Gaec de la Griffonnière à Mervans
Au Gaec de la Griffonnière à Mervans, robot de traite et pâturage font bon ménage !

Marc Labille
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Dans la perspective du départ en retraite de ses parents, Julien Desbois a installé un robot de traite dans son bâtiment de dix ans. Cette évolution n’a pas remis en cause le pâturage des animaux auquel la famille Dubois est très attachée. Et les bénéfices sont nombreux : bien-être des animaux, gain de production, économie de ration et même qualité de vie pour les associés.

Au Gaec de la Griffonnière à Mervans, robot de traite et pâturage font bon ménage !
Pour Julien et Jean-Paul Desbois, le maintien du pâturage était une question de principe.

Le Gaec de la Griffonnière est composé de Julien et Jean-Paul Desbois, aidés de Monique. Sur un peu plus de 200 hectares à Mervans, la famille Desbois conduit un troupeau d’environ 75 montbéliardes dont un peu plus de soixante en lactation pour une production de 615.000 litres de lait. Une quinzaine de vaches allaitantes complète l’effectif depuis l’installation de Julien en 2008. Mâles charolais et montbéliards sont engraissés sur place.

En 2010, le Gaec avait construit un nouveau bâtiment laitier équipé d’une salle de traite en épi 2X6. À l’époque, le robot de traite n’avait pas été envisagé car la production de l’exploitation était moins importante qu’aujourd’hui ; l’investissement était jugé trop conséquent et pour un troupeau conduit en pâturage, le robot n’était pas encore très « inscrit dans les mentalités », confie Julien. Les choses ont évolué avec la perspective du départ en retraite des parents du jeune éleveur. Ce dernier commençait à envisager l’avenir de l’exploitation sans l’aide de ses parents. Un robot était une solution pour anticiper la baisse de main-d’œuvre et soulager l’astreinte biquotidienne de la traite, fait valoir Julien qui signale aussi le temps de travail demandé par les cultures.

« Voir nos vaches au pré »

Au Gaec de la Griffonnière, les vaches laitières ont toujours eu accès au pâturage et la famille Dubois en fait une véritable « philosophie : nous aimons voir nos vaches au pré », revendiquent en cœur Jean-Paul et Julien Desbois. Le passage à la traite robotisée s’est avéré relativement simple à réaliser en termes de transformation sur la ferme. Le robot de traite Lelly « Astronaut A5 » a été implanté sur les caillebotis à l’entrée de la salle de traite qu’il n’a pas été nécessaire de casser. À l’autre bout de la stabulation, une porte de tri gère les sorties des vaches au pâturage. Les huit hectares de prairies pâturées au temps de la salle de traite sont inchangés. Ce pâturage se divise en trois parcelles dans un rayon de 300 – 400 mètres de distance par rapport à la stabulation.

Le robot et la porte de tri reconnaissent les vaches grâce au collier électronique qu’elles portent au cou. Chaque vache est autorisée à se faire traire quatre fois par jour maximum (toutes les six heures minimum). En fin de lactation, leur droit à se faire traire se réduit à deux traites par jour, « pour freiner la lactation », confie Jean-Paul.

« Casser l’effet troupeau »

« Avec un robot, il faut arriver à casser l’effet troupeau. Avec une salle de traite, les vaches vont toutes ensemble et en même temps à la traite. Avec le robot, il faut qu’elles aillent se faire traire tout au long de la journée. Or la difficulté du pâturage, c’est que cela recrée cet effet troupeau », explique Jean-Paul. De fait, au printemps, les vaches sont toutes « excitées de sortir », si bien que les 15 premiers jours, « on ne les lâche que pendant deux heures pour qu’elles ne soient pas trop longtemps sans se faire traire », expliquent les associés qui sont parfois obligés de les rentrer vers midi pour les inciter à aller au robot. En automne, lorsque les nuits s’allongent, le troupeau, qui passe la nuit à l’intérieur, est parfois plusieurs heures sans aller au robot. Au petit matin, les laitières font la queue derrière la machine car elles veulent toutes être traites en même temps ! En moyenne, chaque vache se fait traire 2,4 fois par jour (2,5 en hiver sans pâturage).

