Conseil départemental de Saône-et-Loire
L’agriculture au cœur du plan Environnement

Mis en ligne par Cédric MICHELIN
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Lors de son assemblée des 18 et 19 juin derniers, le Conseil départemental de Saône-et-Loire a voté et lancé un plan Environnement qui fera date. Son ambition est grande : adapter la Saône-et-Loire au changement climatique en cours. Et ce, que ce soit pour les habitants comme pour les agriculteurs et les filières agricoles. Explications des objectifs et moyens de ce plan Environnement avec Frédéric Brochot, vice-président du Conseil départemental en charge de l’agriculture.

L’agriculture au cœur du plan Environnement

C’est un plan qui marque un tournant pour le Conseil départemental de Saône-et-Loire pour la période 2020-2030. Le plan Environnement voté les 18 et 19 juin derniers par l’assemblée départementale trace en effet un fil conducteur pour tous les habitants du Département pour les dix ans à venir. Il synthétise et détaille à la fois les nombreux objectifs recherchés que ce soit en matière de lutte contre le changement climatique, d’adaptation pour l’économie ou l’agriculture et de gestes pour toujours mieux respecter l’environnement au quotidien.

Si l’on peut retenir un dispositif d’aides à la rénovation énergétique des logements d’habitation ou un généreux plan pour développer l’usage des vélos, la ruralité et l’agriculture en particulier sont au cœur des réflexions de ce plan. Et pour une fois, il n’est pas question de critiquer ou de montrer du doigt l’agriculture mais bien de valoriser ses efforts, capitaliser sur l’existant pour encore mieux faire demain. « On se devait de prendre les devants, de travailler pour garder une agriculture forte, de pallier les conséquences, souvent négatives, du climat » qui change à l’échelle planétaire, explique en introduction Frédéric Brochot, en charge de l’agriculture au Conseil départemental. Il faut dire que l’agriculture pèse pour 60 % de la surface (SAU) et en ressent particulièrement les effets. « Le monde agricole a bien conscience de l’urgence à agir après deux années de sécheresse consécutives et des nappes phréatiques qui ne se sont pas totalement reconstituées », illustre-t-il. Surtout côté ouest de la Saône. Les conséquences sont lourdes pour les filières agricoles, ici pour l’élevage à l’herbe mais il en va de même pour la viticulture (gel printanier, vendanges précoces, etc.) ou encore les grandes cultures (ravageurs, maladies, etc.).

Priorité à l’eau

Première priorité identifiée : préserver les ressources en eau. L’eau étant l’élément vital de base pour tous. Le Département va flécher pour cela 5 millions d’€ par an jusqu’en 2030. L’agriculture pourra en profiter à plusieurs niveaux. Si on note peu d’irrigation en Saône-et-Loire, le stockage des eaux pluviales va bénéficier d’une attention particulière. « Tout ce qu’on peut stocker est capital », insiste Frédéric Brochot qui mobilisera autant la chambre d’agriculture et les collectivités que les particuliers invités à faire attention. Des expérimentations vont aussi prendre place comme avec le Grand Chalon pour donner de l’eau non "potable" aux animaux mais en veillant à ce qu’il n’y ait aucun risque sanitaire, analyse l’ancien président du GDS71.
Le Département veut aussi limiter l’artificialisation des sols, toujours en lien avec l’État et les EPCI (communauté de communes, ...) du département. « On veut diminuer la masse de goudron et orienter les dossiers de nouveaux bâtiments – industriels ou commerciaux – vers des bâtiments libres » au lieu de voir s’agrandir les friches ou de systématiquement construire. Une façon également d’aborder le problème de l’imperméabilisation des sols et du ruissellement de l’eau.

La bonne personne au bon endroit

Côté biodiversité, l’agriculture et la ruralité sont là encore au cœur de plusieurs dispositifs (même si la question des îlots de chaleur en ville sera à l’ordre du jour). On note la volonté de planter 600.000 arbres ou encore 15 km de haies par an. Le tout sur 10 ans. Sans oublier l’accompagnement pour développer l’agroforesterie ou bien le maraîchage. Ce dernier est en effet réclamé par les clients locaux mais de trop nombreux projets ou installations font face à des déconvenues. « Nous allons réaliser, avec les EPCI, des expertises foncières pour voir où les implanter » et ce, en relation avec les syndicats professionnels locaux pour qu’un jeune maraîcher - par exemple – ait un projet viable. Et Frédéric Brochot de préciser : « il n’est pas question d’opposer les modèles : bio ou traditionnel (AOC, Labels) ou conventionnel… ». Une affirmation qui aujourd’hui prend tout son sens pour ne pas voir exploser les conflits entre « fin du monde et fin du mois ». En charge de ce vaste volet au Conseil départemental, Sylvie D’Asgnanno-Michon sait qu’il existe aujourd’hui « une variété de labels et de certifications » justement pour aider une agriculture "raisonnée". Là encore, le Département n’agira pas seul mais cherche à mieux « piloter » ce qui se fait déjà un peu partout.

