Syndicat caprin
Le syndicat caprin veut miser sur la transparence

Ariane Tilve
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À l’occasion de l’Assemblée générale, qui s’est tenue jeudi 8 décembre à Chenôves, le président Jean-Philippe Bonnefoy a insisté sur l’importance de la communication et des portes ouvertes pour préserver une filière mise à mal par l’affaire Thévenet / L214.

Devant la cinquantaine d’adhérents et d’intervenants regroupés devant lui, Jean-Philippe Bonnefoy n’en démord pas, la meilleure façon de réagir à la crise médiatique est de montrer à l’opinion publique, aux consommateurs, comment travaillent les éleveurs. À commencer par les nouveaux installés qui ne doivent pas hésiter à organiser des journées portes ouvertes. C’est l’occasion de se faire connaître, même si ce type d’évènement requiert une mobilisation de la main-d’œuvre et du temps, dont les exploitants manquent cruellement. « Avec ce qui s’est passé en Saône-et-Loire, il est important de montrer comment ça se passe dans une ferme. Je sais que ce n’est pas rien, que ça demande du travail et de l’organisation », insiste le président du syndicat.

Pourtant, les initiatives ne manquent pas dans le monde caprin. L’été, certains proposent aux visiteurs de participer à la traite du soir, une façon de leur faire comprendre l’ampleur de la tâche. Philibert Gonot, administrateur du syndicat et membre du Gaec Rusilly, fait figure d’exemple en matière de rencontres pédagogiques. Il a l’habitude, avec ses deux associés et l’office du tourisme de Chalon-sur-Saône, de faire visiter sa ferme tous les mardis soir en juillet et en août. Une trentaine de personnes accompagnent chaque semaine l’éleveur pour aller chercher les chèvres, dans le pré situé à un kilomètre de là, moyennant une participation de 5 €. Hors vacances scolaires, il est également possible de solliciter les écoles, qui disposent d’enveloppes pour les sorties à la ferme. La Commission des agricultrices 71 organise, elle aussi, régulièrement des journées portes ouvertes et va même dans les collèges durant la semaine du goût pour effectuer ce travail pédagogique auprès d’enfants particulièrement curieux. Comment ne pas évoquer la Transhubique de Davayé qui peut rassembler 1.200 personnes pour un coup de projecteur extrêmement important sur la filière. Bien que ces journées soient très contraignantes pour les éleveurs, elles s’avèrent payantes. Le jour J, d’abord, avec des ventes directes, mais aussi sur les marchés, lorsque les visiteurs reconnaissent un producteur ou viennent à sa rencontre, mais aussi par le bouche-à-oreille.

Les risques sanitaires


Outre la crise médiatique, c’est le risque sanitaire qui menace certains éleveurs. D’où l’intérêt de miser, encore et toujours, sur la prévention qui ne cesse d’évoluer. Le 27 janvier à Charolles, une après-midi d’information sera dédiée aux alertes sanitaires et notamment aux cas de listeria. L’occasion de faire un rappel réglementaire et un état des lieux de ce qui existe sur le département avec des intervenants tels que Guillemette Allut pour le conseil en transformation de produits laitiers, Ludivine Perrachon du GDS 71 pour l’élevage et Virgil Guisard de la DDPP qui précise : « On observe ces dernières années de plus en plus de cas et des cas de plus en plus difficiles à gérer parce que l’origine est de plus en plus compliquée à trouver et la sortie de crise peut être catastrophique. D’où l’importance de ces journées. Il est également important de savoir à qui s’adresser et ce genre de journée vous permet de rencontrer les différents acteurs. Quant au guide de bonne pratique, il va notamment vous apprendre à identifier l’origine, notamment. D’autant plus que ce guide bientôt va devenir obligatoire (lire encadré) ». Le président du syndicat rappelle que cela peut arriver à tout le monde. « Il faut mettre en avant l’autosurveillance, insiste Jean-Philippe Bonnefoy, apprendre à réagir quand cela arrive avec une mise à jour du guide des bonnes pratiques d’hygiène GBPH. Une séance est prévue à Davayé et il y a très peu d’inscrits. Il est pourtant essentiel d’y participer pour apprendre à anticiper. Quand on a un germe pathogène au beau milieu d’une flore lactique très dynamique, il y a peu de chance d’avoir des problèmes, mais c’est important de savoir, au cas où ».

