FRSEA Bourgogne Franche-Comté
Quelle stratégie pour la formation professionnelle agricole en Bourgogne Franche-Comté?

La profession agricole a été alertée par de nombreux centres de formation agricole au sujet des nouvelles modalités de l’appel d’offres du Conseil régional Bourgogne Franche-Comté, pour les formations proposées aux demandeurs d’emploi, prévues à la rentrée 2024. Membre de la commission formation de la FNSEA et administratrice à la FRSEA Bourgogne Franche-Comté, Isabelle Bailly a à s’exprimer dans un édito.


Quelle stratégie pour la formation professionnelle agricole en Bourgogne Franche-Comté?

Dans le domaine de la formation, il est important de rappeler le contexte :
- Il y a de nombreux métiers en tension. La pénurie de main-d’œuvre pénalise fortement les secteurs de la production agricole, l’agroalimentaire, le bois, …
- Nous avons de moins en moins de main-d’œuvre familiale et la nécessité de faire venir des hors cadres familiaux et des personnes en reconversion devient une priorité ;
- Nos métiers sont passionnants, mais exigeants en compétences à la fois pratiques et techniques. Nous avons besoin d’acquérir de nouvelles connaissances en agronomie, au niveau du bien-être animal, en communication, …

Les orientations de la Région sont parfois difficiles à comprendre :
- En accordant des points supplémentaires aux jeunes s’installant sans formation ;
- En demandant aux agriculteurs de solliciter de plus en plus de conseils extérieurs : audits stratégiques, études, diagnostics, …
La profession pense bien au contraire, qu’il faut d’abord s’appuyer sur les compétences théoriques et pratiques indispensables des agriculteurs et agricultrices !

Les formations doivent évoluer et s’adapter aux besoins du marché de l’emploi, mais baisser de 50 % toutes les formations professionnelles agricoles, n’ouvre guère de perspectives pour nos métiers !

Les pôles d’excellence qui ont été mis en place après plusieurs années d’investissements humains ne doivent pas être balayés d’un revers de main : avec la viticulture en Saône-et-Loire, l’élevage laitier dans le Doubs, l’élevage de la Nièvre, l’agronomie en Côte-d'Or, la mécanique en Haute-Saône, les techniques fromagères dans le Jura, l’horticulture dans le Territoire de Belfort les métiers du paysage dans l’Yonne…

Ne faudrait-il pas faire plus confiance aux agriculteurs formés pour assurer les nombreuses missions qui leur sont demandées : produire des biens alimentaires, respecter l’environnement, …

Le secteur agricole a besoin de jeunes motivés et bien formés pour préparer l’agriculture de demain et peut-être un peu moins de surréglementation, de contrôle, pour ne pas perdre le sens de notre métier et assurer la souveraineté alimentaire de notre pays, avec une agriculture durable qui prend en compte le changement climatique.

S’il y a une baisse des crédits de l’État pour notre Région, il est important de se mobiliser pour la prise en compte de nos spécificités et défendre de nouvelles enveloppes (Ministères, FEADER, FSE, …). Si au niveau national, les métiers du vivant ne sont pas en tension, pour notre Région, ce n’est pas le cas. Une plus grande concertation entre l’État en Région, la Région et la profession est indispensable pour trouver des réponses à la hauteur des enjeux et pour la pérennité des centres de formation agricole de Bourgogne Franche-Comté

Incompréhension

Pour rappel, l’ensemble de la profession est extrêmement surpris de la décision du Conseil régional qui entraîne la suppression de nombreuses formations professionnelles dans les secteurs agricole et viticole. Pour le seul réseau des CFPPA Bourgogne Franche-Comté, c’est près de 50 % des places ouvertes dans l’appel d’offres initial qui ont été supprimées, par rapport à l’appel d’offres de 2019, pour le marché 2020-2023. Dans le contexte économique actuel, la FRSEA rappelle être « conscient des contraintes budgétaires pour l’État comme pour la Région. Nous savons aussi que ces nouveaux arbitrages sont liés à une baisse des crédits d’état dans le cadre du PRIC d’environ 45 %, par rapport à 2022 ».

Pour autant, l’incompréhension est grande. « Plusieurs formations qualifiantes, ouvrant sur des métiers en forte tension, seraient purement et simplement supprimées (BTSA niveau 5, BPREA niveau 4) avec, de fait, une mise en concurrence accrue des organismes de formation sur plusieurs formations spécialisées très recherchées (spécialisation tracteurs et machines agricoles), ainsi que sur des formations indispensables à l’installation. Ces nouvelles règles menacent l’équilibre financier de certains organismes de formation ; ce qui fragilise le maillage territorial des formations et la pérennité de certaines filières ». Les métiers du vivant sont en forte tension et la profession agricole alerte les services de l’État et de la Région, depuis plusieurs mois, à ce sujet. Surtout que la profession agricole en Bourgogne Franche-Comté s’est organisée avec les représentants des employeurs et des salariés agricoles pour développer de nombreuses actions sur la promotion des emplois agricoles en accompagnant les agriculteurs et en valorisant les métiers de l’agriculture, de l’élevage et de la viticulture. « Nos secteurs d’activité ont de grandes difficultés à recruter des personnes qualifiées. Comment nos filières agricoles pourront-elles attirer de nouvelles compétences et poursuivre leur développement si les offres de formations sont réduites, voire supprimées ? », pose en question la FRSEA. Car et c’est là, le paradoxe le plus incompréhensible, « l’agriculture et l’agroalimentaire ont bien été reconnus comme des secteurs prioritaires pour les métiers en tension au niveau régional. C’est donc des secteurs d’activité, essentiel à notre région, qui se trouvent impactés ».

Les réponses de la Région sur le financement des formations agricoles

Voici pour l'heure, la seule réponse du Conseil Régional : « Au niveau de la formation professionnelle, il y avait une contractualisation avec l’État et la Région, ce plan permettait d’avoir un budget de 149 millions d’euros. L’État n’a pas renouvelé, pour l’instant, sa contractualisation. La Région, elle a augmenté les moyens pour la formation professionnelle agricole qui passent de 83 millions à 98 millions d’euros soit plus 15 millions. Pour les formations agricoles, il y aurait des formations incomplètes », ce qui pourrait expliquer la baisse justifiée des crédits, explique la Région.

La FRSEA fait toutefois comme remarque que « ses arbitrages proposés ont été réalisés sans concertation avec la profession et nécessitent des adaptations pour ajuster les formations aux besoins prioritaires de la profession, tout en regardant les financements complémentaires qui pourraient être mobilisés ».