Race charolaise
Le Sabot d’Or 2020 est saône-et-loirien !

Marc Labille
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Le Sabot d’Or 2020 de la race charolaise récompense cette année un élevage de Saône-et-Loire. C’est en effet l’EARL Touillon Didier de Palinges qui est à la première place de ce classement national.  

Le Sabot d’Or 2020 est saône-et-loirien !
À Palinges, Didier Touillon est à la tête d’un troupeau charolais de 160 vaches dont toute la production est engraissée, exceptés quelques reproducteurs valorisés dans les stations UCC.

Chaque année, Bovins Croissance établit un classement des élevages sur leurs performances technico-économiques mesurées en ferme. Un challenge met à l’honneur les exploitations cumulant performance, maîtrise des outils génétiques et rigueur technico-économique (lire encadré). Le meilleur élevage à l’échelle du département reçoit un Sabot de Bronze. Le premier au classement régional est quant à lui récompensé d’un Sabot d’Argent. La remise des récompenses départementales et régionales a eu lieu le 24 septembre dernier dans l’Yonne (lire L'Exploitant Agricole du 16 octobre dernier en page 5). Pour la seconde année consécutive, Didier Touillon était en tête du classement régional de la race charolaise. Et il est même le premier du classement national ce qui lui vaut le Sabot d’Or. Ce trophée prestigieux est habituellement remis, en grande pompe, lors du Sommet de l’Élevage. Malheureusement, le Covid-19 en a décidé autrement et c’est en mode confiné que l’organisme de contrôle de performances Alsoni est allé remettre le trophée à l’éleveur palingeois.

56 tonnes de viande vive produite par UMO !

Ce Sabot d’Or n’est pas le fruit du hasard, soulignaient à l’unisson les techniciens qui suivent l’élevage de Didier Touillon. Il récompense une haute productivité, qui perdure depuis cinq années consécutives. En effet, la productivité numérique du troupeau de l’éleveur palingeois atteint 107 % sur cinq ans. Une performance doublée d’une productivité très élevée : 475 kg de viande vive par UGB (unité gros bovins) et même 56 tonnes par UMO (unité de main-d’œuvre) ! Des chiffres très supérieurs aux moyennes départementales. 

« Cette réussite est le fruit d’un ensemble de petites choses qui ont une incidence importante sur le revenu », expliquait en introduction Arnaud Godard, d’Alsoni Conseil Élevage. Chez Didier Touillon, la mortalité des veaux de la naissance au sevrage ne dépasse pas 5,6 % sur cinq ans. Sur la campagne 2019, l’intervalle vêlage-vêlage n’était que de 367 jours. Ce qui rapproche très fortement de l’idéal d’un veau par vache et par an. 

Génétique et conduite des animaux

Les performances des animaux sont au rendez-vous. Les poids âge type à 210 jours des mâles – tout comme ceux des femelles - sont supérieurs de 30 kg par rapport aux moyennes raciales. Les veaux atteignent un poids âge type à quatre mois d’environ 200 kg : « un très bon démarrage qui reflète beaucoup de choses : génétique, conduite des animaux, etc. », commente Arnaud Godard.

Pour en arriver là, l’éleveur réalise des choix génétiques appropriés. « Ses objectifs de sélection sont les qualités maternelles : l’aptitude au vêlage, le lait, tout en restant très bon sur les facilités de naissance et la croissance », commente le technicien. Le cheptel a aussi la particularité de maintenir un bon équilibre entre le squelette et les muscles. « L’index aptitude bouchère est supérieur à la moyenne raciale », relève Alsoni qui ajoute que l’élevage « produit des bêtes lourdes mais avec une bonne valeur bouchère ». 

Les animaux ne trainent pas

L’EARL produit en moyenne 80 jeunes bovins par an vendus à 16 mois à un poids moyen de 458 kg. Au niveau national, les JB sortent des exploitations à 18 mois et 445 kg, indique-t-on pour comparaison. Dans ce cheptel à la moyenne d’âge jeune et qui pratique le vêlage dès deux ans, les vaches partent à l’âge moyen de six ans. Le poids de carcasse moyen est de 483 kg. Chiffre révélateur : les vaches de réformes partent en moyenne seulement neuf mois et demi après leur dernier vêlage. « Cela traduit une bonne gestion du temps de présence des vaches sur la ferme. Les animaux ne trainent pas », font remarquer les techniciens. Didier Touillon commercialise également une trentaine de génisses par an à l’âge moyen de 31 mois pour 424 kg de poids de carcasse. Mais il réfléchit d’ores et déjà à faire évoluer cette production en constatant la montée en puissance de la filière babynette. Un raccourcissement de cycle qui, en plus du vêlage à deux ans et de la performance, va dans le sens d’un meilleur bilan carbone, fait remarquer l’éleveur (lire encadré).

