OS Mouton Charollais
Des ambitions pour son schéma génétique

Marc Labille
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L’organisme de sélection (OS) du Mouton charollais a tenu son assemblée générale le 28 septembre dernier à Charolles. À l’heure du nouveau règlement zootechnique européen, l’OS Mouton charollais lance plusieurs projets ambitieux.

Des ambitions pour son schéma génétique
De gauche à droite : Thierry Maréchal (21) et Jérôme Dubouis (23), vice-présidents ; Aline Bonnot, directrice ; Pascal Chaponneau, président ; Hugues Pichard, président de Charolais France et Alexandre Saunier, président de la section ovine de la FDSEA.

Initialement prévue au printemps dernier dans la Creuse, l’assemblée générale de l’OS Mouton charollais s’est finalement déroulée au siège de la race à Charolles en raison du covid-19. Ce sont les attaques de loup qui ont ouvert cette assemblée un peu particulière. Le premier carnage avait eu lieu en Saône-et-Loire il y a trois mois jour pour jour chez un adhérent de l’OS et depuis, ce sont au moins 110 ovins qui ont été tués et 50 blessés par le prédateur lors d’une trentaine d’attaques, comptabilisait Alexandre Saunier, président de la section ovine de la FDSEA (lire encadré). Avec leurs troupes conduites en petits lots disséminés dans le bocage charolais, les éleveurs-sélectionneurs de moutons charollais paient un lourd tribut à ces attaques d’un autre temps. Un fléau insupportable, qui génère du stress, du travail supplémentaire et des pertes dont il est bien difficile de faire prendre la mesure à des interlocuteurs qui méconnaissent la valeur génétique des animaux.

L’arrivée du loup en Saône-et-Loire marque un tournant pour l’élevage départemental à bien des égards. Et c’est sans doute aussi le début d’une prise de conscience nationale quant à la compatibilité de l’élevage herbager traditionnel avec une faune sauvage livrée à elle-même. Dans ce contexte, le Mouton charollais serre les dents, lui qui représente pourtant tout ce qu’il y a de plus vertueux par son mode d’élevage extensif et sa vocation à produire une viande de qualité.

1.000 brebis perdues en 7 ans !

Avec 104 adhérents pour la campagne 2019, le nombre d’élevages évolue peu depuis trois ans. En revanche, le nombre de brebis continue son érosion : 6.600 brebis contrôlées et inscrites. « En sept ans, ce sont mille brebis qui ont été perdues en base de sélection », faisait remarquer la directrice Aline Bonnot. Une tendance partagée par les autres races bouchères. La campagne 2020 suscite malgré tout un peu d’espoir puisque l’OS recense déjà huit nouvelles adhésions qui compensent largement les deux démissions. Un renouvellement des générations s’impose au regard de la pyramide des âges des adhérents, pointait Aline Bonnot. Un constat qui incite à prendre soin de ces jeunes qui font le choix de monter une troupe de moutons charollais. Dans cet ordre d’idée, un « groupe jeune » a vu le jour l’été dernier. Il propose d’insérer une commission jeune dans les statuts de l’OS.

Station SCI : on peut mieux faire !

Sur le plan commercial, le nombre de certificats d’origine édités est en baisse de -4,8 % correspondant à 4.500 animaux commercialisés sur le marché français. En termes d’export, ce sont 266 reproducteurs qui ont été vendus. À elle seule, la Belgique en a importés 201, suivie de l’Irlande, de la Suisse et de la Bulgarie.

En 2019, l’OS a connu une bonne vente de station de contrôle individuel (SCI) avec un taux de vente de 85 % et un prix moyen de 801 €, remémorait Aline Bonnot. En revanche, la directrice regrettait un manque d’implication des éleveurs-sélectionneurs dans l’outil station. En 2019, seulement 49 élevages ont participé à la SCI soit plus d’une quinzaine de moins que les années précédentes. Sur la centaine d’adhérents de l’OS, ils ne sont qu’une quarantaine à être des candidats « systématiques ou réguliers » à la station… « On peut mieux faire ! », concluait Aline Bonnot.

