Grandes cultures
Le point sur les enjeux céréaliers régionaux

PROPOS RECUEILLIS PAR BERTY ROBERT
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Le 15 novembre, le Forum céréalier Bourgogne Franche-Comté se tiendra à Longvic, près de Dijon, chez Dijon Céréales. Éric Thirouin, président en exercice de l’AGPB, sera présent. Jacques de Loisy, producteur côte-d’orien, administrateur et membre du bureau de l’AGPB, revient sur les grands enjeux qui seront abordés à cette occasion.

Le point sur les enjeux céréaliers régionaux
Éric Thirouin, président de l’AGPB, était déjà venu chez Dijon Céréales en décembre 2019 dans le cadre d’un précédant forum régional céréalier.

Le 15 novembre, l’Association générale des producteurs de blé et autres céréales (AGPB) vient en Bourgogne Franche-Comté (BFC) pour une matinée d’échanges. Dans quel cadre s’inscrit cet événement ?

Jacques de Loisy : Traditionnellement, l’AGPB réalise un "tour de France" des régions dans lequel est incluse la BFC. Ce Forum céréalier régional n’avait pas pu se tenir l’an passé en raison des restrictions sanitaires liées au Covid qui persistaient. Il est important que l’AGPB vienne au contact des producteurs et des organismes stockeurs. Éric Thirouin, son président, est attaché au fait de faire le point dans les régions sur l’actualité locale, les préoccupations régionales, et pour rendre compte des travaux, des avancées et des enjeux qui se présentent pour l’avenir.

Quels seront les principaux sujets abordés ?

J. d L. : L’un des gros sujets sera la Pac, avec un budget préservé pour les six années à venir. Mais il a fallu beaucoup travailler pour préserver ce budget, avec un but précis : qu’il n’y ait pas de nouveaux déséquilibres en BFC, notamment sur les productions végétales. Contrairement aux précédentes réformes de la Pac, c’est la première fois que nous parvenons au maintien d’un équilibre, voire un léger rééquilibrage. Il y a aussi un aspect sur lequel la région BFC s’est beaucoup battue : nous avons obtenu une Mesure agro-environnementale et climatique (MAEC) dédiée. Sous réserve des derniers arbitrages en cours, nous devrions bénéficier, dans ce cadre, de neuf millions d’euros sur un budget total national de 36 millions, tous les ans. C’est conséquent, sans pour autant résoudre tous les problèmes, mais c’est un marqueur fort en termes de signal politique sur la reconnaissance des spécificités de notre région. Cela intervient aussi à la suite de la reconduction des Zones défavorisées simples qui sont même agrandies dans un certain nombre de cantons en BFC. Dans ce contexte, disposer en surplus une reconnaissance de MAEC sur l’intégralité du territoire céréalier de BFC, c’est plutôt bien.

La question de la Haute valeur environnementale (HVE) figurera-t-elle au menu de vos échanges ?

J. d L. : Dans le cadre de la nouvelle Pac, on abordera les écoschemes (éco-régimes) et le sujet de la HVE (Haute valeur environnementale) et de la certification que l’AGPB avait portée. Nous parlerons aussi de la réforme des aléas climatiques qui est en train de se mettre en place. Sur la certification HVE, on attend encore le résultat de quelques arbitrages pour 2023. Néanmoins, les exploitations à ce jour certifiées HVE bénéficieront d’un certain nombre de facilités, par exemple, au niveau des éco-régimes, par rapport à la multiplicité des cultures ou aux contrôles phytos sur certains points de la Pac. On espère aussi qu’un jour les consommateurs reconnaîtront le HVE à sa juste valeur, au bénéfice des producteurs. Ce dossier et celui de la MAEC Zones intermédiaires ont été portés par l’AGPB, notamment sous la pression de la Côte-d’Or et de la Région BFC.

L’un des sujets du moment, c’est aussi la réforme du risque climatique. Que pourrez-vous en dire ?

J. d L. : Sur l’évolution de la prise en compte du risque climatique, il y a beaucoup d’évolutions. Le système est sanctuarisé pour les années à venir, alors qu’un certain nombre d’acteurs du marché assurantiel avait fait savoir à l’ancien ministre de l’Agriculture Julien Denormandie qu’ils étaient sur le point de se retirer si rien ne bougeait, après avoir fait face à des catastrophes successives. L’AGPB réclamait l’application du règlement européen Omnibus, qui existe depuis plus de six ans, mais que la France n’avait pas encore mis en application. Normalement, au 1er janvier 2023, ce sera chose faite. Les améliorations sur la question des contrats d’assurance concernent le niveau de franchise et de subventionnement des cotisations pour les agriculteurs. En zone intermédiaire, l’une des grosses attentes concernant l’abaissement de la franchise, compte tenu des niveaux de récolte catastrophiques dans certains cas, ces dernières années.

Quels sont les enjeux liés à la guerre en Ukraine ?

J. d L. : Nous nous mobilisons beaucoup sur le sujet de la fertilisation azotée à la suite du déclenchement de la guerre, qui a créé de fortes tensions, avec des augmentations de coûts de production jamais vues sur notre secteur. Maintenir une production végétale significative est un véritable enjeu, puisque l’Ukraine ne va pas pouvoir produire autant qu’elle le souhaiterait, pour une deuxième année consécutive, et nous voyons bien l’instabilité qui est ainsi créée sur les marchés français, européens et internationaux. J’étais, la semaine passée, à Madrid, dans le cadre d’Intercéréales, pour y faire la promotion des céréales françaises. Il y a de fortes demandes des utilisateurs espagnols qui s’approvisionnaient beaucoup en Ukraine pour le blé et le maïs. Aujourd’hui, ils sont très inquiets et les évènements de la semaine dernière (des attaques de bateaux chargés de céréales en Mer Noire N.D.L.R.) montrent que la guerre ne faiblit pas et qu’il y a toujours un enjeu fort sur le commerce des céréales. C’est pourquoi la filière céréalière française souhaite maintenir un volume de production important pour demeurer un acteur mondial qui compte. Il n’est pas besoin d’aller très loin en Europe pour comprendre que des pays comptent sur notre production céréalière…