Verre à moitié plein pour le gamaret dans les appellations beaujolaises
Après plusieurs années d’études et d’expérimentations, les ODG du Beaujolais n’ont pas pris la même décision concernant l’introduction du cépage gamaret dans leur cahier des charges. Explications.

A partir de 1989, le Beaujolais via l’institut technique de la Sicarex a porté un intérêt pour ce cépage issu d’un croisement entre le gamay et le riechensteiner B, un cépage blanc, et obtenu en 1970 par l’Agroscope de Changin-Wädenswil (ACW). En 2001, une centaine de pieds ont été plantés en collection VATE (Valeur agronomique technologique et environnementale) avant que le gamaret n’ait été inscrit dans le catalogue officiel des cépages en 2008. « Cette même année, il a fallu créer un clone français pour des questions règlementaires, la Suisse ne faisant pas partie de l’Union européenne. En attendant, nous avons planté une vigne mère de greffons, ce qui nous a permis d’obtenir nos premiers vins en 2010 au Château de l’Eclair », recontextualise Bertrand Chatelet, directeur de la Sicarex.
En 2013, en constatant les qualités de ce cépage très peu sensible au botrytis et aux baies riches en polyphénols, les responsables professionnels de l’époque ont naturellement jugé bon de l’intégrer dans le cahier des charges. Un an plus tard, l’INAO a reconnu l’antériorité du travail fourni autour du gamaret, mais a demandé trois années d’études supplémentaires pour un assemblage avec le gamay à hauteur de 10 %.
Nous voilà donc en 2017. L’IFV* - Sicarex Beaujolais a rendu en juin son rapport d’expérimentation (lire par ailleurs) et l’a présenté aux deux ODG et aux membres de la commission Recherche et développement d’Inter Beaujolais. Malgré des résultats convaincants issus de l’expérimentation, les deux conseils d’administration des ODG n’ont pas pris la même décision concernant l’intégration de ce cépage dans leur cahier des charges.
L’ODG beaujolais - beaujolais villages associés (BBVA) a misé sur ce cépage. Si l’introduction du gamaret a suscité des débats et engendré des résultats serrés à l’issue du vote, c’est une décision logique qu’ont pris les élus de l’ODG BBVA, selon Patrice Dumas, président de la Sicarex Beaujolais. « Je suis convaincu que le gamaret améliorera le profil de nos vins par rapport aux attentes des consommateurs. Ce cépage accessoire nous permettra aussi de réduire l’usage de la thermovinification pour les vins de garde. On respectera mieux le terroir. Enfin, lors des débats, il a été question du réchauffement climatique, qui ne joue pas en la faveur du gamaret. Mais la pluie peut toujours entraîner des foyers de pourriture et la résistance du gamaret au botrytis est un atout », commente-t-il.
Le repli, un facteur divergent
Pour Daniel Bulliat, président de l’ODG BBVA, l’envie d’intégrer le gamaret dans le cahier des charges s’inscrit dans la diversification prônée par l’ODG. « Le profil technique du gamaret nous a aussi convaincus », confirme-t-il. Or, c’est sur le plan politique qu’une zone d’ombre apparaît. En effet, le 10 juillet 2014, la commission permanente du comité national de l’INAO avait alerté les ODG sur le fait qu’une éventuelle introduction du gamaret dans les cahiers des charges empêcherait tout repli dans une appellation plus générale. En effet, le gamaret n’entre pas dans la composition de l’encépagement des AOC régionales de Bourgogne. Ainsi, les vins AOC beaujolais et beaujolais villages ne pourraient plus être repliés en coteaux bourguignons. « On sera attentif à cette problématique de repli », confie Daniel Bulliat. Cette décision traduit surtout une volonté des élus de valoriser avant tout l’identité beaujolaise, tout en gardant en point de mire la montée en gamme.
C’est justement cette impossibilité de repli qui a freiné les membres du conseil d’administration de l’ODG des crus. Les vins des différents crus du Beaujolais ne pourraient plus être repliés en beaujolais ou beaujolais villages, ni en bourgogne gamay. Comme l’indique Audrey Charton, la présidente, la priorité a été donnée à la « hiérarchisation (lieux-dits, climats) et la mise en valeur du gamay qui permet de produire de bons vins quand il est bien travaillé. Nous sommes dans l’esprit que le gamay se suffit à lui-même ».