Plus de responsabilités, mais sans moyens…

L’actualité récente de l’OS a été l’embauche de Claire Debrut, jeune diplômée d’AgroSup Dijon qui vient en remplacement de Morane Cassotti en temps que cheffe de projets - technicienne. Outre Angélique Barthélémy au poste de secrétaire comptable, l’OS compte aussi un apprenti, Louis Genevois. Dans le courant de l’année 2019, Aline Bonnot et son équipe se sont attelées à l’application du nouveau règlement zootechnique européen (RZUE) en vigueur depuis novembre 2018. Cette réforme voulue par l’Europe se traduit par « plus de responsabilités aux OS mais sans moyens supplémentaires ! », résumait la directrice. Près d’une trentaine de contrats ont dû être signés avec chaque délégataire pour le contrôle de performances. Dans le Tarn, un éleveur est désormais suivi en direct, sans l’intervention d’un prestataire, confiait Aline Bonnot. Le principe repose sur le logiciel en ligne Ovitel et une autopesée.

L’avenir du programme de sélection en question

Pour conclure, la directrice a tenu à exposer plusieurs projets ambitieux. Depuis le mois de février dernier, l’OS Mouton charollais est impliqué dans un projet expérimental régional sur la vigueur des agneaux. Il s’agit de repérer d’éventuelles lignées plus vigoureuses que d’autres, présentait Aline Bonnot. Piloté par l’OS aux côtés des chambres d’agriculture 71 et 21, ce travail va mobiliser une vingtaine d’élevages qui devront noter les facilités de naissance, l’activité de l’agneau à la naissance, son poids, les tétées… Autre chantier qu’aimeraient bien engager les responsables de la race : réaliser un bilan complet de son programme de sélection. Car une « déconnexion » se révèle entre les sélectionneurs et les utilisateurs de la race, déplore la directrice. La base de sélection voit son rôle de locomotive s’affaiblir. Le programme de sélection doit être mieux expliqué et il mérite une réflexion sur ses perspectives d’avenir, argumentait Aline Bonnot. Première race diffusée en France, le mouton charollais répond à une diversité de systèmes. D’où l’idée d’explorer de nouveaux caractères comme le dessaisonnement ou le gène culard…

Dépôt d’une marque pour des agneaux 100 % Charollais

Depuis l’hiver, l’OS Mouton charollais envisage la création d’une marque pour des agneaux de boucherie 100 % pur charollais. Ce projet fait suite au dernier Festival du Bœuf où des agneaux moutons charollais avaient été commercialisés auprès de bouchers. Grâce au travail d’une stagiaire, une étude de marché a été réalisée et le dépôt d’une marque est envisageable, annonçaient les responsables de l’OS. Un cahier des charges va être discuté, de même que la possible mise en place de cette marque. Restera à lui trouver « un modèle économique », confie Aline Bonnot. « Il ne s’agit pas de faire concurrence aux labels existants », justifiait-on. Ce marché de niche ne serait là que pour valoriser les agneaux bouchers d’éleveurs-sélectionneurs de moutons charollais, explique-t-on.

« Il y a urgence à faire évoluer ce plan loup »

Devant des éleveurs de moutons charollais très impactés par le loup, Alexandre Saunier a rappelé les étapes auxquelles les éleveurs sont tenus de se plier pour espérer obtenir gain de cause face au loup. En préambule, il faut garder à l’esprit que le plan loup national n’est pas fait pour protéger les éleveurs mais le loup ! Une précision qui a son importance et qui explique que la profession, aidée par les parlementaires, n’a eu d’autre choix que de « construire des dérogations » pour protéger les élevages contre les attaques de loup. Ce travail fastidieux a été entamé dans un premier temps pour les massifs alpins. Or ces avancées obtenues n’étaient pas adaptées aux systèmes bocagers de plaine comme ceux du Charolais, explique Alexandre Saunier. Depuis le 25 juillet date à laquelle le loup fautif en Saône-et-Loire a été formellement reconnu par les autorités, les procédures se sont enchaînées en lien avec la DDT, le préfet, la FNO, le préfet référant loup national. Un passage obligé pour gravir les marches de l’escalier de mesures permettant aux éleveurs de se défendre (mesures de protection, tirs d’effarouchement, tir de défense simple, tir de défense renforcé)… « On se dirige vers le tir de prélèvement », confiait le 28 septembre Alexandre Saunier. Une ultime étape qui depuis a été autorisée. Pour le président de la section ovine de la FDSEA, cette première série d’attaques de loup pourrait bien n’être qu’un début et traduit un déséquilibre dont la responsabilité repose sur le politique. En clair, la profession appelle à faire pression sur les parlementaires qui sont les mieux placés pour simplifier les démarches du plan loup et éviter que le problème ne se reproduise tous les ans. « Il y a urgence à faire évoluer ce plan loup », insistait Alexandre Saunier à l’adresse de tous les parlementaires de Saône-et-Loire.