Accès au contenu
19ème Forum œnologique de Davayé

Les stratégies de certification au cœur des échanges lors du 19ème Forum œnologique de Davayé

Le 4 février dernier, le 19ème Forum œnologique de Davayé a permis de se pencher sur un sujet qui prend de plus en plus d’importance dans le quotidien des entreprises viti-vinicoles. A savoir la certification avec un indispensable arbitrage à réaliser entre avantages et contraintes.

Les stratégies de certification au cœur des échanges lors du 19ème Forum œnologique de Davayé

Le Forum œnologique de Davayé a de nouveau permis de se pencher sur un thème qui interroge autant qu’il peut (parfois) inquiéter. En l’occurrence la certification et les stratégies inhérentes. Lors du 19ème opus d’un événement organisé par l’Union des Œnologues de France région Bourgogne Centre-Est, Nathalie Leborne, qualiticienne au sein d’Alpha Omega Consult, structure de conseil et d’audit basée à Châtenoy-le-Royal, a rappelé les objectifs de son entreprise. A savoir accompagner ses clients dans leurs projets d’amélioration continue en leur proposant des outils adaptés et pragmatiques entre rigueur et efficacité, éthique et déontologie, bien-être et dynamisme, avec une grande écoute dudit client. A ses yeux, il convient de faire des normes un véritable outil de travail et d’aller au-delà du côté contraignant. Ainsi, le secteur viticole évolue dans un contexte économique, sociétal, environnemental et légal complexe auquel est associée une multitude de normes entre qualité, santé, sécurité ou encore environnement. Des normes, publiques ou privées, qui peuvent aider les entreprises à répondre à l’ensemble des thématiques en apportant des méthodes structurantes.

Démarches volontaires… pour l’instant

Pour sa part, Valérie Lempereur, de l’IFV- Sicarex Beaujolais, s’est intéressée à la certification Haute Valeur Environnementale (HVE) et son application au domaine de l’Eclair dans le Beaujolais. L’occasion de rappeler que cette certification est une démarche volontaire pour l’instant et qu’elle est multifilière. Pour la viticulture, cela ne concerne que la vigne mais pas la transformation. Lors des états généraux de l’alimentation, l’objectif fixé est d’atteindre le seuil de 50% d’exploitations viticoles certifiées HVE à l’horizon 2025. Pour aider à atteindre ce chiffre ambitieux, il y a notamment eu la création d’un guide de sensibilisation. Valérie Lempereur a rappelé ce qu’est cette certification entre origine du dispositif, particularités… Un dispositif progressif à trois niveaux, avec différentes options possibles. Force est de constater que de plus en plus d’exploitations sont certifiées HVE : 841 en janvier 2018, 1.518 en janvier 2019 et 2.272 en juillet 2019.

Pour sa part, Sophie Penavayre, de l’IFV- Sicarex Beaujolais, a présenté l’engagement dans la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) avec des exemples d’application. Une RSE qui est une démarche volontaire pour la majeur partie des entreprises mais obligatoire pour certaines très grandes sociétés (Pernod-Ricard, LVMH). Laquelle RSE s’organise autour de sept principes : respect des droits de l’homme, redevabilité, transparence, comportement éthique, prise en compte des normes internationales de comportement et respect du principe de légalité. Une RSE d’autant plus d’actualité au moment où la filière est montrée du doigt pour l’utilisation de produits phytosanitaires et pour une consommation jugée excessive d’alcool. Sans oublier la pérennité même des exploitations eu égard au rapport avec les riverains.

L’exemple champenois

Directeur vignes et approvisionnements chez Moët & Chandon, Vincent Malherbe a rappelé qu’avant les années 90, les priorités étaient notamment de réduire la main d’oeuvre et la pénibilité tout en augmentant les rendements. D’où l’utilisation des pesticides et fongicides, la réduction du travail des sols… Les années 2000 ont été marquée par un virage avec, notamment, l’arrivée de nombreux labels. Avec, en Champagne, le choix de la certification viticulture durable avec 125 exigences regroupées en 8 chapitres couvrant toutes les activités de l’exploitation. Après quelques années, décision a été prise en 2020 de réduire à 99 le nombre d’exigences et de simplifier afin de faciliter la compréhension et l’intégration de la HVE. En 2030, toutes les exploitations champenoises devraient être certifiées. A titre d’exemple, chez Moët & Chandon, les actions pour réduire les intrants ont permis d’obtenir des résultats significatifs. Aujourd’hui, dans cette entreprise, l’ensemble du vignoble Moët & Chandon (1.270 hectares) est certifié HVE depuis 2014. En ce qui concerne les apports extérieurs, un tiers des raisins est actuellement HVE. En 2024, on atteindra deux tiers et en 2028-2030 100 % des raisins.

Par la suite, Jean-Hugues Goisot, du domaine Jean-Hugues et Guilhem Goisot, a partagé l’expérience de son exploitation située dans l’Yonne. Disposant de 33 hectares de vignes dont 12 en repos, le domaine a mené une réflexion quant à son fonctionnement dans les années 90. Ce qui l’a amené à être certifié bio en 2000 et biodynamie en 2005. « La biodynamie nous permet d’appréhender la culture bio plus sereinement ». L’un des enjeux présents et à venir est relatif à une réelle inquiétude quant aux évolutions climatiques qui ont un impact fort, tout particulièrement en chardonnay. Le domaine a de plus en plus de difficultés au niveau de la vinification, avec « un équilibre de la vendange de plus en plus compliqué à trouver ». Dès lors, le domaine aimerait une évolution du cahier des charges au niveau de la vinification avec une fermentation alcoolique à assouplir pour pouvoir utiliser plus facilement des levures exogènes neutres.

Un engagement à long terme

En guise de conclusion de la matinée, Matthieu Mangenot, directeur technique adjoint au sein de la Maison Albert Bichot, a évoqué le retour d’expérience de son employeur au niveau de la certification. Avant 2000, la maison pratiquait une viticulture raisonnée. Par la suite, elle a ressenti le besoin de sécuriser l’amont. Sur les propriétés de Côte d’Or et de Saône-et-Loire, la Maison Bichot a des pratiques 100% bio depuis 2011. Elle est certifiée bio en 2014 et HVE afin de garantir la qualité des pratiques. Le fruit de plusieurs motivations tant qualitatives que d’image. Bien évidemment, la maison est conscience des différentes contraintes entre besoin de traction accrue, nombre de passages en hausse, réponses partielles à certains agresseurs, sollicitation accrue du personnel, contraintes sur la plan œnologique, coûts supplémentaires ou encore impact du cuivre et du soufre sur les écosystèmes. Encore mal connue par le grand public, la démarche HVE, qui n’apporte par de réelle plus-value commerciale, est par contre assez prisée de la grande distribution. Pour sa part, Albert Bichot incite fortement ses fournisseurs à être certifiés HVE. Plus récemment, elle est passée à la démarche RSE pour contribuer - au mieux - au développement durable de la société, consciente de demandes accrues de cette dernière.

Au final, les certifications apparaissent comme d’excellents outils permettant de garantir la sincérité des pratiques et d’apporter une satisfaction d’une partie des attentes des consommateurs.

Images