Pour autant, le dossier gamaret n’est pas totalement clos pour plusieurs raisons. Selon nos informations, l’INAO attend encore les conclusions de l’expérimentation sur l’introduction du gamaret au sein de l’encépagement des AOC du Beaujolais. Elle a aussi interrogé les deux ODG mais n’a pas encore reçu de réponse officielle sur leur position, ce sujet devant être présenté et voté en assemblée générale.
Ensuite, comme indiqué précédemment, pour que les vins puissent être repliés, il est nécessaire que les cahiers des charges soient compatibles au regard des conditions de production, et notamment l’encépagement. Ce principe général avait été décidé par la commission permanente du comité national lors de sa séance du 25 mars 2010. Comme le confirme Daniel Bulliat, il a donc été évoqué la possibilité de négocier avec l’ODG bourgogne pour qu’il accepte d’intégrer à son tour le gamaret dans les cahiers des charges. Les cartes sont donc entre les mains de l’ODG bourgogne tandis qu’une issue favorable de ce dossier pourrait logiquement inciter l’ODG des crus à revoir sa position actuelle.
Tout reste à faire donc pour que le gamaret s’implante dans le Beaujolais…
David Duvernay
*Institut français de la vigne et du vin
Verre à moitié plein pour le gamaret dans les appellations beaujolaises

A partir de 1989, le Beaujolais via l’institut technique de la Sicarex a porté un intérêt pour ce cépage issu d’un croisement entre le gamay et le riechensteiner B, un cépage blanc, et obtenu en 1970 par l’Agroscope de Changin-Wädenswil (ACW). En 2001, une centaine de pieds ont été plantés en collection VATE (Valeur agronomique technologique et environnementale) avant que le gamaret n’ait été inscrit dans le catalogue officiel des cépages en 2008. « Cette même année, il a fallu créer un clone français pour des questions règlementaires, la Suisse ne faisant pas partie de l’Union européenne. En attendant, nous avons planté une vigne mère de greffons, ce qui nous a permis d’obtenir nos premiers vins en 2010 au Château de l’Eclair », recontextualise Bertrand Chatelet, directeur de la Sicarex.
En 2013, en constatant les qualités de ce cépage très peu sensible au botrytis et aux baies riches en polyphénols, les responsables professionnels de l’époque ont naturellement jugé bon de l’intégrer dans le cahier des charges. Un an plus tard, l’INAO a reconnu l’antériorité du travail fourni autour du gamaret, mais a demandé trois années d’études supplémentaires pour un assemblage avec le gamay à hauteur de 10 %.
Nous voilà donc en 2017. L’IFV* - Sicarex Beaujolais a rendu en juin son rapport d’expérimentation (lire par ailleurs) et l’a présenté aux deux ODG et aux membres de la commission Recherche et développement d’Inter Beaujolais. Malgré des résultats convaincants issus de l’expérimentation, les deux conseils d’administration des ODG n’ont pas pris la même décision concernant l’intégration de ce cépage dans leur cahier des charges.
L’ODG beaujolais - beaujolais villages associés (BBVA) a misé sur ce cépage. Si l’introduction du gamaret a suscité des débats et engendré des résultats serrés à l’issue du vote, c’est une décision logique qu’ont pris les élus de l’ODG BBVA, selon Patrice Dumas, président de la Sicarex Beaujolais. « Je suis convaincu que le gamaret améliorera le profil de nos vins par rapport aux attentes des consommateurs. Ce cépage accessoire nous permettra aussi de réduire l’usage de la thermovinification pour les vins de garde. On respectera mieux le terroir. Enfin, lors des débats, il a été question du réchauffement climatique, qui ne joue pas en la faveur du gamaret. Mais la pluie peut toujours entraîner des foyers de pourriture et la résistance du gamaret au botrytis est un atout », commente-t-il.
