Fermoscopies lait
Des investissements à réfléchir

Françoise Thomas
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C’est bien évidemment un état des lieux en demi-teinte que les conseillers de CerFrance71 ont présenté lors de Fermoscopie consacrée aux grandes cultures (dans notre prochaine édition) et aux bovins lait. Ce bilan 2021 et les prévisions pour la suite ont été donnés à la salle des fêtes de Saint-Didier-en-Bresse le jeudi 25 novembre. Des résultats en lait impactés par l’augmentation des charges.

Des investissements à réfléchir
Bruno Laurent, consultant circuits courts chez Cerfrance, lors des Fermoscopies 2021 à Saint-Didier-en-Bresse, consacrées au lait et aux grandes cultures.

Du côté de la production laitière, la tendance est plutôt à la hausse depuis plusieurs années maintenant, entre les volumes demandés et les prix proposés. « On constate une augmentation du prix qui vous est payé depuis 2016 avec des prix rémunérateurs depuis 2019 », a fait remarquer Pascale Laurain. 2021 « devrait suivre cette tendance ». Cependant, tout ceci est à nuancer car les écarts de prix importants proposés selon les laiteries refont surface depuis 2020 et les charges augmentent. « En 2020, le prix moyen payé était de 367 € », précise la conseillère CerFrance71, en sachant que cela varie de 350 à 380 € selon les laiteries, « soit un écart significatif ». Pour 2021, le prix moyen devrait être de 374 €, mais « avec un écart de prix renforcé, et une augmentation des charges significative ».

Ces charges semblent aujourd’hui stabilisées… mais à un niveau élevé, - un niveau pas atteint depuis 2014-, à cause du coût des énergies, carburant et engrais. Les conseillers CerFrance appellent ainsi à contenir ces charges au niveau individuel « par la contractualisation de l’achat des matières premières ou grâce à la reconstitution du stock fourrager ». L’un des principaux leviers en lait se trouvant sur le coût de l’alimentation…

Rentabilité modeste

Ainsi, le résultat courant s’élève à 15.700 € par Utaf, en léger progrès par rapport à 2020 (13.500 €). Cependant, entre les deux années, les tendances se sont inversées : quand en 2020, le lait tirait vers le haut et les céréales vers le bas (à cause de la sécheresse), en 2021, c’est le contraire, les céréales augmentent quand le lait tire vers le bas avec une hausse des charges plus importante que celles du produit…
L’EBE est autour de 110.000 €, « avec une rentabilité modeste à tout juste 27 % », un niveau limite pour couvrir les besoins et les annuités. Au final, « en terme de trésorerie, pas de marge de manœuvre sur 2021 ».

L’étude du niveau de risque économique et financier révèle un décrochage : 68 % des exploitations présentent un niveau nul ou faible, elles étaient 80 % dans ce cas en 2020… Cela montre bien « la vulnérabilité des exploitations laitières aux aléas climatiques et économiques ». Pour pouvoir faire face, « le conseil reste la prudence encore et toujours », rappelle Pascale Laurain.

Des investissements mesurés

Pour les exploitations laitières, cet appel à la prudence visait notamment les robots de traite : « on ne dit pas qu’il ne faut pas investir, mais il faut vraiment mesurer le risque pour que cet investissement reste tenable en cas d’aléas », a tempéré Pascale Laurain.

Il ressort également côté filière bio, un déséquilibre entre l’offre en volume de lait et la demande consommateur qui s’ajoute à un moindre volume de produits transformés en bio. Tout ceci fait que les prix d’achat aux producteurs ne tiennent pas leur promesse. « Ce n’est pour autant pas la catastrophe si on compare les chiffres avec ceux de 2019 », fait remarquer la conseillère, la consommation 2020 ayant été boostée par l’effet crise sanitaire.

La Pac à venir

Un large focus a été par ailleurs proposé autour de la future Pac et sur les incidences et changements qu’elle devrait entraîner pour les exploitations. Bruno Laurent s’est voulu rassurant : « nous vous en parlons en novembre 2021, pour une application en avril 2023, cela laisse donc le temps d’anticiper votre assolement, puisque ce seront les implantations de fin 2022 qui seront prises en compte ».

Ainsi, les leviers sur lesquels jouer pour toucher les aides Pac doivent ainsi être dès à présent étudiés. Cette Pac, annoncée plus verte, va en effet être influencée par les nouveaux éco-régimes. « Il y a trois voies pour y accéder – les pratiques agricoles, les certifications, les infrastructures agroécologiques - et deux niveaux de rémunération, standard ou supérieur », ont détaillé Éric Jeannin et Fanny Delorme.

Le volet certifications fait référence au bio, HVE, etc.
Parmi les pratiques agricoles, il faudra jouer sur les prairies permanentes, les interrangs enherbés, etc.
Les infrastructures agroécologiques ne sont autres que les haies, les bosquets, les mares, etc.

Pour ces deux derniers points, une présence minimale sera à respecter. La date de référence n’est pas encore connue à ce jour, mais il semblerait que vu le profil général des exploitations saône-et-loiriennes, cette nouvelle Pac ne « devrait pas représenter une rupture brutale », dans l’attribution des aides. « Cela va plus représenter une reconnaissance des pratiques actuelles », estime-t-on même chez CerFrance.
Pour autant, mieux vaut s’y pencher dès à présent, pour établir un état des lieux de sa situation précise au regard des futures normes d’attribution qui se profilent et pour ne surtout pas avoir de mauvaises surprises au moment de cette future déclaration Pac.