Jérôme Ménager à Saint-Nizier-sur-Arroux
Plus d’autonomie en « réensemençant » ses sols

Marc Labille
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Depuis sept ans, Jérôme Ménager valorise au maximum ses fumiers dans une recherche d’autonomie complète de son exploitation d’élevage. Pour atteindre cet objectif, l’agriculteur des bords d’Arroux mise sur des micro-organismes naturels qui, en assainissant ses effluents, redonnent vie à ses sols.

Plus d’autonomie en « réensemençant » ses sols
Jérôme Ménager qui, depuis sept ans, voit la santé de ses prairies et de ses animaux s’améliorer.

À Saint-Nizier-sur-Arroux, Jérôme Ménager élève un troupeau charolais de 75-80 vaches allaitantes sur une centaine d’hectares. La production se partage entre femelles maigres et broutards repoussés. En 2015, l’exploitation a entrepris un important virage sur le plan agronomique. À l’époque, Jérôme était confronté à des problèmes de nombrils touchant ses petits veaux. Les vapeurs d’ammoniac étaient très prégnantes dans les bâtiments. Malodorants, les fumiers étaient très collants et laissaient échapper beaucoup de jus, se souvient l’éleveur.

C’est alors qu’une rencontre avec un technico-commercial de la société Sobac lui a fait revoir son approche des choses. L’éleveur s’est mis à traiter la litière de ses animaux avec la solution mise au point par la société aveyronnaise. Objectif : améliorer la qualité des fumiers afin de mieux les valoriser tout en économisant de la paille, confie Jérôme.

Améliorations significatives

Les premiers effets ont été constatés par l’éleveur au premier curage. « J’avais un fumier qui collait moins dans le godet ou dans la benne. Il sentait moins l’ammoniac et davantage le champignon. Il y avait aussi moins de jus autour des tas », décrit Jérôme qui parle d’un fumier « qui se composte naturellement ». Séduit par la démarche, l’agriculteur dit avoir « persévéré sur les prés, les céréales », abandonnant du même coup les engrais P (phosphore) et K (potassium), le chaulage et réduisant les apports d’azote minéral. Au bout de 3-4 ans, il assure avoir constaté un retour du lotier dans ses prairies « plus denses » ainsi que davantage de trèfles. Plus riches en légumineuses, les fourrages récoltés sont de meilleure qualité.

Du côté des animaux, « les vaches n’ont plus de fumier collé sur elles », rapporte Jérôme. Au niveau sanitaire, l’éleveur constate un net recul des cas de mal blanc. L’amélioration touche aussi la reproduction avec « des vaches qui délivrent mieux ».

Un pas de plus vers l’autonomie

Côté cultures, les terres « tirent moins » au labour et elles présentent « moins d’eau de surface. Moins de traction génère moins d’usure et un seul coup de herse suffit pour faire le lit de semence », complète Jérôme. Du méteil a été introduit dans l’assolement de l’exploitation en complément du triticale et du maïs fourrage. Un mélange de triticale, pois, féverole et avoine est récolté en grain sur 4,5 ha. Ce mélange titrant à 14,8 en protéines et dont le rendement atteint 45 quintaux/ha est distribué avec succès aux vaches et aux laitonnes, confie l’éleveur qui n’achète plus de complémentaire. Un méteil ensilage est implanté avant le maïs contribuant lui aussi à parfaire l’autonomie de l’exploitation. Aucun fongicide ni herbicide n’est utilisé pour le méteil, signale aussi Jérôme Ménager.

Une méthode reconnue dans le cadre du label bas-carbone

Le 23 septembre dernier, l’exploitation de Jérôme Ménager était le théâtre d’une journée technique organisée par la société Sobac. Cette dernière promeut une approche alternative de la gestion des sols basée sur l’emploi de semences microbiennes naturellement sélectionnées. Fruit des travaux du fondateur de la marque Marcel Mézy, l’une de ces solutions s’applique aux effluents de ferme, pour une valorisation optimisée de cette ressource dans les sols de l’exploitation. Ces micro-organismes sont censés restaurer la vie du sol, avec l’objectif de le rendre plus autonome et plus fertile. La méthode préconise la suppression des engrais de fonds et amendements calciques ainsi qu’une réduction de l’azote. À la place, il s’agit de tirer le meilleur parti des effluents de ferme pour une production plus autonome. Moins gourmande en intrants, la méthode Sobac mise sur un meilleur équilibre naturel entre le sol, la plante et l’animal, favorisant une meilleure qualité des fourrages, une meilleure santé des animaux, un meilleur état des cultures… De par ses pratiques agricoles contribuant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, la méthode Sobac est l’une des quatre approuvées par le Ministère de la transition écologique dans le cadre du label bas carbone.

Regarder, toucher, sentir le sol…

Regarder, toucher, sentir le sol…

Une quarantaine d’agriculteurs ont assisté à cette journée centrée sur l’agronomie. Le matin, une spécialiste en microbiologie est intervenue sur la vie du sol et le rôle crucial des micro-organismes. L’après-midi, Christophe Frebourg, agronome formateur indépendant, est venu expertiser deux profils de sol réalisés dans deux parcelles voisines de Saint-Nizier-sur-Arroux : l’une appartenant à Jérôme Manager (méthode Sobac depuis 7 ans) ; l’autre d’un voisin en conduite conventionnelle. Devant un auditoire captivé par un discours à la fois pointu et accessible, l’intervenant expérimenté a décrypté les deux profils de sol, incitant à regarder, sentir, toucher la terre. Il s’est aussi attaché à expliquer les différences visibles entre les deux fosses. Celle de Jérôme Ménager se révélant en bien meilleur état que l’autre profil avec un sol plus vivant, plus aéré, un système racinaire plus profond, des racines plus denses…