MARCHÉ
Le flou logistique, une épreuve difficile à surmonter

La période des Jeux olympiques s’annonce complexe à piloter pour les commerces alimentaires à proximité des lieux où se dérouleront les épreuves. L’effet sur la demande est difficile à anticiper et l’acheminement des denrées sera compliqué par la fermeture de certaines voies.

Le flou logistique, une épreuve difficile à surmonter
Selon le président d’Unigros Gino Catena, le marché de Rungis aura la capacité d’absorber 30 % de flux supplémentaire. ©Volaille française

À l’échelle nationale, les Jeux olympiques devraient avoir peu d’effet sur la consommation alimentaire. Les observateurs prévoient néanmoins une embellie sur les produits traditionnellement consommés lors des compétitions sportives, comme les boissons sans alcool et les bières. D’après FranceAgriMer, les malteries ont revu leurs prévisions à la hausse en vue de l’événement (+ 30 000 tonnes d’orge brassicole sur un mois entre novembre et décembre). En blé tendre, l’activité attendue pendant les JO contribue à soutenir la demande de la meunerie, en baisse à cause de l’inflation. Cependant, l’effet sur les ventes des produits de grande consommation « restera mineur », note la directrice d’études chez Circana, Emily Mayer. En revanche, le marché local devrait être chamboulé. Les commerces alimentaires proches des lieux de compétition s’attendent à bénéficier de la fréquentation touristique. « Ça va être une formidable période commerciale à une période de l’année où, d’habitude, il ne se passe pas grand-chose », indiquait le directeur logistique de Carrefour France, Thierry Quaranta, lors d’une conférence en ligne d’Interlud (logistique urbaine). Les produits prêts à consommer, comme les sandwichs, auront du succès. « Nous nous préparons à une hausse de nos ventes de 5 à 10 % sur cette période par rapport à nos volumes habituels en Île-de-France », explique la directrice « Produits » de Sodebo, Anne Renault. Son principal concurrent sur le marché de la pause-déjeuner, Daunat, prévoit également « une hausse dans les points de vente de proximité », indique son directeur général, Frédéric Oriol. Cependant, sans point de comparaison, les conséquences sur la consommation restent difficiles à prévoir.

Aucune visibilité

En restauration, les effets seront certainement contrastés. D’après les travaux des chercheurs Marie Delaplace et Pierre-Olaf Schut, les visiteurs des grands événements sportifs internationaux mangent généralement plus dans les « fast-foods » que les touristes habituels et les recettes des restaurants traditionnels ont tendance à baisser. À Los Angeles en 1984, 80 % des restaurants ont enregistré un recul de leur activité. Du côté des grossistes qui fournissent les restaurateurs et les commerces de bouches, la période est complexe à appréhender. « Nous n’avons aucune visibilité », déclare le président d’Unigros, Gino Catena. Les opérateurs devront faire preuve de réactivité.

« Le marché de Rungis peut absorber 30 % de flux supplémentaire, ça ne devrait pas poser de difficulté », assure Gino Catena. L’acheminement des denrées jusqu’aux points de vente pourrait en revanche s’avérer compliqué. « Nous sommes capables de fournir, la question, c’est de pouvoir livrer », résume le grossiste. « Un commerçant qui est livré trois fois par semaine devra peut-être l’être trois fois par jour », illustrait Christian Rose de la Confédération des grossistes de France, à l’occasion de la conférence d’Interlud. Résultat : le nombre de livraisons dans la capitale devrait doubler pendant les Jeux. Or, la circulation sera restreinte. En plus des périmètres de sécurité autour des lieux des épreuves, 185 kilomètres de voies seront réservés aux personnes accréditées (athlètes, médias, véhicules de secours, transports en commun, etc.) entre 6 heures et minuit. Un premier test en conditions réelles organisé en août n’a pas rassuré les logisticiens. « Ce n’était pas du tout satisfaisant. Les forces de police n’avaient pas toutes les mêmes informations. Nous demandons à avoir un macaron pour être identifiés comme des officiels », explique Unigros. Un deuxième test est prévu prochainement.

J. G.