15e rencontre technique ovine
Mise en avant des solutions pour perdurer

Marc Labille
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Organisée à Maltat, la 15e rencontre technique ovine régionale avait pour thème « s’adapter pour durer ».

Mise en avant des solutions pour perdurer
180 personnes ont assisté à la 15e rencontre technique ovine régionale qui s’est déroulée le 24 septembre dernier à Maltat.

La 15è rencontre technique ovine régionale a eu lieu le 24 septembre dernier à Maltat. 180 personnes ont assisté à cette demie journée. Parmi elles de nombreux jeunes en formation venus découvrir l’exploitation de Laurence Pellenard. C’est d’ailleurs à partir de la propre expérience de l’éleveuse qu’avait été bâti le programme du jour sur le thème « s’adapter pour durer après quatre années d’installation ».

Dans son mot d’accueil, Alexandre Saunier, président de la section ovine du comité régional d’élevage évoquait l’année particulière que vit en ce moment la filière. Avant que le loup ne sévisse dans le département, la production ovine a été secouée par le covid qui a menacé les ventes d’agneaux de Pâques. Aujourd’hui, les éleveurs bénéficient de prix relativement favorables ce qui faisait dire au responsable que la production ovine s’en est finalement bien sortie au regard des autres filières. Malgré cette embellie, l’élevage de moutons connait une petite érosion en Saône-et-Loire. Ce constat pousse à explorer des solutions pour perdurer et à promouvoir le métier auprès des jeunes, poursuivait Alexandre Saunier. C’est dans cet ordre d’idée qu’un GIEE (groupement d’intérêt économique et environnemental) vient d’être créé en Saône-et-Loire, informait-il. 

Avancer collectivement avec un GIEE

« 13 éleveurs sont engagés dans ce GIEE qui réunit aussi les acteurs de la filière ovine départementale (Terre d’Ovin, Chambre d’agriculture, Pôle régional ovin, Ciirpo, Feder, etc…) », présentait Anne-Marie Bolot du groupement Terre d’Ovin. Avancer collectivement, faire évoluer les pratiques pour répondre aux attentes de la filière et des consommateurs constituent l’objectif de ce nouveau GIEE départemental. Le but est de conforter la situation économique des exploitations (marges brutes) en améliorant notamment l’autonomie alimentaire (adaptation à la sécheresse, nouvelles variétés…) et en optimisant la valorisation des agneaux (dessaisonnement, qualité). Le collectif a vocation à faciliter les échanges entre exploitations. « Reconnu par le Préfet, l’adhésion au GIEE donnera des points dans le cadre du PCEA », informait en outre Anne-Marie Bolot.

Se protéger du loup

Sur une exploitation (celle de Laurence Pellenard) qui a fait le choix de s’équiper de deux chiens de protection (lire notre article dans l'édition du HH), la thématique de la prédation faisait partie des ateliers du jour. A l’échelle régionale, les attaques dites « de grands prédateurs » s’intensifient depuis 2017, informait Catherine Bonin de la Chambre d’agriculture de l’Yonne. Devenues nombreuses dans le nord de la région, elles concernent désormais aussi la Saône-et-Loire avec les récents carnages occasionnés dans le Charolais (100 ovins tués depuis juin, cinquantaine de "blessés"). Face à ce fléau inéluctable, les éleveurs sont encouragés à mettre en place des moyens de protection. Des arrêtés préfectoraux fixent des périmètres d’application des mesures de protection des troupeaux contre la prédation du loup. Ces zonages permettent aux éleveurs d’accéder au dispositif d’aide pour la protection des troupeaux. Les moyens de protection les plus efficaces sont les clôtures électrifiées et les chiens de protection. Rémi Bahadur Thapa, du réseau des experts Idele (Institut de l'élevage) « chiens de protection des troupeaux » a fait part des connaissances sur l’intégration d’un chien au sein d’un troupeau d’ovins. Une introduction qui ne s’improvise pas et qui doit tenir compte de la cohabitation avec les autres usages des campagnes. Mais au regard de l’avancée du déploiement du loup en France, le jeu en vaut bien la chandelle.

De l’eau en quantité et en qualité
Des courants parasites dans un abreuvoir peuvent être à l’origine d’une mauvaise hydratation des animaux.