Julien Chardeau, membre du Gaec de la Gravaise, a été victime de listeria monocytogenes. Il témoigne de l’aide que lui ont apporté Ludivine et Guillemette mais aussi la DDPP. Il insiste sur la nécessité d’obtenir une aide financière, mais aussi psychologique, « sans aide, on ne s’en sort pas, dit-il. Nous avons une structure diversifiée, nous avons donc rebondi autrement. C’est un coup dur qui peut mettre en péril l’exploitation, surtout chez de jeunes installés. Il faut aussi et surtout vérifier ses assurances. Le chiffre d’affaires perdu, lui, n’est pas assuré ». Julien Chardeau estime en outre que les règles sanitaires en vigueur peuvent paraître injustes. Il a dû, pour sa part, attendre que la dernière chèvre ait mis bas pour envisager la sortie de crise, après plus de quatre mois. Sans oublier l’impact sur la transformation. « Nous avons dû pasteuriser du lait, et nos clients n’y étaient pas habitués », précise l’éleveur, également président du GDS 71, qui a décidé d’intégrer une ligne de cotisation pour les caprins et les ovins lait cru. La voix d’une adhérente retentie, regrettant que les prestations de certaines assurances soient « plafonnées à 14 ou 15.000 € ».

L’épineuse question des abattoirs pour la filière chevreaux

Les abattoirs disponibles pour la filière dans le département sont Charlieu, avec un maximum de cinquante chevreaux par semaine, Autun pour cent chevreaux par semaine, tous éleveurs confondus, ou encore Lons-le-Saunier. Jusqu’à présent, il n’y avait pas énormément de demande, donc il n’y a pas beaucoup d’offres. La DDT et les services vétérinaires sont néanmoins informés du manque de structures. Informer n’est plus suffisant pour Cécile Jacob, éleveuse : « En Saône-et-Loire, nous ne sommes pas assez bien pourvus. Nous avons choisi Charlieu, qui dispose d’un restrainer. Nous avons été supprimés de la liste d’autres abattoirs autorisés à abattre les moutons sans restrainer, justement parce qu’ils n’étaient pas équipés. J’ai voulu me rapprocher de l’OS mouton charollais, du fait de la proximité de nos bêtes. Mais ils n’ont pas voulu aller plus loin. Il reste Autun, mais nous avons abandonné parce qu’ils nous mettaient une surtaxe sur la chèvre ».

Julien Chardeau travaille, lui, avec l’abattoir d’Autun, mais se contente d’y amener ses chèvres puisque c’est la Feder de Saint-Rémy qui se charge de récupérer et de découper la viande qu’il récupère sous vide. Dans les départements frontaliers, tels le Rhône, il existe des projets d’abattage à la ferme. Car si les restrainer sont un atout, ils ne résolvent pas tous les problèmes des abattoirs. « Les couloirs y sont adaptés aux bovins et à 5 heures du matin personne n’a envie de courir après des chevreaux, c’est compliqué, ce n’est pas aux normes et cela ne passera jamais dans leurs budgets », renchérit Cécile Jacob. Dans les départements frontaliers comme le Rhône, il existe des projets d’abattage à la ferme. « En Saône-et-Loire, on nous oppose une fin de non-recevoir pour des projets similaires », se désole l’exploitante.

Nathalie Delara, membre de la DDT présente à l’Assemblée générale, conseille de monter les projets et de s’accrocher insistant sur le fait qu’il s’agit d’un sujet en cours qui fait l’objet de débats en ce moment au Conseil général de Bourgogne-Franche-Comté. La profession cherchant des soutiens financiers. Un éleveur en appelle aussi à la DDT, estimant qu’il faut rassurer les prestataires en expliquant que c’est une filière viable pour redonner, l’année prochaine, les autorisations nécessaires à celles et ceux qui pourraient les demander. « Le résultat, estime un adhérent, est que de plus en plus d’éleveurs font le choix de ne plus faire naître de chevreaux ».

Le 23 janvier le Lycée professionnel de Davayé organise une formation permettant d’identifier les différents dangers sanitaires, les risques associés et les moyens de les maîtriser. Il s’agit d’être capable d’utiliser le Guide de bonnes pratiques ’'hygiène (GBPH) européen et de mettre en place son Plan de maîtrise sanitaire (PMS). ’'objectif est de comprendre les modes de contamination, les risques pour la santé mais aussi les principaux dangers chimiques et physiques. Vous apprendrez à analyser ces dangers mais aussi les obligations en terme d’autocontrôle et de traçabilité. Plus de renseignement au 03.85.35.83.33, par mail cfppa.davaye@educagri.fr ou sur le site www.viticapformation.fr.