Des outils à disposition de tous

Ainsi, ce plan ne peut marcher qu’avec une économie viable et durable. D’où les nombreuses précautions prévues pour ne pas déstabiliser brusquement des filières ou des producteurs en place. Au contraire, l’idée est de donner des moyens et des outils aux producteurs pour leur permettre de réaliser au mieux leur transition. Comme avec la plateforme web Agrilocal qui permet aux producteurs de livrer collèges et autres restaurants collectifs (Ehpad, etc.). « On cherche à faciliter les échanges avec les cuisiniers et les intendants ». Pas seulement de façon virtuelle mais aussi en organisant des rencontres locales et des formations pour les cuisiniers afin qu’ils (ré)apprennent à bien préparer les produits locaux. De nombreux maillons de la filière sont ainsi à parfaire ou rebâtir pour arriver à l’objectif de « 60 % de produits locaux dans les assiettes » des collégiens d’ici 2024.
Ils ne seront pas les seuls heureux gastronomes en herbe puisque le Département a également pensé à tous les autres habitants avec la plateforme web, J’veuxdulocal, qui avec la chambre d’agriculture a rencontré un impressionnant succès lors du confinement. À tel point que les autres départements de la Région l’ont adoptée sous la forme "J’veux du local BFC" pour développer les débouchés des circuits courts et ventes directes, comme sur les marchés de producteurs locaux.

Valoriser l’innovation

Ces nombreuses innovations institutionnelles mais aussi celles venant des agriculteurs eux mêmes seront mis en valeur et médiatisés lors de deux nouveaux événements : le Forum pour l’Agriculture et les Trophées de l’Environnement. Lancements prévus fin 2021. Il sera certainement question des énergies renouvelables à la ferme. On pense évidemment au photovoltaïque qui se développe énormément ou encore à la méthanisation. « Le Forum de l’Agriculture sera destiné aux agriculteurs pour leur permettre de partager leurs réussites. Notre département est plein de ressources, il faut capitaliser dessus, pour continuer de respecter notre environnement », conclut confiant Frédéric Brochot en ligne directe et en phase avec son président André Accary sur tous ces sujets.

Pesticides, gaz à effet de serre… le point

Le plan Environnement du Département part d’une importante littérature et de nombreux rapports déjà existants sur le sujet. Ainsi, on apprend qu’aujourd’hui, le secteur du bâtiment consomme 37 % de l’énergie totale utilisée, suivi des transports dans les mêmes proportions (37 %) et donc loin devant l’agriculture (4,23 %) qui est incluse dans les 25 % industriels. En revanche, en matière de gaz à effet de serre, la contribution de l’agriculture est plus importante (34,73 % du total). Idem pour les émissions d’ammoniac. À relativiser toutefois puisque ces indicateurs sont orientés à la baisse depuis 2010. À relativiser également avec la première énergie renouvelable qui est le bois.
Entendant particulièrement les inquiétudes des concitoyens sur la question des "pesticides", le Département veut également accompagner les villes et territoires pour bannir les substances les plus dangereuses (CMR pour Cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques). Là encore, l’agriculture n’est pas pointée du doigt. « Nous sommes conscients qu’il faut mieux accompagner les acteurs sur le terrain pour les aider à réaliser leurs transitions. On voit des communes qui ont du mal à investir dans du matériel, des formations… alors que depuis deux ans, elles n’ont plus le droit d’utiliser de pesticides chimiques. Mais tout ceci s’est fait sans réfléchir. À nous de les accompagner et de montrer l’exemple sur nos Voies vertes, bleues… notre image environnementale est bonne, comme le démontre notre candidature à l’Unesco, donc il faut la valoriser ». Lorsque les habitants verront qu’il n’est pas aisé, ni donné, de désherber un trottoir, un parc ou un terrain de football, peut-être seront-ils ensuite plus mesurés dans leurs propos vis à vis de l’agriculture…