Elections législatives
Aucun vainqueur, aucun vaincu, aucun perdant... tous visent 2027

Les Français se sont massivement rendus aux urnes pour le second tour des élections législatives. Pas moins de 501 sièges étaient encore à pourvoir le 7 juillet, après la validation de 76 députés dès le premier tour le 30 juin. Parmi eux, quelques agriculteurs et figures du monde agricole.

Aucun vainqueur, aucun vaincu, aucun perdant... tous visent 2027

Emmanuel Macron voulait une "clarification" en annonçant la dissolution de l’Assemblée nationale au soir des résultats des Européennes. Trois semaines plus tard, les experts - dont la meilleure définition est celle d’une personne sachant demain pourquoi ce qu’il avait prédit hier ne s’est pas produit aujourd’hui - n’arrêtent plus de parler de surprise générale, notamment entre ces premier et second tour des législatives. Reste que personne n’a gagné, personne n’a perdu et tous se positionnent pour les Présidentielles de 2027, ce qui laisse craindre une assemblée "ingouvernable" après l’émiettement des blocs ou le recours à un Gouvernement dit "technique", pour expédier les affaires courantes, faute de coalition ou d’entente même sur des parties de programme pourtant similaire…

Lundi, les chiffres officiels faisaient état d’une Assemblée Nationale recomposée en profondeur. Le bloc du Nouveau Front Populaire - fait du PS, Écologistes, Communistes, LFI - obtient 182 sièges, mais semblait déjà se déchirer après la prise de parole de Jean-Luc Mélenchon à 20 h 02 dimanche. Second bloc se fissurant, Ensemble obtient 168 sièges mais beaucoup prennent leur distance du Président. Troisième, le Rassemblement National reste finalement le premier parti unique avec 143 sièges, avec les Républicains (Identitaires) de Ciotti. Insuffisant pour imposer Jordan Bardella à Matignon, pour la plus grande joie de Marine Le Pen, comme des autres candidats déclarés ou à venir pour 2027. Tous sachant que l’opposition est plus facile que les responsabilités et l’usure du pouvoir. Enfin, le parti des Républicains revient de loin avec 46 sièges.

Combien d’agriculteurs à l’Assemblée ?

Ils seront en tout six agriculteurs et une salariée agricole dûment répertoriés comme tel à siéger à partir du 18 juillet prochain en séance plénière pour la 17e législature. Ils étaient une douzaine dans la législature précédente. Jamais la représentation des agriculteurs au sein du Palais-Bourbon n’avait été aussi faible. Une situation pour le moins inédite. Certains sont toutefois parvenus à tirer leur épingle du jeu. Ainsi rejoignent l’Assemblée : le viticulteur Christophe Barthès (Rassemblement National -RN), l’éleveur Benoît Biteau (NFP), Sandrine Le Feur et Nicole Le Peih, toutes deux de la majorité présidentielle, l’arboriculteur sarthois Eric Martineau (MoDem/Ensemble) et Nicolas Turquois, agriculteur dans la Vienne. À noter la réélection de Mathilde Hignet, salariée agricole, dans la 4e circonscription d’Ille-et-Vilaine.

Parmi les personnalités du monde agricole, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a été réélu dans le Loir-et-Cher. Sa collègue Agnès Pannier-Runacher aussi. Les anciens ministres, Guillaume Garot** et Stéphane Travert*** ont aussi été réélus. Stéphane Travert conserve son siège. Proches du monde agricole, les députés André Chassaigne (PCF-NFP), Dominique Potier (PS-NFP) et Julien Dive (LR) ont également conservé leur mandat. À souligner l’élection dans le Doubs de l’ancienne ministre de l’Environnement Dominique Voynet sous les couleurs du NFP et la défaite de l’ancienne secrétaire d’État chargée de la Biodiversité, Bérangère Abba, assez sèchement battue.