Le droit de sortir…

La nuit, les vaches sont fermées dans le bâtiment où elles trouvent de l’eau et à manger. Une ration « volontairement déséquilibrée pour créer un manque que la vache va chercher au robot où elle reçoit une dose de concentrés », explique Jean-Paul. Le jour levé, elles ont la possibilité d’accéder au pâturage, à condition d’avoir été traites dans un délai donné. Si ce n’est pas le cas, la porte de tri ne les laisse pas sortir et la vache doit retourner dans la stabulation. En général, après avoir essuyé ce refus, l’animal comprend très vite qu’elle doit passer par le robot pour pouvoir aller dehors. Une fois traite, la vache va se désaltérer puis retente de passer la porte de tri. Dans la journée, le plus souvent par petits groupes, les vaches vont et viennent ainsi entre la prairie et le bâtiment au gré de leurs envies.

À la mise en route du robot, le plus complexe a été « de casser le rythme de la traite », confient Jean-Paul et Julien. Une transition d’un mois a été nécessaire pour arriver à ce que les vaches se fassent traire tout au long de la journée. Certaines génisses nécessitent une intervention pour les habituer, complètent les intéressés.

Santé des pattes…

Le passage au robot a imposé une diminution du nombre de vaches en lactation. Mais elle est compensée par une hausse de production individuelle de + 1.000 kg de lait par vache et par an, fait valoir Julien. Avec 65 vaches à la place de 72-75 auparavant, les animaux sont moins serrés, ajoute l’éleveur. Et outre l’effet stimulant de la traite automatisée, l’introduction d’une complémentation individualisée est un autre facteur de progrès.

La famille Dubois est également convaincue du bénéfice lié au pâturage avec le robot. Évoquant le bien-être animal qu’ils constatent chaque jour sur leurs montbéliardes, les associés soulignent aussi le bénéfice sur la santé des pieds due aux aller et venue au pré. Sachant que les problèmes de pattes sont un souci récurrent avec un robot sans pâturage, signalent-ils.

Bien sûr, Julien et Jean-Paul ne manquent pas d’apprécier l’économie générée par l’ingestion d’herbe au pré. En pleine pousse printanière, l’herbe broutée peut se traduire par une demie ration en moins, font-ils valoir. Les parcelles sont d’ailleurs renouvelées tous les cinq ans environ avec un couvert de trèfle blanc et de ray gras italien.

En 2021, les vaches sont retournées au pâturage à partir du 24 mars et leurs sorties cesse en principe vers la fin du mois d’octobre. Le pâturage est parfois interrompu en cas de forte pluie. En été, quand l’herbe vient à manquer ou en cas de canicule, les vaches ne sortent que la nuit.

Qualité de vie

Le coût de la robotisation de la traite au Gaec de la Griffonnière est revenu à 170.000 € (mise en route début 2020). Dans ce montant est inclus le robot de traite, la porte de tri et un robot repousse fourrages. La porte d’accès au pâturage représente un supplément de 8.700 €, indique Julien. Mais cet investissement est compensé par les bénéfices en termes de santé et l’économie de ration, fait valoir le jeune éleveur. En outre, le robot a fait gagner en sérénité ; « les bêtes sont plus calmes », confirme Julien qui signale aussi des bénéfices en termes de qualité de vie. Papa de deux jeunes enfants, il apprécie de pouvoir prendre le petit-déjeuner avec eux chaque matin plutôt que d’être systématiquement pris durant 1 h 30 par la salle de traite. S’il ne dispense pas d’une surveillance et d’une présence régulière auprès des vaches, le robot donne cependant plus de souplesse dans les horaires. C’est appréciable pour les travaux des champs, confie Julien Desbois.

Indicateurs de santé

Avec le robot de traite, le Gaec de la Griffonnière dispose désormais de nouveaux indicateurs de santé de leurs animaux. En effet, les colliers électroniques portés par les vaches enregistrent de nombreuses données permettant de déduire le détail de leur activité (repas, déplacement, rumination…). Le système permet de suivre les chaleurs et de détecter les vaches malades. Toutes ces données sont centralisées et visibles sur l’écran de l’ordinateur de la ferme qui indique aussi, vache par vache, le niveau de production, les cellules, etc…