BIVB
Face aux enjeux multiples, une belle récolte reste une bonne nouvelle

Berty Robert
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Les vendanges 2022 redonnent des couleurs aux stocks de vins de bourgogne. Ce n’est pas de trop face aux évolutions de consommation, au défi du changement climatique et à l’objectif de décarbonation que s’est fixé l’interprofession, récemment en assemblée générale à Beaune.

Face aux enjeux multiples, une belle récolte reste une bonne nouvelle
Lors de l'assemblée générale du BIVB à Beaune, Marie-Catherine Dufour, directrice technique du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) est venue présenter un état des lieux de la stratégie bas-carbone lancée par l'interprofession bordelaise en 2007. 

Il n'y a pas que le climat qui change ! Mi-décembre, au palais des congrès de Beaune, à l'occasion de son assemblée générale, le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVB) dressait le constat d'une évolution dans la consommation de vin, pas forcément en faveur des bourgognes.

Il y a d'abord une question de quantité : la consommation de vin est en baisse. Les Français en boivent une 40 litres par personne et par an. Il y a vingt-cinq ans, c'était 71 litres... On assiste aussi à une « bascule générationnelle » : de nouveaux consommateurs arrivent, beaucoup moins sensibles aux appellations et au prestige de certains noms, et beaucoup plus exigeants sur les conditions dans lesquelles le vin qu'ils boivent est produit. Que cela lui plaise ou non, le monde viticole bourguignon va devoir faire avec cette réalité. 

Mieux gérer les stocks

François Labet et Laurent Delaunay, les co-présidents de l'interprofession, ont fait le constat d'une vendange 2022 généreuse, bienvenue pour reconstituer des stocks mis à mal par la petite récolte de 2021, affectée par le gel. « Cette vendange, précisait Laurent Delaunay, s'accompagne d'un millésime prometteur. Retrouver du vin avec le millésime 22 devrait permettre de détendre la mise en marché. Les stocks se reconstituent, mais ils sont encore bas. Les réserves sont un outil de court et de moyen terme : le BIVB travaille à la conception d'outils de prévisions de stock. L'enjeu, c'est de parvenir à atténuer les phénomènes de petites et de grosses récoltes ». Dans ce contexte, la décision du Comité national des vins AOC prise début septembre d'autoriser les vins de bourgogne à dépasser exceptionnellement les rendements butoirs en 2022 a été très bien reçue. « En 2018, autre année de grande récolte, rappelait François Labet, des vins de grande qualité avaient dû être distillés. Nous apprécions cette année la compréhension dont ont fait preuve les pouvoirs publics pour éviter cela et permettre de constituer plus de réserves ». La gestion des volumes de la Bourgogne est de toute façon une dimension importante du volet Marchés & Développement du plan 2025 établi par le BIVB, au regard de l'évolution des exportations (-12 % sur les 9 premiers mois de 2022 par rapport à la même période de 2021) et de celle des volumes vendus en grande distribution en France (-25 % sur les 10 premiers mois de 2022 par rapport à la même période de 2021). 

Itinéraires techniques rentables et durables

Face aux menaces portées par ces évolutions, le BIVB agit sur plusieurs tableaux, qui vont de l'influence sur les réseaux sociaux et la prise en compte de nouvelles habitudes de consommation, à une réflexion sur les politiques de prix. L'important étant de ne pas perdre le contact avec les marchés. En parallèle, l'interprofession poursuit ses efforts afin de faire émerger et de promouvoir des itinéraires techniques rentables et durables. Le but est de travailler sur l'impact économique des changements de pratiques culturales, en lien avec les évolutions climatiques. On peut citer les plateformes d'étude du comportement de porte-greffes d'intérêt en Côte-d'Or et en Saône-et-Loire, ou encore le projet CepInnov sur les variétés résistantes, mené en commun avec le Comité Champagne. Il y a aussi la veille permanente sur les maladies (bois noir et flavescence dorée). Près de 25.000 hectares de vigne sont surveillés depuis 2013. Enfin, le grand chantier du BIVB, c'est l'objectif d'atteinte de la neutralité carbone pour le vignoble bourguignon à l'horizon 2035 en agissant sur les consommations énergétiques, les emballages, le fret, les déplacements ou les déchets. Une stratégie multi-axes ambitieuse qui n'en est encore qu'à ses prémices mais qui peut s'inspirer de ce qui a été lancé par les vins de Bordeaux en 2007 (lire notre édition du 23 décembre en page HH). L'AG du BIVB offrait l'occasion d'entendre sur le sujet Marie-Catherine Dufour, directrice technique du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB), venue parler d'un projet sur la diminution de l'empreinte carbone de la filière. En 12 ans, de 2007 à 2019, les émissions de Gaz à effet de serre (GES) de la filière vin bordelaise ont été réduites de 39 %. Une grosse part de cette baisse est à imputer à une diminution parallèle de la production, ce qui est un effet mécanique mais pas forcément une bonne nouvelle. Il faut toutefois noter que, entre 2012 et 2019, 12 % de la baisse des émissions de GES sont à mettre au crédit de l'évolution de l'efficacité énergétique des processus (transports, fabrication des intrants...). « En la matière, précisait la directrice technique du CIVB, il n'y a pas de choix idéal. Ceux qui sont faits ont forcément d'autres impacts ». Exemple : une hausse constatée de 18 % des émissions de GES entre 2012 et 2019 entraînée par la nécessité de passer plus souvent dans les vignes, en lien avec des évolutions de pratiques culturales qui se veulent pourtant vertueuses au départ... À l'horizon 2050, le CIVB se fixe une réduction de 74 % des émissions de GES et il faudra parvenir à concilier ces objectifs avec une réduction des coûts. La clé est peut-être dans des actions communes, comme le soulignait en conclusion Marie-Catherine Dufour : « Si les filières Bordeaux, Bourgogne et Champagne font pression ensemble sur les fournisseurs de bouteilles pour qu'ils réduisent leur empreinte carbone, cela peut contribuer au résultat final ».