De l’eau en quantité et en qualité

Parmi les ateliers de la rencontre technique ovine régionale de Maltat, l’un d’eux était consacré à l’abreuvement des animaux au pâturage. En introduction, Laurent Solas de la chambre d’agriculture 71 rappelait que l’eau est le premier aliment des animaux. Une consommation qui varie du simple au double (2 à 4,5 litres par jour) selon le stade physiologique d’une brebis et qui peut doubler encore avec des fortes températures (jusqu’à 10 litres par jour à 30 °C). Un manque d’eau signifie baisse de production laitière et donc moindre croissance des agneaux, mettait en garde Laurent Solas. En quantité suffisante, l’eau doit aussi être de qualité, poursuivait Agathe Bonnes du GDS71. Car l’eau peut être vectrice de pathogènes, d’où la nécessité de la faire analyser au moins une fois par an quand ce n’est pas l’eau du réseau. La bonne eau est une eau sans odeur, de pH compris entre 6 et 7, de dureté inférieure à 10° et avec une teneur en chlore inférieure à 0,1 ppm. D’un point de vue bactériologique, on recommande l’absence totale de germes d’origine fécale. Pour s’assurer que les animaux sont correctement hydratés, on commence par vérifier la quantité bue. Un compteur d’eau fait l’affaire. Un autre moyen est de mesurer la densité urinaire à l’aide d’un réfractomètre. Cet appareil coûte environ 50 €, informait Agathe Bonnes. Si les animaux sont mal hydratés, la cause peut en être un accès insuffisant aux abreuvoirs : nombre, hauteur, type inadaptés. Le débit peut être en cause, de même que la propreté. La présence de courants parasites renvoie à la qualité des prises de terre. Une fois ces hypothèses vérifiées, il convient alors d’investiguer du côté de l’origine de l’eau : goût de chlore, pression insuffisante, eaux de forage souillées, eau de pluie de récupération imparfaite (amiante, plomb, etc.), cours d’eau, mares ou captages de mauvaise qualité bactérienne…
Au pâturage, l’abreuvement peut engendrer des coûts et des temps de travaux très importants (jusqu’à 2,55 €/brebis/an). D’où la nécessité de réaliser les bons aménagements (captage de source, forage, gué abreuvoir, rénovation, pompe solaire, éolienne, etc.), dans le respect des règlementations environnementales en vigueur.

Installée depuis 2015 avec 428 brebis
La journée avait pour cadre l’exploitation de Laurence Pellenard qui élève une troupe de 428 brebis à dominante suffolk.

Installée depuis 2015 avec 428 brebis

Installée hors cadre familial, Laurence Pellenard a repris cette exploitation à dominante ovine en 2015 après sept années de salariat. La structure couvre 84 hectares dont 77 d’herbe. Outre vingt vaches charolaises, la jeune femme élève une troupe de 428 brebis à dominante suffolk. La conduite repose sur une seule période d’agnelage avec une concentration des naissances en février-mars. La reproduction automnale est assurée en lutte naturelle. Pour ses quatre premières campagnes, Laurence a atteint de bons résultats techniques, commentent ses techniciens. Le taux de mise bas atteint 94 % ; la prolificité 167 % ; la mortalité des agneaux 12 % et la productivité numérique 138 %. L’élevage commercialise des agneaux d’herbe de 20 kg de poids vif payés 119 € en moyenne.

Autonomie alimentaire en question

À son installation, Laurence a repris le système bien rôdé de son prédécesseur. Mais les trois sécheresses successives qu’elle vient de subir ont fait bondir la consommation de fourrage et de concentrés de l’exploitation (+50 % en fourrage et + 40 tonnes de concentrés). « Cela devient compliqué d’arriver à nourrir mes animaux », confirme la jeune femme. En cinq ans, la surface de prairie temporaire a triplé avec des mélanges riches en légumineuses et plus résistants à la sécheresse. « Mais avec des animaux dehors la plupart du temps, les pâtures de l’exploitation ne suffisent plus », constate Laurence qui a décidé de reprendre de la surface supplémentaire pour améliorer son autonomie alimentaire. Au printemps prochain, ses brebis iront pâturer sur des herbages de bord de Loire à quelques kilomètres de la ferme. Il s’agit de parcours très extensifs (87 ha) sur le principe de la transhumance, explique l’éleveuse. Ces parcours permettront de décharger les terres de l’exploitation pour y effectuer des récoltes plus conséquentes, justifie-t-elle.