Visite préfectorale dans les vignes
Coup de chaud sur les vendanges

Cédric Michelin
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Le 12 septembre, l’Union viticole 71 organisait sa traditionnelle visite des vendanges pour les élus. Préfet, sénateur, député, conseiller et maires avaient répondu présents. Si parfois, c’est le vin qui libère la parole ; là, c’était plutôt la fatigue de vendanges jours et nuits. Au Château de la Greffière à La Roche-Vineuse, toutes les revendications ont été portées aux oreilles des Parlementaires et du représentant de l’État. Et elles sont nombreuses autour de l’emploi.

Coup de chaud sur les vendanges
Isabelle (de dos) et Xavier Greuzard expliquaient au Préfet que malgré les nombreuses problématiques, le millésime 2023 sera qualitatif.

Alors que les vendanges ont démarré sous de fortes chaleurs en août pour la récolte des crémants de Bourgogne, c’est une deuxième canicule, cette fois en plein septembre, que les vignerons et leurs vendangeurs doivent affronter. Résultat, des vendanges de nuit ou bien l’aube à peine levée pour les récoltes manuelles. Côté maturité, les degrés montent vite également dans les baies de raisin qui en plus, se concentrent, précipitant leur récolte. C’est donc une course-poursuite contre le temps qui s’est enclenchée en pinot noir et même par endroit en chardonnay.

Au Château de la Greffière, Xavier Greuzard débute à 3 heures du matin pour parvenir à vendanger ses 65 ha avec son équipe de permanents et de saisonniers. Avec les fortes chaleurs, les équipes à la vigne finissent à 13h30. Une année charnière pour le domaine qui vendange ici son premier millésime officiellement labellisé en Bio, après trois années de conversion. « Je suis allé chercher mes rendements au prix de beaucoup plus de travail et de complications », aussi bien technique qu’en termes de recrutement de main d’œuvre. « Aucun itinéraire n’est parfait, pas même le Bio. Cela engendre une consommation de gasoil plus importante (+30 %), des investissements énormes (tracteurs…), plus de traitements et je dois travailler 80 h/semaine, car on ne trouve pas de personnel », fait-il les comptes. Son beau-frère et associé qui s’occupe de la partie commerciale, Gaylord Petrillo expliquant qu’après les hausses de prix des dernières années des vins du Château, difficile aujourd’hui d’en passer de nouvelles aux clients dans un contexte d’inflation et de pertes de pouvoir d’achat. Pourtant, les vignerons, eux aussi,, subissent de violentes hausses de leurs coûts de production : matières sèches, énergies et salaires en tête. « On a augmenté tous nos permanents, mais ceux qui ont la niaque et qui bossent dur sont en train de se rapprocher du Smic », regrette-t-il ce nivellement. Démotivants donc...

Des vendangeurs administratifs…

Président de l’Union viticole, Patrice Fortune signale à nouveau le problème du manque de candidats pour les vendanges ou s'inscrivant mais ne venant jamais, ou s’excusant au dernier moment ou arrêtant après un jour de vendanges. « C'est juste pour juste avoir une validation de recherche d’emploi » et continuer de toucher ensuite des aides sociales, comprenait trop bien l'assistance. Le préfet, le sénateur et conseiller régional Durain, le député Dirx et le conseiller départemental Brochot en sont conscients. Le problème du recrutement de vendangeurs est d’autant plus prégnant cette année qu’avec des vendanges parfois en deux temps, entre les crémants et les vins tranquilles, certains vont devoir retourner dans leur entreprise après une semaine de congés.

Heureusement, les vendanges des crémants en côte chalonnaise se terminent et le Groupement d’employeurs départemental (GED) Agri Emploi Rural 71 répartit ses 150 vendangeurs entre le Mâconnais et le Chalonnais. Le président de la FDSEA, Christian Bajard enfonçait toutefois le clou : « on ne peut pas remettre au lendemain des vendanges, des traitements, des travaux de saison… en agriculture. Et cela, la société et l’État ne doivent pas le perdre de vue », insistait-il pour que ce dossier reste en haut de la pile après les vendanges.

Du plein-emploi à la décroissance ?

Le député Benjamin Dirx voyait là les limites du « plein emploi » avec un bassin mâconnais comptant 5,5 % de la population active sans emploi. Il reconnaissait que pour les entreprises, elles sont « à un tournant », lui « n’étant pas pour celui de la décroissance » de l’activité des entreprises, faute de main-d’œuvre. Le départ en retraites de la génération babyboom a néanmoins fait un solde négatif du côté des entrées-sorties sur le marché de l’emploi, augmentant la concurrence et faisant croître les salaires des profils les plus recherchés. Pour le Département, Frédéric Brochot redisait travailler sur ces questions et sur celles du logement des vendangeurs. À ce sujet, le préfet Yves Séguy semblait avoir « presque » appris par voie de presse l’initiative d’un village éphémère de vendangeurs en Côte-d'Or. « On va trouver une date de réunion sur l’emploi et on fera mieux qu’un village de tentes. On va tester à une échelle différente », promettait le préfet, prenant date avec les services de la DDT présents.