Feder
Un amont bien structuré, des débouchés assurés

Marc Labille
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2019 a été une année de relative stabilité pour l’union Feder. Face aux difficultés de l’élevage, le groupement coopératif tient bon grâce à une stratégie amont assumée.

Un amont bien structuré, des débouchés assurés
Michel Millot, directeur et Yves Largy président de Feder Elevage : dans un souci permanent d’adaptation aux marchés, le groupement entend accompagner les éleveurs vers une forme de diversification, pour un complément de revenu.

Contexte sanitaire oblige, les assemblées générales de l’union Feder se sont déroulées cette année en visioconférence. Le conseil d’administration de l’UCA (union coopérative agricole) en a profité pour présenter le bilan de l’exercice écoulé. Si l’année 2019 a eu son lot de complications habituelles concernant l’export, la viande, etc., « Feder a su tirer son épingle du jeu », résume le directeur Michel Millot. De fait, tous les résultats de l’union sont à l’équilibre et positifs. « À 1 % près, les activités se maintiennent en volume (léger développement en bovins viande, petit repli en bovins maigres) », indique le directeur qui parle d’une « année globalement stable ». Côté prix, on n’a pas eu de grande évolution des cours, même si la sécheresse et une tendance à la décapitalisation ont continué de sévir.

Soutien à la production

Sans minimiser les difficultés d’une filière éprouvée, les responsables de Feder ont pu tirer profit de leurs choix stratégiques. C’est le cas de la politique d’accompagnement de la coopérative envers la viande et l’engraissement. « Nous consacrons un tiers de nos capitaux propres soit l’équivalent de tout le capital social des éleveurs à soutenir nos adhérents qui développent la production par de l’engraissement, de la repousse… », révèle Michel Millot. Cette politique volontariste offre un débouché à des broutards produits sur le territoire par d’autres adhérents. C’est aussi ce qui contribue à ne devoir exporter que  50 % de la production maigre, fait valoir le directeur qui évoque aussi la part importante de bovins vendue à des engraisseurs français.

Pays tiers…

Si l’Italie demeure un débouché important, la coopérative continue d’explorer des alternatives avec les pays tiers à travers sa filiale Eurofeder. En 2019, l’Algérie a été une destination de choix pour des bovins français. Un marché particulier puisqu’il s’agit d’expéditions conjointes de génisses laitières et de bovins allaitants, informe le président Yves Largy. Et l’Algérie reste un débouché incertain où « on n’exporte qu’en échange de garanties », confie le président. Et il y a aussi la difficulté nouvelle d’un cahier des charges qui s’est renforcé exigeant désormais des broutards ne dépassant pas 450 kg et 14 mois. Une contrainte qui exclut une partie des gros broutards du bassin charolais. Sans oublier non plus la perspective de nouvelles règles de transport vis-à-vis des chaleurs estivales.

En 2019, Feder a poursuivi ses investissements dans la modernisation de ses sites et de ses centres de tri. Ces travaux concernent Montceau-les-Mines, Charolles, Vénarey-les-Laumes (21), Villefranche-d’Allier (03). La Saône-et-Loire abrite désormais le plus important centre d’export du groupe à Montceau.

« Peser pour intéresser les clients »

À l’épreuve d’un contexte de l’élevage difficile, Feder voit sa stratégie dite « de massification de l’offre » porter ses fruits. Se concentrant à « bien faire son métier d’amont », la structure s’appuie sur « des coopératives structurées, permettant de structurer l’offre » ; la « lisser » en quelque sorte grâce à de vastes zones de collecte permettant de palier la saisonnalité de la production, argumente Michel Millot. C’est aussi une façon de « peser pour intéresser les clients », qu’ils soient Bigard ou la filiale d’export Eurofeder.

Dans la continuité de cette démarche assumée, la récente fusion des coopératives Socaviac (Villefranche-d’Allier) et Global (Charolles) est somme toute naturelle. Sans bouleverser l’activité ni la vie des adhérents, cette ultime structuration vise une « simplification opérationnelle », confie le directeur. Indiscutablement, elle supprimera des tâches jusqu’alors réalisées en doublon et génèrera, de ce fait, des économies d’échelle. La fusion représente cependant un « acte fort » pour une partie des adhérents historiques des deux coopératives de départ, fait remarquer Yves Largy. D’ailleurs pour tenir compte du poids des régions et de l’histoire des structures fondatrices, les deux grosses zones Auvergne et Bourgogne (Champagne-Ardennes) garderont une représentation au plus haut niveau. En effet, la présidence de la nouvelle entité Feder Élevage est assurée par Yves Largy (ancien président de Global) tandis que la présidence de l’UCA Feder est assurée par Bertrand Laboisse (ancien président de Socaviac). Il en va de même pour les sièges des deux structures : Charolles pour l’union Feder et Villefranche-d’Allier pour Feder Élevage.

Contractualisation, planification, adaptation aux marchés

Outre la massification de l’offre, Feder veut aussi aller plus loin en matière d’organisation de marché en développant de la contractualisation et de la planification de production. Mais lucides, les responsables de la coopérative regrettent que tous les maillons de la filière ne jouent pas le jeu de la contractualisation. Des blocages existent et ils ne sont pas forcément aussi simples à résorber qu’on pourrait l’imaginer. Réduire la responsabilité de ces blocages à la seule filière est un peu trop facile, estime Michel Millot. Il ne faut pas perdre de vue la nécessité de s’adapter aux marchés et pour ce faire, la coopérative mise sur son service technique et « un accompagnement des éleveurs dans la diversification ». Une approche qui tient compte des attentes nouvelles des consommateurs mais aussi de celles des adhérents, explique Yves Largy. Clairement, à travers un accompagnement technique adapté, le groupement cherche à offrir « un complément de revenu » à ses adhérents. Option qui n’exclut aucune voie de diversification, argumentent le directeur et le président qui évoquent par exemple le photovoltaïque, la vente directe, l’évolution raciale… En première ligne face à la demande de la filière, Feder préfère anticiper les évolutions et trouver des portes de sorties porteuses d’espoir. Quitte à faire bouger les lignes et bousculer les habitudes…

Covid-19 : impacts limités pour Feder

Malgré la crise du coronavirus, la stabilité vécue par Feder en 2019 semble perdurer sur 2020. « Si la partie technique et administrative a été impactée avec des salariés contraints au chômage partiel ou au télétravail, le groupement n’a jamais cessé son activité », confie le directeur Michel Millot qui indique que même l’export de broutards sur l’Italie n’a pas été perturbé alors que le pays était l’un des plus durement touchés par le Covid-19. Les seules perturbations notables ont été quelques clients abatteurs bloqués par l’arrêt de la restauration hors foyer. Mais « les partenaires privilégiés de Feder s’en sont bien sortis grâce à la grande distribution et à la boucherie qui ont globalement très bien travaillé pendant le confinement, confie Michel Millot. Le groupement a aussi profité de l’engouement pour la vente directe à travers son atelier de découpe Séléviandes à Saint-Rémy dont l’activité a bondi de + 30 à + 40 %. Même constat pour les boucheries Coop’Amour. Par contre, le renforcement de la part de viande hachée dans la consommation confirme les difficultés dans la valorisation des charolaises, relève le directeur. Mais la hausse régulière du prix de la vache R depuis le mois de mai (+ 50 centimes d’euros en six semaines) est un signe très encourageant, analyse pour sa part Yves Largy.