notamment une question fondamentale : comment allier la préservation du sol et l’optimisation technico-économique. Quels leviers sont possibles pour permettre aux sols d’assurer leurs fonctions tout en maintenant une qualité de l’air et de l’eau acceptable et en limitant l’érosion, le tassement ou les pertes d’éléments nutritifs ? Pour Battle Karimi, directrice scientifique au sein du bureau d’études Novasol Experts, « la préservation des sols est une affaire de long terme, pour produire aujourd’hui mais surtout pour demain. C’est nécessaire parce que la qualité d’un sol est multifactoriel ce qui complexifie les choses ».

Bons et mauvais côtés des couverts végétaux

Il est permis de s’interroger sur la compatibilité des notions de préservation du sol et ses capacités de rendement. « Il faut y remettre de la matière organique, soulignait Sylvain Pabion, responsable d’exploitation viticole au château de Marsannay, lutter contre l’érosion et donc maintenir les sols couverts ». Une affirmation nuancée par Vincent Vaccari, technicien d’expérimentation au sein d’Alliance BFC (qui regroupe Dijon Céréales, Bourgogne du Sud et Terre Comtoise) car, de son point de vue, les couverts pompent aussi une bonne partie de l’humidité du sol et n’ont pas que des impacts positifs.

S’appuyant sur la complexité liée à toute volonté de préserver les sols, Battle Karimi confirmait que les meilleures intentions du monde n’ont pas toujours les effets attendus : « laisser la nature faire à 100 % n’est pas toujours la meilleure solution. Il faut de la vérification et de la confirmation, du suivi, pour valider les choix ou intervenir. On doit réfléchir au choix des couverts, à la manière dont on les implante et dans quelle zone géographique parce que qui est bon à un endroit, ne l’est pas forcément à un autre ». En fait, aux yeux de Romain Tscheiller, ingénieur de recherche chez Arvalis, il importe de ne pas mettre la charrue avant les bœufs et de se demander ce qu’on attend de son sol avant de raisonner ses pratiques. Il faut aussi combiner plusieurs solutions. Ainsi, au château de Marsannay, si on a recours aux couverts végétaux, on a aussi mis un terme au brûlage des sarments et on utilise du fumier composté.

Et le travail du sol ?

Il est également important de s’interroger sur les retours en azote et phosphore que les couverts végétaux peuvent apporter : « tout dépend des pratiques, souligne Vincent Vaccari, qui peut s’appuyer sur 13 ans d’expérience de semis directs opérés sur la ferme de Fromenteau, en Côte-d’Or : broyage, incorporation dans le sol, ou couvert laissé sur le sol : le retour peut être très différent. À Fromenteau, on constate très peu de retours. Néanmoins, avec de l’apport de fumier, on a noté des effets bénéfiques. L’idéal, c’est peut-être de combiner amendements et couverts ».

Dans cette thématique de la préservation du sol, tout en maintenant son optimisation technico-économique, on ne peut éviter d’aborder le travail du sol. Là encore, il faut éviter les schémas simplistes : « certains sols ont besoin de labour, confirme Battle Karimi, il faut réfléchir sur un itinéraire technique global pour contrebalancer les effets négatifs du labour ». Ce qui apparaissait en conclusion de ces échanges, c’est que la réponse unique n’existe pas. Il faut de l’accompagnement pour les agriculteurs qui souhaitent raisonner leurs pratiques et surtout, chercher des solutions qui s’avèrent pertinentes à l’échelle d’un territoire donné et de ses caractéristiques propres. L’allongement des rotations peut aussi être un facteur très favorable au bon compromis entre optimisation et préservation mais, au final, entre travail du sol, couverts, ou amendement, il n’existe pas de réponse toute faite. Tout doit passer par du raisonnement et de la nuance.