Nouvelles prédations loup(s), lynx, chiens errants…
Et maintenant des bovins

Cédric Michelin
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Triste loi des séries. Depuis le lâcher des animaux aux prés, des attaques contre des ovins – et fait nouveau contre des bovins – ont été enregistrées ces derniers jours en Saône-et-Loire. La profession met donc toujours plus la pression sur le Préfet - et les louvetiers - pour résoudre rapidement ces cas de prédations, attribués à des chiens errants, un lynx et potentiellement deux loups… faisant craindre l’installation d’une meute. Contrairement aux éleveurs ovins, l’obtention de tirs de défense simple est plus simple pour les éleveurs bovins. Un levier à utiliser d’urgence.

Et maintenant des bovins

Le loup ne s’attaque pas qu’aux moutons… Depuis le milieu de semaine dernière, la profession agricole en est sûre (même si l’administration n’a rien confirmé à l’heure de notre bouclage, N.D.L.R.), le loup a maintenant attaqué des génisses et des broutards, dont une bête de 400 kg ! Comme pour les éleveurs ovins, le choc et le traumatisme sont grands chez les éleveurs charolais du berceau de la race. La colère grandit avec toujours cette incompréhension, comment des élus, parlementaires et l’État peuvent-ils accepter de protéger le loup plutôt que les éleveurs ?

Continuant ce « travail de fond » pour changer les réglementations protégeant les loups au national et du côté de l’Europe, pour la FNO et la FNSEA, respectivement, Alexandre Saunier et Luc Jeannin, continuent de « monter au créneau » (lire encadrés). Avec des populations et des meutes toujours plus intrépides et se rapprochant des villes, le grand public et les médias commencent à ressentir le danger pour les chevaux, poneys, chiens… qui attirent plus la sympathie et l’empathie dans notre société, ne considérant plus les éleveurs à leur juste valeur.

Si Alexandre Saunier, de la section ovine à la FDSEA, se bat pour obtenir ce respect du travail des éleveurs, comme à chaque fois qu’il y a des prédations, sa priorité se veut « concrète » et pragmatique : stopper les attaques ! Plusieurs réunions et rencontres ont déjà eu lieu avec les éleveurs prédatés et les services de la Préfecture. D’autres sont en cours de calage et en préparation.

Mauvais pressentiment

La profession se mobilise donc et fait bloc. Dès les premières attaques recensées vendredi dernier, le président de la Chambre d’Agriculture, Bernard Lacour s’est rendu sur place au Breuil chez Jean-Charles Dessoly pour constater de visu les dégâts. Pour lui, pas de doutes, ce ne peut être que l’œuvre d’un loup. Il aurait ainsi dévoré 7 à 10 kg laissant la génisse et le broutard agonisants, tous deux euthanasiés depuis par le vétérinaire. Chambre, FDSEA, JA ont immédiatement « réclamé » auprès de la DDT des Tirs de défense simple (TDS) pour les éleveurs prédatés, encore sous le choc. « Nous les avons obtenus 3 heures après car les éleveurs de bovins n’ont pas besoin d’installer des protections » pour obtenir un TDS, contrairement aux éleveurs ovins. Le lendemain, samedi, un nouveau « carnage » était à déplorer, avec 7 nouvelles génisses dans l’élevage de Thomas Develay, toujours aux portes du Creusot. Si elles n’ont pas dû être euthanasiées, elles portent des blessures, sous le ventre, et sur le flanc arrière. « J’ai aussi peur pour mes poulains », expliquait-il à notre confrère de creusot-infos.com.

Dans cette terrible nuit de vendredi à samedi, plusieurs attaques ont eu lieu donc. À Écuisses et du côté du Breuil et de Saint-Firmin. Toutes ces attaques en quelques jours ont mis, à juste titre, les éleveurs de la région du Creusot, en colère. Car la peur est vive, autant dans la vallée du Mesvrin, que dans la région de Montchanin.

Suivant ce dossier pour la FDSEA, Benoit Regnaut a comme un « mauvais pressentiment » en cette déjà quatrième année où la Saône-et-Loire est fréquemment décrite comme un front de colonisation : « et s’il y avait deux loups et un risque d’installation d’une meute avec louveteaux ? », ne veut-il pas porter malheur, invitant à redoubler de vigilance aux quatre coins du département, pas uniquement dans les secteurs prédatés à ce jour. Loi des séries, des attaques de chiens errants et certainement d’un lynx viennent « perturber » les macabres décomptes.

TDS automatique pour les bovins

Le président de la FDSEA, Christian Bajard rencontrait à nouveau cette fin de semaine le Préfet pour qu’il « donne ordre aux louvetiers de tirer. Les éleveurs sont à bout psychologiquement, de plus en plus, et ont envie de prendre les fusils ». Mais seuls les louvetiers sont équipés de lunettes thermiques nocturnes. La profession avait obtenu des financements pour en acheter de nouvelles, « aux louvetiers de les utiliser pour nous débarrasser des loups ». Éleveur ovin prédaté dans le Clunisois, Julien Fuet ne décolère toujours pas plusieurs années après. « Il y a plein de règles (100 m, de face, pattes sur filet…) protégeant les loups avec certains louvetiers les appliquant trop à la lettre pour avoir une excuse de ne rien faire », dénonce-t-il. FDSEA, JA et Chambre n’entendent pas laisser pourrir la situation et vont « taper du poing » pour que le Préfet s’impose.

Bonne nouvelle si l’on peut dire, en cas d’attaque sur bovins, les Tirs de défense simple sont automatiquement accordés par la réglementation et la DDT. La profession incite donc à en faire la demande et même, peut-être demain, collectivement au niveau d’une commune.

Sécurité publique : « à l’État d’assumer »

Il y a urgence. Car le danger pour les automobilistes est désormais de percuter, non pas une brebis, mais une vache ou de voir un troupeau s’échapper par peur et divaguer sur des axes de circulation tels que que la RCEA ou la ligne TGV. « Qu’en est-il de la sécurité publique ? », demandera au Préfet, Sandrine Meunier, élue Chambre. Le comble serait alors qu’un malheureux accident soit ensuite imputé à l’éleveur, propriétaire des bêtes. « Ce sera à l’État d’assumer », préviennent FDSEA, JA et Chambre de Saône-et-Loire, sans en démordre.

Ce sera peut-être aussi aux « associations pro-loups d’assumer » demain de tels drames humains, car certains échos provenant du Jura voisin, rapportent leur intention de venir « de nuit dans les champs en cas de TDS » pour les empêcher, s’énerve déjà Thibaut Renaud, secrétaire général à JA71. En retour, JA les surveille également de près. Technicien ovin à la Chambre d’Agriculture, Laurent Solas fait régulièrement le bilan. Il refera des alertes en cas de prédation et rappellera les droits des éleveurs à demander des Tirs de défense. Tous les éleveurs sont invités à lui remonter un maximum d’informations pouvant faciliter traques et suivis des attaques.

Reste qu’au final, le plan Loup ne satisfait vraiment pas la profession, et c’est un euphémisme, tant les éleveurs continuent de mettre la pression à tous les échelons (FNSEA, FNO, JA, Copa, parlementaires, gouvernement…) pour changer radicalement l’orientation de ce plan Loup suite notamment aux révélations qui ont confirmé la sous-évaluation chronique des populations lupines, revenues à de haut niveau. Reste que trop de partis politiques et élus traînent encore des pieds à l’admettre et à prendre position clairement pour les éleveurs…