Le repli, un facteur divergent
Pour Daniel Bulliat, président de l’ODG BBVA, l’envie d’intégrer le gamaret dans le cahier des charges s’inscrit dans la diversification prônée par l’ODG. « Le profil technique du gamaret nous a aussi convaincus », confirme-t-il. Or, c’est sur le plan politique qu’une zone d’ombre apparaît. En effet, le 10 juillet 2014, la commission permanente du comité national de l’INAO avait alerté les ODG sur le fait qu’une éventuelle introduction du gamaret dans les cahiers des charges empêcherait tout repli dans une appellation plus générale. En effet, le gamaret n’entre pas dans la composition de l’encépagement des AOC régionales de Bourgogne. Ainsi, les vins AOC beaujolais et beaujolais villages ne pourraient plus être repliés en coteaux bourguignons. « On sera attentif à cette problématique de repli », confie Daniel Bulliat. Cette décision traduit surtout une volonté des élus de valoriser avant tout l’identité beaujolaise, tout en gardant en point de mire la montée en gamme.
C’est justement cette impossibilité de repli qui a freiné les membres du conseil d’administration de l’ODG des crus. Les vins des différents crus du Beaujolais ne pourraient plus être repliés en beaujolais ou beaujolais villages, ni en bourgogne gamay. Comme l’indique Audrey Charton, la présidente, la priorité a été donnée à la « hiérarchisation (lieux-dits, climats) et la mise en valeur du gamay qui permet de produire de bons vins quand il est bien travaillé. Nous sommes dans l’esprit que le gamay se suffit à lui-même ».
Pour autant, le dossier gamaret n’est pas totalement clos pour plusieurs raisons. Selon nos informations, l’INAO attend encore les conclusions de l’expérimentation sur l’introduction du gamaret au sein de l’encépagement des AOC du Beaujolais. Elle a aussi interrogé les deux ODG mais n’a pas encore reçu de réponse officielle sur leur position, ce sujet devant être présenté et voté en assemblée générale.
Ensuite, comme indiqué précédemment, pour que les vins puissent être repliés, il est nécessaire que les cahiers des charges soient compatibles au regard des conditions de production, et notamment l’encépagement. Ce principe général avait été décidé par la commission permanente du comité national lors de sa séance du 25 mars 2010. Comme le confirme Daniel Bulliat, il a donc été évoqué la possibilité de négocier avec l’ODG bourgogne pour qu’il accepte d’intégrer à son tour le gamaret dans les cahiers des charges. Les cartes sont donc entre les mains de l’ODG bourgogne tandis qu’une issue favorable de ce dossier pourrait logiquement inciter l’ODG des crus à revoir sa position actuelle.
Tout reste à faire donc pour que le gamaret s’implante dans le Beaujolais…
David Duvernay
*Institut français de la vigne et du vin
Verre à moitié plein pour le gamaret dans les appellations beaujolaises

A partir de 1989, le Beaujolais via l’institut technique de la Sicarex a porté un intérêt pour ce cépage issu d’un croisement entre le gamay et le riechensteiner B, un cépage blanc, et obtenu en 1970 par l’Agroscope de Changin-Wädenswil (ACW). En 2001, une centaine de pieds ont été plantés en collection VATE (Valeur agronomique technologique et environnementale) avant que le gamaret n’ait été inscrit dans le catalogue officiel des cépages en 2008. « Cette même année, il a fallu créer un clone français pour des questions règlementaires, la Suisse ne faisant pas partie de l’Union européenne. En attendant, nous avons planté une vigne mère de greffons, ce qui nous a permis d’obtenir nos premiers vins en 2010 au Château de l’Eclair », recontextualise Bertrand Chatelet, directeur de la Sicarex.
En 2013, en constatant les qualités de ce cépage très peu sensible au botrytis et aux baies riches en polyphénols, les responsables professionnels de l’époque ont naturellement jugé bon de l’intégrer dans le cahier des charges. Un an plus tard, l’INAO a reconnu l’antériorité du travail fourni autour du gamaret, mais a demandé trois années d’études supplémentaires pour un assemblage avec le gamay à hauteur de 10 %.
