8e Édition de Terres de Jim
Emmanuel Macron annonce un pacte de renouvellement et d’avenir

Lors de son déplacement le 9 septembre à Outarville (Loiret) pour la 8e édition des Terres de Jim, organisée par les Jeunes agriculteurs, le président de la République, Emmanuel Macron, a détaillé les grandes lignes de la future loi d’orientation agricole. Il a aussi rendu les derniers arbitrages sur l’assurance-récolte.

Emmanuel Macron annonce un pacte de renouvellement et d’avenir
La présidente des JA71, Marine Seckler, et son secrétaire général, Thibault Renaud, ont échangé avec le président de la République, Emmanuel Macron.

« Je souhaite une mobilisation de tous au service du renouvellement des générations et au service de la souveraineté agricole et alimentaire », a annoncé le président Emmanuel Macron, en rendant un vibrant hommage à la résilience du monde agricole au cours des deux dernières années, notamment pendant la crise du Covid et depuis le début de la guerre en Ukraine. « N’oublions pas tout ce que nous devons à l’agriculture », a-t-il déclaré, regrettant que beaucoup soient « retournés à leurs vieilles habitudes ». S’il donne quitus aux lois ÉGAlim 2 « grâce auxquelles on a évité des drames (…), on va appliquer avec fermeté, on va mobiliser, et je suis prêt à ce qu’on change encore les choses si nécessaire », a-t-il lancé. Le chef de l’État qui a par ailleurs mis un terme au débat sur les critères de l’assurance récolte (lire encadré) a pris l’engagement que les contrôles seront renforcés envers certaines grandes enseignes, car « l’alimentation a un prix », a-t-il martelé. Réaffirmant que la souveraineté alimentaire « passe par l’eau », il entend « sanctuariser la ressource en eau pour l’agriculture » et a invité « à dépassionner le débat ».

Faciliter la transmission

Emmanuel Macron a surtout esquissé les grandes lignes de ce que sera la future loi d’orientation agricole qui devrait être rédigée avant la fin du premier semestre 2023. Si les mécanismes sont déjà en place pour défendre le revenu agricole, armer l’agriculture contre les aléas climatiques et faire face aux grandes transitions, « nous avons encore deux défis devant nous : celui de la souveraineté alimentaire et le mur démographique. Deux défis qui arrivent au pire moment en raison de l’inflation, du dérèglement climatique et parce que les revenus ne sont pas là », a-t-il dit. Ce qu’il appelle le « pacte de renouvellement et d’avenir » s’appuiera sur quatre piliers. Tout d’abord celui de la formation et de l’information. Il compte ainsi déployer 20 millions d’euros (M€) du fonds Compétences de France 2030, pour « soutenir l’innovation pédagogique dans nos établissements ». Il propose aussi la création d’un statut d’expert associé au sein des établissements « car l’enseignement agricole a besoin de compétences extérieures ».

Le deuxième pilier s’intéressera à « faciliter la transmission » et visera à « renforcer le dialogue entre les générations », avec le double objectif de « donner de la visibilité et d’anticiper les transmissions ». L’installation, le foncier, l’accès aux terres constituent les fondements du troisième pilier. « Il nous faut aider les jeunes pour que le ticket d’entrée soit soutenable ». D’où l’idée d’Emmanuel Macron de mettre en place un fonds « Agriculteurs du vivant » qui serait doté de 400 M€ pour faciliter le portage du foncier. Ce même fonds servirait aussi les jeunes agriculteurs à réinvestir dans leur outil de production, notamment lorsque la reprise concerne une exploitation où le cédant n’a rien investi depuis plusieurs années. L’objectif recherché est la rentabilité de l’entreprise. « Ce troisième pilier est le pilier clé », a martelé Emmanuel Macron.

« Nouvelle révolution »

Enfin, quatrième et dernier pilier : la transition et l’adaptation au climat. Partant du principe que les jeunes ne pourront pas s’installer dans les mêmes conditions (économiques, agronomiques, climatiques, etc.) que leurs aînés, le chef de l’État veut leur donner de la visibilité. « Je veux aider les nouveaux entrepreneurs du vivant à participer à cette nouvelle révolution », a-t-il affirmé. Concrètement, ce quatrième pilier s’appuiera sur une cartographie des territoires qui permettra de mieux identifier les évolutions climatiques et d’adapter les cultures. « C’est pourquoi il faut poursuivre l’investissement dans la recherche pour avoir une vision à 20/30 ans », a ajouté Emmanuel Macron. Ce dernier pilier passera aussi par la mise en place, avec les chambres d’agriculture, d’un « stress test climatique » intégré au parcours d’installation et par la rémunération des puits de carbone et des énergies renouvelables. Avant même cette future loi d’orientation agricole, à laquelle les organisations agricoles et les collectivités locales seront associées, la loi d’urgence éponyme annoncée fin juillet par le gouvernement contiendra un volet agrivoltaïsme et méthanisation. 

