Rugby
Jérôme Rey : « J’ai la chance de vivre de mes deux passions »

À 28 ans, Jérôme Rey est à la tête d’un troupeau de 97 charolaises et de 87 hectares de céréales et de prairies. C’est dans la vallée de la Tarentaise qu’il mène de front sa passion aux côtés de son père et deux salariés à mi-temps sur l’exploitation. Mais ce Savoyard est également rugbyman au Lou Rugby, depuis septembre 2021.

Jérôme Rey : « J’ai la chance de vivre de mes deux passions »
Jérôme Rey lors d’un entraînement ©Julien Poupart_FFR

Pour Jérôme Rey, le rugby, c’est d’abord un rêve d’enfant. « J’ai commencé quand j’avais huit ans, je jouais avec des copains. On rêvait d’atteindre un niveau professionnel, et je l’ai fait. Je n’aurais jamais pensé arriver jusque-là. » À tout juste 18 ans, il crée son exploitation. Quelques mois plus tard, il se voit proposer son premier contrat professionnel au Club sportif Bourgoin-Jallieu rugby. L’exploitation étant déjà lancée, il était alors hors de question pour lui de choisir entre ses deux carrières. L’éleveur de bovins mène donc de front ses deux passions, qu’il concilie depuis presque 10 ans. Après avoir poussé les portes du FC Grenoble Rugby, il rejoint finalement le Lou Rugby et le top 14. Aujourd’hui, il produit de la viande de bœuf et de veau, qu’il commercialise en vente directe, et continue de vivre à un rythme effréné.

« Les vacances sont compliquées à prendre »

Jérôme Rey le confirme : une exploitation, c’est aussi plein d’imprévus : « le tout, c’est de gérer au maximum pour qu’ils n’arrivent pas lorsque je ne suis pas présent sur l’exploitation ». En effet, le rugbyman professionnel est présent au stade cinq jours par semaine, il doit donc passer la main à une personne de confiance qui veille sur son exploitation lorsque ses obligations sportives l’appellent. Un match par week-end, des entraînements intensifs pendant la semaine, une exploitation et une vie de famille à gérer, ce n'est pas toujours évident. Mais ce sportif de haut niveau, à l’image du sport qu’il pratique, a l’habitude de foncer tête baissée et de ne pas compter sa charge de travail. « Dans ces deux métiers, et surtout dans le métier d’agriculteur, on ne voit jamais l’impossible. Certains week-ends de match, je ne suis pas choisi car je ne suis pas en forme. Pourtant, je ne m’en rends pas compte. Les autres le voient, mais pas moi. » Si Jérôme arrive à tout concilier, c’est aussi grâce au soutien de sa famille. « C’est elle qui me donne la force de réussir et de persévérer. Ce n’est pas tout rose tout le temps. Sur le papier ça paraît tout beau, mais à vivre c’est autre chose », avoue-t-il. Mais Jérôme Rey a désormais trouvé un équilibre, après de nombreuses années au cœur de cette pluriactivité.

« Je suis heureux de me lever le matin »

Pour l’éleveur savoyard, le constat est clair. « Après 10 ans, j’ai trouvé un équilibre, mais je sais que je ne ferai pas ça toute ma vie. Ça fonctionne quand on est jeune, quand on a la santé », dit-il. Ce père de deux enfants de cinq et deux ans s’évertue également à passer un maximum de temps à leurs côtés, et lorsque le temps manque, c’est sur les bancs du stade ou dans le tracteur qu’ils se retrouvent. Une manière pour le rugbyman de partager avec eux ses passions. Le rugby, c’est une question de passion, mais aussi d’ambiance.  « Quand on était des gamins, 200 personnes venaient nous voir jouer. Maintenant c’est 25 000 qui sont au rendez-vous. Dans quelle situation 25 000 personnes vous regardent faire votre métier ? » plaisante-t-il. C’est avec humilité que le sportif témoigne de sa reconnaissance envers ses supporters, qui lui transmettent l’envie continuelle de se surpasser. Car au-delà de cette vie à 100 à l’heure, c’est aussi la peur de l’échec qui traverse régulièrement son esprit. Ce pilier gauche a touché son rêve du doigt l’année dernière : rejoindre les 42 joueurs du XV de France pour préparer le Tournoi des six nations. Il rêve désormais d’y retourner, afin d’arborer avec fierté le coq de l’équipe de France.

Charlotte Bayon