Conseil économique, social et environnemental
La difficulté de renouveler les générations d’agriculteurs

Mis en ligne par Cédric MICHELIN
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La section de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation du Conseil économique, social et environnemental (Cese) a rendu public, le 9 juin, un avis intitulé « Entre transmettre et s’installer, l’avenir de l’agriculture ». Cet avis entend mobiliser les acteurs pour favoriser les installations.

La difficulté de renouveler les générations d’agriculteurs

L’agriculture perd chaque année des terres (50.000 ha/an depuis cinq ans), des exploitations (-14 % en dix ans) et des exploitants (-56.000 en dix ans). Elle voit aussi le prix du foncier augmenter et la spécialisation des exploitations devenir la règle. Aujourd’hui, 36 % des exploitants ont plus de 55 ans. Dans ces conditions, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) s’interroge sur la manière dont l’agriculture peut renouveler ses générations. « La question de l’installation agricole revêt une importance accrue pour mettre fin à l'hémorragie que connaît ce secteur », indique Bertrand Coly (lire encadré), le rapporteur de l’avis qui a été validé par le Cese à l’unanimité moins trois abstentions.

Hors cadre familial

Revenant en particulier sur le rôle des Safer (Société d'aménagement foncier et d'établissement rural), du contrôle des structures et de la DJA (dotation jeunes agriculteurs), l’avis de la troisième Assemblée de la République (avec l'Assemblée nationale et le Sénat) rappelle que le profil des installés a évolué au fil du temps. « La transmission des fermes est longtemps demeurée une affaire essentiellement familiale, un des enfants prenant la suite de ses parents, ce qui permettait de ne pas morceler l’exploitation », indique-t-il. Aujourd’hui, « 32 % des installations réalisées en 2017 ayant bénéficié d’aides publiques (DJA) se sont faites hors cadre familial », ajoute le rapport. D’ailleurs, plus de 31 % des chefs d’exploitation qui se sont installés en 2018 avaient plus de 40 ans, un nombre significatif d’entre eux étant en reconversion professionnelle.

Préconisations

Le Cese constate également que les transmissions ne sont pas aisées à réaliser en raison de la « faiblesse des retraites agricoles » qui constitue un frein à la cessation d’activité, des « départs à la retraite délicats à anticiper » mais aussi des différentes conditions à remplir pour pouvoir s’installer qui peuvent parfois créer autant d’obstacles. Les futurs agriculteurs se trouvent confrontés à « de nombreux dispositifs souvent peu lisibles et mal connus portés par une multitude d’acteurs », remarque l’avis. Pour favoriser l’installation de nouveaux agriculteurs, le Cese développe dix-neuf préconisations parmi lesquelles :

- amplifier l’action de soutien des collectivités territoriales aux porteurs de projet, notamment par le repérage des terres qui se libèrent, en mobilisant des « biens communaux », et en assurant le portage du foncier, directement ou via l’implication d’acteurs coopératifs et associatifs ;

- organiser de façon systématique des rendez-vous individuels et collectifs, cinq ans avant le départ en retraite prévisible, pour sensibiliser les cédants à la transmission et leur présenter les outils d’accompagnement existants ;

- proposer de manière systématique, cinq ans avant l’âge potentiel de la retraite, que leurs fermes soient inscrites sur le Répertoire Départ Installation (RDI).

Points de dissensus

La FNSEA a réagi dans un communiqué de presse à la publication de cet avis: « Faisons du renouvellement des générations une priorité politique, oui ! Ce rapport apporte une contribution à cet égard, mais toutes ses propositions ne doivent pas être prises à la lettre ». Elle exprime ainsi « de vives inquiétudes sur les points de dissensus (…) comme l’accès à la Dotation Jeunes Agriculteurs (DJA) jusqu’à 50 ans, qui, non seulement risque de profondément diluer l’enveloppe dédiée, mais en plus fait perdre toute considération générationnelle, à l’origine de cette aide ». Elle regrette aussi que « le rapport ne mentionne pas la promotion des métiers, nécessaire pour susciter des vocations et relever le défi démographique et assurer la dynamique des territoires. Des propositions existent pourtant à ce jour, comme l’organisation d’une campagne de promotion du métier à l’échelle nationale », souligne la FNSEA. Le rapport est disponible sur le site du Cese à l’adresse suivante :

https://www.lecese.fr/le-cese-adopte-son-avis-entre-transmettre-et-sinstaller-lavenir-de-lagriculture

Pour un Big bang des politiques jeunesse

Bertrand Coly a exercé de nombreuses responsabilités au sein du MRJC dont il a été le secrétaire général de 2010 à 2014. Dans ce cadre, il a notamment participé à la rédaction du livre « Va y avoir du taf ! », à l’essaimage des Parlements Libres des Jeunes et à l’écriture de propositions au sein de la plateforme « Pour un Big Bang des politiques jeunesse ». En 2012, il a co-créé le Forum Français de la Jeunesse, organisme qui rassemble les principales organisations gérées et animées par des jeunes et qui porte leur parole auprès des pouvoirs publics. Éducateur spécialisé, il est membre du Cese depuis 2015.