JA71 alerte Emmanuel Macron sur ÉGAlim 2

JA71 alerte Emmanuel Macron sur ÉGAlim 2

En visite sur le stand de JA71, la présidente Marine Seckler a interpellé Emmanuel Macron qui a fait un tour de tous les stands des fédérations régionales des JA de France. L’occasion d’aborder des sujets parfois moins évoqués comme la vente directe « qui ne va pas bien du tout » avec l’inflation générale, phénomène impactant aussi la filière Bio « également touchée » par une baisse d’activité marchande. Mais il a surtout été question de la loi ÉGAlim « qui patine ». Marine Seckler en a donc profité pour lui demander de bien « faire appliquer » la loi, condition sine qua non, pour « remonter le moral du monde agricole - qui comme les infirmiers, les policiers… - est victime d’un manque de reconnaissance publique », voire, est victime de lynchage médiatique et politique. « Dans ces conditions, comment motiver des jeunes à s’installer sans reconnaissance, sans prix valorisants ? Avec Thibault (Renaud, N.D.L.R.), on insiste sur ÉGAlim, on veut que cela bouge, car c’est important pour le renouvellement des générations. Des jeunes qui veulent simplement vivre de leur métier », a-t-elle conclu devant un président de la République attentif.

En réponse, ce dernier a annoncé qu’il était ouvert, en cas d’échec de la loi ÉGAlim 2, à une nouvelle réforme des relations commerciales dans le secteur agricole et agroalimentaire visant à « protéger les producteurs et protéger les transformateurs ». Le président de la République a déclaré que « si la deuxième saison d’ÉGAlim 2 n’est pas au rendez-vous, je suis tout à fait prêt à ce qu’on continue à changer de manière profonde nos textes pour aller plus loin, protéger les producteurs et protéger les transformateurs, en particulier les PME et TPE du secteur si elles continuent d’être sous la pression de certaines structures qui ne veulent pas jouer le jeu, qui n’ont pas compris que le monde était en train de changer ». Au préalable, le locataire de l’Élysée a promis que la loi ÉGAlim 2 « sera appliquée avec la plus grande fermeté et des sanctions comme celles qu’on a passées d’ailleurs, l’année dernière, seront mises en place. Elles sont parfois massives, vous le savez ».

Il a, au passage, soutenu publiquement l’annonce du discounter Lidl concernant le prix du lait. Présent à Terres de Jim, le directeur de Lidl France Michel Biero a en effet annoncé que son enseigne va signer une revalorisation du prix du lait payé aux producteurs à 500 € / 1.000 l (prix de base 38/32) avec la Laiterie Saint-Denis-de-l’Hôtel (LSDH).

Assurance récolte : les derniers arbitrages rendus

Assurance récolte : les derniers arbitrages rendus

Au cours de son intervention, Emmanuel Macron a confirmé ce que les organisations professionnelles agricoles attendaient avec impatience, c’est-à-dire la mise en place des critères européens Omnibus « 20/70/90 ». Autrement dit, le seuil de déclenchement est fixé à 20 % de pertes, tandis que l’État subventionnera à hauteur de 70 % les polices d’assurances des agriculteurs. Enfin, il interviendra à hauteur de 90 % pour le déclenchement de la solidarité nationale. « Avec ce dispositif, nous voulons créer un appel d’air et inciter les agriculteurs à s’assurer », a-t-il dit. Cependant, ce dispositif est soumis à une clause de revoyure « si on dépasse 680 millions d’euros. On remet alors tout le monde autour de la table ».

« Un aboutissement positif »

La FNSEA et JA ont salué la décision du président de la République d’avoir « posé les jalons d’une réforme structurante de la gestion des risques en agriculture ». Pour les deux organisations, c’est un « travail constructif » avec les associations spécialisées et les filières qui a permis d’aboutir « positivement ». La FNSEA et JA pressent maintenant le gouvernement « d’agir vite » pour que les compagnies d’assurance soient prêtes avant le 1er janvier 2023. Les deux syndicats lui demandent aussi de refondre la « règle de la moyenne olympique quinquennale servant de base à l’historique de rendement ».