Nous voilà donc en 2017. L’IFV* - Sicarex Beaujolais a rendu en juin son rapport d’expérimentation (lire par ailleurs) et l’a présenté aux deux ODG et aux membres de la commission Recherche et développement d’Inter Beaujolais. Malgré des résultats convaincants issus de l’expérimentation, les deux conseils d’administration des ODG n’ont pas pris la même décision concernant l’intégration de ce cépage dans leur cahier des charges.
L’ODG beaujolais - beaujolais villages associés (BBVA) a misé sur ce cépage. Si l’introduction du gamaret a suscité des débats et engendré des résultats serrés à l’issue du vote, c’est une décision logique qu’ont pris les élus de l’ODG BBVA, selon Patrice Dumas, président de la Sicarex Beaujolais. « Je suis convaincu que le gamaret améliorera le profil de nos vins par rapport aux attentes des consommateurs. Ce cépage accessoire nous permettra aussi de réduire l’usage de la thermovinification pour les vins de garde. On respectera mieux le terroir. Enfin, lors des débats, il a été question du réchauffement climatique, qui ne joue pas en la faveur du gamaret. Mais la pluie peut toujours entraîner des foyers de pourriture et la résistance du gamaret au botrytis est un atout », commente-t-il.
Le repli, un facteur divergent
Pour Daniel Bulliat, président de l’ODG BBVA, l’envie d’intégrer le gamaret dans le cahier des charges s’inscrit dans la diversification prônée par l’ODG. « Le profil technique du gamaret nous a aussi convaincus », confirme-t-il. Or, c’est sur le plan politique qu’une zone d’ombre apparaît. En effet, le 10 juillet 2014, la commission permanente du comité national de l’INAO avait alerté les ODG sur le fait qu’une éventuelle introduction du gamaret dans les cahiers des charges empêcherait tout repli dans une appellation plus générale. En effet, le gamaret n’entre pas dans la composition de l’encépagement des AOC régionales de Bourgogne. Ainsi, les vins AOC beaujolais et beaujolais villages ne pourraient plus être repliés en coteaux bourguignons. « On sera attentif à cette problématique de repli », confie Daniel Bulliat. Cette décision traduit surtout une volonté des élus de valoriser avant tout l’identité beaujolaise, tout en gardant en point de mire la montée en gamme.
C’est justement cette impossibilité de repli qui a freiné les membres du conseil d’administration de l’ODG des crus. Les vins des différents crus du Beaujolais ne pourraient plus être repliés en beaujolais ou beaujolais villages, ni en bourgogne gamay. Comme l’indique Audrey Charton, la présidente, la priorité a été donnée à la « hiérarchisation (lieux-dits, climats) et la mise en valeur du gamay qui permet de produire de bons vins quand il est bien travaillé. Nous sommes dans l’esprit que le gamay se suffit à lui-même ».
Pour autant, le dossier gamaret n’est pas totalement clos pour plusieurs raisons. Selon nos informations, l’INAO attend encore les conclusions de l’expérimentation sur l’introduction du gamaret au sein de l’encépagement des AOC du Beaujolais. Elle a aussi interrogé les deux ODG mais n’a pas encore reçu de réponse officielle sur leur position, ce sujet devant être présenté et voté en assemblée générale.
Ensuite, comme indiqué précédemment, pour que les vins puissent être repliés, il est nécessaire que les cahiers des charges soient compatibles au regard des conditions de production, et notamment l’encépagement. Ce principe général avait été décidé par la commission permanente du comité national lors de sa séance du 25 mars 2010. Comme le confirme Daniel Bulliat, il a donc été évoqué la possibilité de négocier avec l’ODG bourgogne pour qu’il accepte d’intégrer à son tour le gamaret dans les cahiers des charges. Les cartes sont donc entre les mains de l’ODG bourgogne tandis qu’une issue favorable de ce dossier pourrait logiquement inciter l’ODG des crus à revoir sa position actuelle.
Tout reste à faire donc pour que le gamaret s’implante dans le Beaujolais…
David Duvernay
*Institut français de la vigne et du vin