Le troupeau compte environ 160 vaches pour une SAU de 270 hectares. 84 ha sont consacrés à des cultures de céréales à paille, maïs et luzerne. Les vêlages sont groupés sur trois mois et dix jours avec un pic sur octobre-novembre. « Une conduite favorable à une meilleure gestion des vaccinations, des lots et de l’alimentation des mères », commente Arnaud Godard.

Travail d’équipe

Pour parvenir à de tels résultats, Didier Touillon fait montre d’un grand sens de l’organisation et de la rigueur. Sanitaire, soins aux veaux, surveillance, détection des vêlages… : rien n’est laissé au hasard ! « C’est aussi un travail d’équipe », commente Didier Touillon qui sait s’appuyer sur l’expertise de précieux partenaires. Et l’éleveur de rendre hommage à sa clinique vétérinaire, à sa coopérative d’insémination Elva Novia – la totalité des femelles sont inséminées depuis plus de dix ans, à son groupement Sicarev Coop, à Alsoni… « Le contrôle de performances fait progresser le troupeau et évoluer techniquement. C’est un super outil de comparaison. Un regard objectif sur mon troupeau. Et la pesée parle d’elle-même ! », confie l’éleveur. Toujours enclin à se poser beaucoup de questions, Didier Touillon est toujours à la recherche de ce qui pourrait être amélioré, ajusté, perfectionné, décrivent ses techniciens. Une propension à la remise en question qui l’a parfois amené à revoir complètement ses habitudes. Par exemple, lorsque sous l’impulsion de son technicien de groupement Pierre-Antoine Comte, il s’est mis à pratiquer des fauches très précoces pour réhausser la qualité de ses fourrages.

Pour l’éleveur de Palinges, ce Sabot d’Or est aussi une récompense pour son salarié, son binôme « très complémentaire » au quotidien sur la ferme. Didier Touillon rend aussi hommage à son papa Jean, « déjà en avance sur son temps à l’époque et qui m’a donné une certaine éducation ».

Des veaux sélectionnés dans le programme UCC

Les efforts de sélection et de conduite d’élevage accomplis depuis plusieurs années par Didier Touillon ont doté son troupeau d’un véritable potentiel génétique. Aussi, l’élevage a-t-il pris l’habitude de proposer ses meilleurs veaux aux stations d’évaluation de l’Union Charolais Croissance. Elles sont régies par un programme de procréation créé par Cyalin et Cecna. Charolais Horizon (Sicarev Coop) en est l’un des acteurs majeurs. Des accouplements sont réalisés en exploitation avec des taureaux à cumul génétique. Les veaux qui naissent de ces accouplements sont évalués dans les stations UCC. 200 veaux sortent de ces stations chaque année pour des ventes aux enchères. Didier Touillon en a valorisé trois par ce biais en 2019. « Ce système de station est intéressant pour révéler le cumul génétique accompli dans l’élevage », conclut Didier Touillon. 

En adéquation avec la filière et les attentes de la société

Naisseur-engraisseur, Didier Touillon tient à ce que sa production soit en adéquation avec la filière. L’éleveur veille en particulier à maîtriser l’évolution du poids de carcasse de ses vaches en augmentant la part des vêlages à deux ans d’où « un panel de poids de carcasse plus large », justifie-t-il. Didier Touillon est également attentif à la conformation de ses animaux et il est vigilant sur l’âge à l’abattage : les vaches commercialisées doivent avoir moins de huit ans. Cette stratégie qui tend à raccourcir les cycles de production, se traduit par davantage de kilos de viande vive produits par UGB. Elle répond aux attentes de la société en termes de bilan carbone mais aussi pour la taille des portions en magasin, fait valoir Didier Touillon.