Dans une Assemblée nationale aussi fragmentée que morcelée, dans un Palais-Bourbon sans majorité dominante, à la merci des stratégies opportunistes, quels vont être le sort et l’avenir de l’agriculture ? Il est fort à parier que faute de majorité le prochain gouvernement se contentera de gérer les affaires courantes sans pouvoir entreprendre de projet d’envergure. Ainsi l’élan qu’avaient pu donner les manifestations de l’automne et de l’hiver devrait se trouver amoindri. À l’image du projet de loi d’orientation agricole qui est en attente de discussion au Sénat. Une fois examiné et sans doute remanié, il restera à l’inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée. À ce stade, il ne semble pas que ce soit une priorité. Or les attentes sont nombreuses dans le monde agricole et rural. Pour sortir d’une impasse prévisible et maintenir la pression sur la représentation nationale, la voix des agriculteurs devra sans doute se faire entendre… par d’autres voies.

(*) Avec 5 % des voix, seuls les cinq premiers sur la liste des Écologistes avaient été élus. Il était le sixième.

(**) Ministre délégué à l’agroalimentaire (2012-2014)

(***) Ministre de l’Agriculture (2017-2018)

La FNSEA « ferme sur ses positions »

Réagissant aux résultats des élections législatives dont elle « prend acte », la FNSEA indique dans un communiqué du 7 juillet, qu’elle restera « ferme sur ses positions » et demande à la « représentation nationale de s’organiser au plus vite pour apporter les réponses législatives tant attendues par le monde agricole ». Ainsi, elle n’entend pas laisser en chantier « l’examen du Projet de loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture (PLOA) et les projets de textes pour le revenu, les moyens de production et la dignité des agriculteurs […] suspendus par la dissolution ». Celui-ci, voté fin mai, a été transmis au Sénat qui l’examinera à une date encore indéterminée. Inquiète d’une crise « économique, morale et sociale sans précédent depuis trente ans », elle demande aux députés de se « saisir des 27 propositions formulées et portées auprès des candidats » avant le premier tour. « Il n’est pas question que l’agriculture redevienne la grande oubliée du débat public ! » conclut la FNSEA.

Matignon : Attal reste « pour le moment »

Prenant acte de ce résultat, le Premier ministre sortant Gabriel Attal a présenté sa démission à Emmanuel Macron, qui lui a demandé de rester en poste « pour le moment » afin d'« assurer la stabilité du pays ».

Saône-et-Loire : virage à droite toute avec trois nouveaux députés et deux réélus

Après les élections Européennes, la Saône-et-Loire a fait preuve de constance. Le département se retrouve à nouveau en décalage par rapport au niveau national, voire aux votes des métropoles. Sur la première circonscription, le député sortant, Benjamin Dirx a été réélu à 60,55 %. Il a profité du retrait de Jean-Luc Delpeuch du Nouveau front populaire, puisque Rachel Drevet du Rassemblement national était arrivée en tête au premier tour. Sur la deuxième circonscription, la députée sortante des Républicains, Josiane Corneloup a été réélue avec 58,39 % des votes exprimés. Olivier Damien du RN ne récolte que 41,61 %. Dans la troisième circonscription, le match a été beaucoup plus serré avec un duel remporté de justesse (à 65 voix près). Aurélien Dutremble l’emporte de 65 voix face au député sortant d’Ensemble de la majorité présidentielle, Rémy Rebeyrotte. Autre députée sortante et battue, Cécile Untermaïer dans la quatrième circonscription. Après de multiples tentatives, Eric Michoux est élu (54,66 %) sous l’étiquette Union des extrêmes droites (dénomination officielle, USD) entre RN et Les Républicains ayant suivi Éric Ciotti. Enfin, dans la cinquième circonscription, la triangulaire n’a pas permis de dégager un candidat avec une majorité claire. Arnaud Sanvert du RN avec 40,57 % est élu, devançant Fatima Kouriche du NFP (31,50 %) et Gilles Platret (27,92 %), classé Divers droite.

La participation pour ce second tour a été comparable à celle du premier tour autour de 69 % des électeurs qui se sont déplacés pour voter. Réuni lundi 8 juillet à Mâcon, le conseil d’administration de la FDSEA de Saône-et-Loire a acté ce changement de parlementaires sur trois des cinq circonscriptions et va se rapprocher des nouveaux députés pour les rencontrer et porter les revendications locales de la profession agricole et viticole du département.